La méthode Marc Bibeau
L’ancien grand argentier du Parti libéral a amené le monde des affaires dans son sillage
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C’est à la suite de l’arrivée de Marc Bibeau que la «dynamique» du Parti libéral a véritablement changé au début des années 2000. Le financement passait désormais par les firmes de génie et de construction.
Plusieurs passages du rapport de la commission Charbonneau s’attardent à l’ascension de M. Bibeau au sein du PLQ et aux changements que sa venue a provoqués.
Près de plusieurs firmes
Celui qui n’a jamais témoigné publiquement aux audiences de la Commission est décrit par plusieurs comme le «grand argentier» de la formation libérale, selon ce qu’on peut lire dans le rapport.
C’est M. Bibeau qui aurait favorisé une rencontre entre M. Charest et l’entrepreneur Tony Accurso à l’occasion d’un souper intime, peu avant les élections de 2003.
Il organisait aussi des fêtes à sa résidence pour «remercier» les gens d’affaires qui avaient contribué au parti.
Longtemps bénévole, Marc Bibeau aurait aussi occupé la présidence de la commission des finances du parti en vue des élections de 2003.
Gourou des finances
Sous son règne, les méthodes de financement du Parti libéral changent et deviennent plus ambitieuses, selon les témoignages.
En 2003, un nouvel objectif financier de 100 000 $ est fixé aux ministres libéraux.
Sous Bibeau, les stratégies de financement «sectoriel» du PLQ permettent «d’amasser des contributions annuelles d’une ampleur sans précédent», peut-on lire dans le rapport de la Commission.
Selon l’ancienne directrice des finances du parti, Marc Bibeau devient même le «collecteur le plus performant du PLQ entre 2000 et 2012 grâce au réseau de dirigeants d’entreprises sur lesquels il pouvait compter».
Malgré tout, Marc Bibeau ne fait l’objet d’aucun blâme direct dans le rapport.
Dans les hautes sphères
Les liens entre l’actionnaire de l’entreprise Schokbeton et Jean Charest se resserrent également.
«Le 30 novembre 2004, à l’occasion de la venue de George W. Bush à Montréal, on voit Marc Bibeau assis à la table d’honneur aux côtés de Jean Charest, dont il est devenu un proche.»
Les deux hommes assistent aussi ensemble aux courses du Grand Prix dans la loge VIP du président de Loto-Québec, lit-on aussi dans le rapport.
Le financement politique provincial
Le rapport soulève que les pratiques de prête-noms étaient «publiquement connues depuis le début des années 2000 et que les partis politiques s’en sont accommodés en toute connaissance de cause durant au moins une décennie». On peut lire également que lorsqu’ils sollicitaient des firmes, «les partis faisaient miroiter la possibilité d’un accès direct aux titulaires de ministères donneurs de contrats ou à leurs attachés politiques. Les contributeurs profitaient en effet de ces occasions pour faire du développement des affaires».
Une méthode bien rodée
Voici comment les partis procédaient, selon le rapport.
- Les partis approchaient les dirigeants de firmes de génie et d’entreprises de construction pour obtenir des contributions.
- Les chèques remis par les dirigeants d’entreprise étaient signés par des individus, mais ceux-ci étaient remboursés par les entreprises, grâce à des bonis annuels ou des allocations de dépense.
- Les partis manifestaient des attentes précises quant aux montants qu’ils souhaitaient recevoir.
- Des entrepreneurs ont relaté qu’ils s’étaient sentis obligés d’acheter des billets pour des activités de financement pour maintenir de «bonnes relations».
Julie Boulet et Nathalie Normandeau écorchées
Si l’ancien premier ministre Jean Charest n’a pas fait l’objet de blâmes, il en est tout autrement pour deux de ses anciennes ministres. Les commissaires ont écrit qu’il était peu crédible que l’ex-ministre des Transports Julie Boulet n’ait pas été au courant de ses objectifs de financement. Quant à Mme Normandeau, le rapport affirme que l’ex-ministre des Affaires municipales aurait eu recours à une «forme de sollicitation» qui était «problématique sur le plan éthique». Cette dernière s’en est défendue mardi.
Commissaires en désaccord
Les commissaires sont en désaccord sur le lien entre le financement des partis politiques et l’octroi de contrats publics. Pour France Charbonneau, les témoignages entendus pendant la commission permettent de conclure à un «lien indirect» entre les contributions politiques et l’octroi de contrats, une thèse rejetée par le commissaire Renaud Lachance. Il s’est d’ailleurs dissocié de tout le chapitre sur le sujet.
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