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Le Botox : une toxine, un antidépresseur !

woman face and beautician hands with syringes
photo fotolia


Surtout connu pour son action antirides, des recherches récentes suggèrent que le Botox pourrait aussi s’avérer un traitement efficace contre la dépression.

Les toxines produites par la bactérie Clostridium botulinum sont les poisons les plus puissants du monde vivant, 40 millions de fois plus actifs que le cyanure: cela peut sembler difficile à croire, mais à peine un microgramme (un millième de milligramme) peut causer la mort d’un humain, ce qui signifie qu’un seul kilogramme de ces toxines serait suffisant pour tuer l’ensemble de la population humaine de la planète.

Heureusement, l’empoisonnement aux toxines botuliques est très rare, étant essentiellement causé par la présence de la bactérie dans les conserves alimentaires mal stérilisées (le botulisme). Suite à l’ingestion d’un aliment contaminé, les toxines pénètrent à l’intérieur des neurones et bloquent la libération d’acétylcholine au niveau des jonctions entre les nerfs et les muscles. L’absence du neurotransmetteur empêche alors la contraction des muscles et entraîne donc la mort par paralysie respiratoire.

...Mais antirides !

Malgré ses effets extrêmement toxiques, certains ont eu l’idée au début des années 80 d’utiliser la toxine comme agent antirides, ce qui allait mener au développement du fameux Botox. Ils avaient en effet observé que l’injection locale de quantités infimes du poison entraînait la paralysie et le relâchement des muscles situés sous les rides, ce qui permet d’atténuer leur apparence durant un court laps de temps (en général de deux à trois mois). Cette innovation allait complètement révolutionner le monde de la chirurgie esthétique, avec au-delà de cinq millions d’interventions qui ont été réalisées aux États-Unis seulement depuis l’approbation du Botox et de ses dérivés comme agent antirides.

Effet antidépresseur

En plus d’atténuer les rides, certains chercheurs ont observé que l’injection du Botox au niveau de la région glabellaire (située entre les arcades sourcilières, au-dessus du nez) était associée à une amélioration notable de l’humeur des patients. Cette amélioration était particulièrement spectaculaire chez certaines personnes dépressives, un simple traitement au Botox étant associé à une disparition complète de la dépression.

Pour examiner plus en détail l’effet antidépresseur du Botox, une équipe de savants a recruté 30 personnes atteintes de dépression et leur ont injecté dans la région glabellaire une dose de Botox ou une solution saline ne contenant aucune toxine (1). L’étude a été réalisée en «à double insu», c’est-à-dire que ni les participants, ni les médecins ne savaient si la dose injectée contenait le Botox. Les patients ont été par la suite étroitement suivis pendant 24 semaines pour évaluer la sévérité des symptômes dépressifs à l’aide de méthodes diagnostiques bien établies. Les résultats obtenus sont tout à fait renversants : une seule injection de Botox a provoqué une réduction d’environ 50 % des symptômes dépressifs comparativement à seulement 2 % pour le placebo.

Selon les auteurs, cet effet positif serait dû au lien étroit qui existe entre nos muscles faciaux et notre humeur: les émotions s’expriment souvent par une tension au niveau des muscles du visage, mais cette tension envoie elle aussi des signaux au cerveau qui accentuent l’impact négatif de ces émotions. Pour une personne dépressive, le relâchement des muscles par le Botox permettrait donc d’interrompre ce cercle vicieux et d’atténuer l’effet des émotions négatives sur le moral.

L’utilisation d’un poison aussi puissant que la toxine botulique pour traiter des désordres graves comme la dépression est un autre exemple de l’incroyable génie humain, capable d’utiliser toutes les ressources de notre environnement, même lorsqu’elles sont toxiques, pour découvrir des remèdes aux maux qui nous affligent.


(1) Magid M et coll. Treatment of major depressive disorder using botulinum toxin A: a 24-week randomized, double-blind, placebo-controlled study. J. Clin. Psychiatry 2014; 75: 837-44.

 







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