L'hiver en 1914
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Transports d’hiver
Voici une scène hivernale prise sur le vif par Edgar Gariépy il y a plus de 100 ans. Sur le côté de la rue, la silhouette d’un cheval se dessine, il est attelé à un traîneau. Son maître s’est sans doute rangé pour laisser passer le tramway qui descend tranquillement la rue Saint-Denis. Initialement à traction hippomobile depuis 1861, le tramway est devenu électrique le 21 septembre 1892 avec l’acquisition du célèbre «Rocket», le trolley nº 350. Cela a eu un impact considérable sur la circulation urbaine durant la saison froide. Pour dégager la voie après une grosse tempête, la Montreal Tramways Company s’est procuré des «charrues»... sur rail, comme les tramways chasse-neige nos 8 et 40. Avant cela, la neige était entassée et tapée à même la rue! Les passagers du tramway hippomobile aux pieds frigorifiés espéraient de tout cœur que les chevaux tirant la voiture ne restent pas «pris» en montant la Côte-à-Baron (côte Sherbrooke) bien enneigée!
L’église Saint-Jacques
Par cette journée d’hiver ensoleillée, le clocher de l’église Saint-Jacques pointe à l’horizon. La construction de ce lieu de culte a commencé en 1823 sous la direction de l’évêque Jean-Jacques Lartigue. Finalisée en 1828, cette première église à l’est du faubourg Saint-Laurent attira les Canadiens français. Un nouvel épicentre francophone était né! L’église devenue cathédrale en 1836 flamba lors du grand incendie des faubourgs de 1852. Comme un malheur ne vient jamais seul, l’église fraîchement édifiée par l’architecte John Ostell brûla de nouveau en 1858! Par chance, le clocher et la façade, épargnés par le feu, purent être intégrés à la troisième église. Fait cocasse, en 1975, le curé signala la disparition inexpliquée du coq doré veillant à la cime du clocher depuis 1905. L’artiste Charles Huot en a conçu une copie qui est toujours en place. Symbole emblématique du Quartier latin depuis 150 ans, le clocher et le transept sud de l’église font maintenant partie du pavillon Judith-Jasmin de l’UQAM. Lors de votre prochaine soirée sur Saint-Denis, remarquez le clocher souvent illuminé par de splendides projections comme celles de Montréal en Lumière.
Des maisons bourgeoises
Ces belles demeures d’inspiration victorienne témoignent de la longue histoire de la rue Saint-Denis. Pour rejoindre les petits villages du Plateau, la ville de Montréal aménagea cette rue en 1818. Elle fut nommée en souvenir de l’homme d’affaires Denis Viger (1741-1805), propriétaire de terres à l’est de la rue. Près de l’église Saint-Jacques apparurent des maisons bourgeoises canadiennes-françaises. L’hiver, les enfants glissaient en toboggan à la Côte-à-Baron. En haut de celle-ci, on aménagea un réservoir d’eau, le futur carré Saint-Louis. Sur les cendres de l’incendie de 1852, le quartier se reconstruisit plus solidement que jamais. Désormais en pierres maçonnées, les maisons en rangée furent dotées de murs mitoyens coupe-feu. De ce fait, ces demeures datent de la fin du 19e siècle. Transformées en maisons de chambres dans les années 1950, elles attestent du lent déclin du quartier déclenché par le départ de la bourgeoisie vers Outremont et de l’Université de Montréal vers son actuel campus. L’ouverture de l’UQAM en 1969 lui a redonné un second souffle. Les anciennes maisons ont désormais une devanture commerçante pour servir la clientèle estudiantine.