Un rapport d’étape et des défis
La commission Charbonneau reprendra ses audiences publiques lundi prochain
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Après un an et demi de témoignages, la commission présentera ses premières conclusions sur les problèmes de collusion et de corruption dans le milieu de la construction au Québec. Maintenir l’intérêt du public sera également l’un des grands défis à relever en 2014.
La juge Charbonneau va devoir faire parvenir son rapport de mi-mandat au gouvernement québécois avant le 31 janvier. Ce dernier pourrait le rendre public assez rapidement par souci de transparence, estiment les experts.
Après avoir entendu plus d’une centaine de témoins depuis juin 2012 sur la collusion, la corruption et l’infiltration du crime organisé dans l’industrie de la construction, la commission a désormais la lourde tâche de proposer des solutions pour ne plus voir de tels scandales se reproduire.
«Le rapport intermédiaire va rester très général», prévient cependant Martine Valois, professeure de droit à l’Université de Montréal.
La commission évitera d’aller trop loin dans ses conclusions qu’elle gardera pour le rapport final attendu au printemps 2015, explique-t-elle, puisqu’il reste encore de longs mois d’audiences. «Elle doit prendre le temps de faire un tour d’horizon complet pour éviter des contestations judiciaires par la suite.»
La mafia pourrait, entre autres, occuper une place centrale dans ce rapport, estime son homologue de l’Université d’Ottawa, Charles-Maxime Panaccio. «On a dégagé plusieurs tableaux, reste à voir s’il y a un fil qui les relie tous ou en partie, comme le crime organisé», avance-t-il.
L’APPUI DES TRIBUNAUX
Les multiples recours – tous perdus – intentés par la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), cet automne, afin d’empêcher la commission d’utiliser des écoutes électroniques, ont par ailleurs montré que cette dernière bénéficiait d’un appui majeur de la part des tribunaux.
«Ils font preuve de retenue parce que la commission aborde des questions d’intérêt public majeures», souligne Me Simon Ruel, spécialiste des commissions d’enquête.
Toutefois les travaux effectués en 2013 ont leurs limites: «Il y a eu très peu de preuves positives, il serait temps de montrer aussi que les choses fonctionnent bien dans certains domaines.»
De plus, bien qu’incriminantes, les allégations ont mené à très peu de poursuites. «C’est un gros enjeu. Ça démontre les difficultés qu’ont les services policiers et la justice à conclure leurs enquêtes et à aboutir à des accusations.»
ESSOUFFLEMENT DE L’INTÉRÊT
La juge France Charbonneau et son équipe auront ainsi d’importants défis à relever en 2014, sans compter celui de continuer à susciter l’intérêt du public, estiment également les experts. Certains redoutent des redondances. «Beaucoup de thèmes se recoupent et reviennent. On peut craindre un certain essoufflement», avance Me Ruel.
Les procédures judiciaires en marge de la commission et les ordonnances de non-publication à répétition peuvent aussi donner l’impression que la commission fait du sur-place, estiment plusieurs spécialistes dans le domaine.