Les Cris veulent protéger une des dernières forêt vierge du Québec dont dépend leur mode de vie ancestral
Les coupes ont fait fuir les animaux et les chasseurs cris perdent beaucoup de revenus
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WASWANIPI | «Les animaux fuient devant la machinerie», décrit Joseph Neeposh, un sage cri.
À 86ans, Joseph Neeposh est né en forêt et il y a élevé ses cinq enfants. Il a vu les travailleurs couper et replanter les arbres, puis revenir sur leurs traces pour recommencer. Un cycle sans fin qui a rendu la vie dans le bois impossible, selon lui.
«Les appareils coupent tous les endroits sûrs où les animaux peuvent se réfugier. Quand je les vois travailler, ça me fait mal. C’est ma vie qu’ils détruisent», raconte l’elder (ancien).
«J’ai essayé de vivre comme mon père le faisait, mais ce n’est plus possible à cause des coupes», explique-t-il.
Comme M.Neeposh, Roméo Saganash a grandi dans la vallée de la Broadback. Il est le député néo-démocrate cri de la région.
La vaste zone de 13000km2, que le Grand Conseil des Cris veut aujourd’hui transformer en aire protégée, était le territoire de chasse de son grand-père. À la mort du patriarche, le territoire a été divisé en cinq et il reste aujourd’hui sous la garde des Saganash.
À l’époque de sa naissance, au début des années 1960, «le développement industriel commençait à peine, explique le député. Aujourd’hui, on en voit les conséquences sur le territoire et les animaux.»
Terre Saganash
De leur enfance dans la vallée, tous gardent «un souvenir de beauté et d’abondance», décrit le député fédéral.
Au début des années 1980, son cousin Malcom tuait encore une centaine de martre d’Amérique par hiver. À 100$ la fourrure, c’était une source de revenus non négligeable pour le chasseur. Mais, cette saison, il n’en a pas tué une. Il n’a pas non plus vu de lynx depuis des lunes.
Facteurs multiples
Installé près du poêle à bois dans son camp de chasse, à six heures de skidoo de Waswanipi, Malcom Saganash montre sur une carte ce qu’il lui reste de forêt intacte.
Il évalue que pas moins de 90% de son territoire de chasse a été affecté par l’activité industrielle. Les chemins forestiers, les coupes, la sylviculture et les lignes de haute tension venues de la Baie-James ont complètement modifié le paysage. En plus, des projets de mines se trament à l’horizon.
«On ne peut pas pointer un seul type de développement, indique Roméo Saganash. Le problème, c’est l’accumulation et les routes.»

