22 condamnations pour son bardeau de mauvaise qualité
Mauvaise installation, délai dépassé, garantie échue: le fabricant ontarien IKO collectionne les excuses depuis 2010 pour refuser d’indemniser ses clients québécois. Mais, dans 22 cas, c’est le citoyen qui a remporté la guerre juridique contre ce Goliath de la toiture.
Ils viennent de Drummondville, Québec, Trois-Rivières, L’Épiphanie, Mascouche, Granby ou Terrebonne. Une cinquantaine de résidents ont envoyé en cour l’entreprise IKO à cause de son bardeau d’asphalte qui fendille ou retrousse après 8, 10 ou 15 ans, alors qu’il est garanti 25 ou 30 ans.
Des consommateurs ont perdu leur cause, d’autres l’ont vu reporter, mais près de la moitié ont été dédommagés.
François Bélisle est l’un d’eux. Le citoyen de Drummondville a obtenu 2035 $ le 9 mai. Son bardeau garanti 30 ans semblait en bon état quand on le regardait d’en bas. Mais, une fois monté sur le toit, on voyait que celui-ci, crevassé, ressemblait à un vaste champ de bataille.
«On ne fait pas ça juste pour l’argent. On le fait aussi pour le principe», dit-il.
Beaucoup d’excuses
On constate à la lecture des décisions de la Cour que l’entreprise fait preuve d’une grande créativité pour tenter de ne pas payer.
Un simple problème de ventilation dans le toit de M. Bélisle, prétend le représentant d’IKO. Mais il ne se rend pas sur les lieux avant de conclure à pareille chose. Un architecte engagé par le citoyen qui s’est déplacé a estimé que la ventilation était correcte.
IKO mentionne aussi que la pente est faible et que, dans ce cas, son bardeau n’est garanti que 12 ans. Mais le juge constate qu’il est difficile de déterminer une pente à la simple vue d’une photo.
«Ce n’est pas vrai que nous prenons les choses à la légère. Nous nous occupons bien de chaque cas», se défend Derek Fee, porte-parole chez IKO joint hier à ses bureaux de Brampton, en Ontario.
Le même 9 mai, un autre juge a quand même donné raison à un citoyen de Terrebonne. IKO prétendait que le bardeau de marque Marathon avait été mal installé, mais il n’a jamais réussi à le prouver.
Pas très loin de là, à L’Épiphanie, ce sont des bardeaux aux teintes différentes qui donnaient un aspect bizarre à la maison.
«Un toit ne sert pas seulement à couvrir ses occupants des intempéries. Il confère à la propriété, souvent payée cher, une allure qui maintiendra sa valeur sur le marché», rappelle d’abord le juge.
«Gagner du temps»
Le fabricant «voulait gagner du temps, dénonce le juge. Sa conduite révèle un désintéressement et une non-reconnaissance des griefs soulevés par la demanderesse». Il condamne IKO à verser 5316 $ à son client.
Dans un autre jugement rendu le 9 septembre, le juge passe tout un savon au fabricant. Il lui reproche de ne citer que les décisions qui lui sont favorables comme jurisprudence, tout en omettant ses 21 causes perdues depuis 2010.
Il a finalement condamné IKO à verser 5000 $ à un résident de Mascouche. Ce jugement sera sa 22e défaite en quatre ans.