C'est rare mais possible
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BEAUHARNOIS – Judith Boyer est pompière au Service de sécurité incendie de la Ville de Beauharnois, en Montérégie, depuis 1995. Si elle est parmi les rares femmes à pratiquer ce métier au Québec, sa passion n’en demeure pas moins grande pour cette profession physiquement exigeante.
Mardi matin, moment prévu pour faire l’entrevue avec Judith Boyer à la caserne de Beauharnois, un appel d’urgence est logé. L’équipe des pompiers est appelée à intervenir. C’est le branle-bas de combat à la caserne. Les sirènes allumées, le camion part en trombe sur les lieux d’un accident.
Judith Boyer, qui n’était pas de l’équipe de garde cette journée, regarde ses collègues partir les yeux envieux. «On ne souhaite jamais les feux ni les accidents, mais comme c’est notre métier, lorsqu’il y a une situation d’urgence, on a une envie incontrôlable d’intervenir. C’est comme une poussée d’adrénaline, a raconté celle qui pratique ce métier depuis 17 ans. Et même après toutes ces années, l’adrénaline est toujours aussi forte à chaque intervention.»
Cette passion, elle l’a depuis qu’elle est toute jeune. «J’étais encore petite quand la maison d’un de nos voisins a flambé, a-t-elle ajouté. C’était un très gros incendie, et je me souviens avoir eu très peur. Peu après, j’ai commencé à être fascinée. Nous avions un autre voisin qui était pompier à Beauharnois. Alors quand je le voyais partir sur un appel, je prenais ma bicyclette et le suivais jusqu’à l’incendie pour observer les pompiers en action.»
Son choix a donc été clair au moment de décider d’une carrière. Elle a suivi les neuf modules nécessaires pour devenir pompier de classe un, ceux qui peuvent exercer à temps partiel (pour les pompiers à temps plein, la formation comprends 27 modules).
«Le test final pour être accepté ou non est très physique, a-t-elle dit. Ça demande une grande forme en plus d’une grande habileté. Et qu’on soit une femme ou un homme, c’est la même chose: il n’y a pas de privilège.»
Étant bien préparée, tant sur le plan technique que physique, elle a réussi le test du premier coup. «Et en 1995, je joignais l’équipe des pompiers de Beauharnois», a-t-elle dit fièrement.
Dans un monde de gars
Seule femme dans la caserne, et rare femme dans la profession, Mme Boyer croit que c’est d’abord à elle de s’adapter. «Je suis la minorité, alors je dois m’habituer au style de mes collègues», a-t-elle précisé.
Quoi qu'il en soit, elle dit ne jamais avoir eu de problème. Ses collègues sont d’une courtoisie sans reproche. «Eux aussi s’adaptent à ma présence, d’une certaine manière, a-t-elle dit. On fait souvent des blagues, mais ce n’est jamais des attaques sexistes. En fait, ce n’est jamais arrivé. Ils sont tous très respectueux.»
Aussi, quand vient le temps d’intervenir sur un incendie ou un accident, l’adrénaline embarque et chacun, gars ou fille, a un rôle clé à jouer dans l’intervention. «Le fait d’être une femme ne fait alors plus de différence, puisque peu importe la tâche à laquelle on est assigné, chaque rôle est primordial pour combattre un feu ou sauver une personne», a-t-elle indiqué.
Des préjugés à briser
Il y a quelques années, Mme Boyer a suivi une formation en prévention qui l’a menée dans les maisons et les écoles pour parler aux gens ou aux jeunes des principales règles de préventions des incendies.
«Une fois, je suis entrée dans une classe avec un collègue pompier et les enfants se sont exclamés: "Oh, un pompier avec une policière!" Ils ne pouvaient pas concevoir qu’une femme pompier, ça existait, a-t-elle dit. Même après leur avoir dit que j’étais pompière, ils ont répondu: "Hein? Une femme pompier, ça se peut pas!"»
Il reste donc encore du chemin à faire pour faire tomber les préjugés qui pèsent sur cette profession. Malgré tout, elle encourage toutes les filles qui se passionnent pour le métier d’aller au bout de leur rêve. «Il suffit d’être en bonne forme physique et d’être passionnée!» a-t-elle conclu.