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Le propriétaire de Reliance veut faire annuler son achat du site

GEN-DANGER RELIANCE
Le site Reliance, contaminé aux BPC, photographié en 2013 après une fuite qui avait provoqué l’intervention des équipes d’urgence environnementale. Photo Agence QMI, Maxime Landry


Le propriétaire du site pollué Reliance affirme que c’est en lisant Le Journal qu’il a appris que Québec détenait un rapport sur la contamination de son terrain.

Confronté à une éventuelle facture de décontamination de plusieurs millions de dollars, ce propriétaire, Juste Investir, souhaite maintenant faire annuler l’achat du site que lui avait vendu la Ville de Pointe-Claire saisi pour taxes impayées, en 2015.

La contamination du site avait pourtant fait l’objet d’une intense couverture médiatique depuis 2013 et était inscrite au Répertoire des terrains contaminés du Québec.

Qu’à cela ne tienne. Juste Investir tente aussi de faire annuler l’ordonnance de décontamination que lui a fait parvenir le ministre de l’Environnement en février.

Dans un document déposé au Tribunal administratif du Québec, l’entreprise cite des articles qu’a publiés Le Journal à propos du site Reliance en octobre.

«On apprenait desdits articles que le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques “gardait secret un rapport sur la pollution” (du terrain), et ce, depuis juin 2015.»

Notre Bureau d’enquête avait obtenu ce rapport classé «confidentiel» le 28 octobre après de longs délais, à la suite d’une demande d’accès à l’information. Le même jour, le ministre de l’Environnement envoyait un avis à Juste Investir pour lui annoncer son intention de lui ordonner de décontaminer son nouveau terrain.

«Il est clair que (le ministère) a expédié cet avis [...] parce qu’il savait que Le Journal de Montréal allait publier ces articles», affirme le patron de Juste Investir, Justin Klumak.

GEN-DANGER RELIANCE
Justin Klumak, propriétaire du site Reliance sur le papier, pose ici devant le logo de son employeur, Olymbec. Photo Facebook

Selon lui, le ministère aurait dû faire inscrire un avis de contamination pour ce terrain au registre foncier, ce qu’il n’a pas fait.

«Argument très faible»

Les spécialistes ne sont pas de cet avis. «L’argument est très faible. Il y a des feux rouges qui auraient dû s’allumer! estime Michel Bélanger, avocat en droit de l’environnement. Quand tu as un doute, tu t’équipes pour faire l’expertise nécessaire.»

Associée au cabinet BCF, Odette Nadon est du même avis. «On ne peut pas se fier au registre foncier, dit-elle. Tu fais une vérification diligente quand tu achètes pour taxes impayées!»

 


« Il est d’usage de mettre les sites en vente afin de récupérer les créances. Dans le cas du site de l’entreprise Les Équipements de puissance Reliance Ltée, c’est ce que nous avons fait en bons gestionnaires, tout en étant convaincus qu’il ne serait pas acheté puisque, depuis deux ans, il faisait les manchettes pour l’entreposage illégal de BPC et la contamination des sols. »

– Marie-Pier Paquette-Séguin, porte-parole, Ville de Pointe-Claire

 

Une coquille d’un géant de l’immobilier financée par la Caisse

Propriétaire du site Reliance depuis juin 2015, Juste Investir n’est en fait qu’une compagnie coquille d’Olymbec. Cette entreprise est le plus grand propriétaire d’immeubles industriels de la province, financé par la Caisse de dépôt et placement du Québec pour 88 M$.

En utilisant Juste Investir, Olymbec se protège du risque que représente le site, lourdement contaminé aux BPC. Mais un de ses cadres risque gros dans l’aventure.

Le seul actionnaire inscrit de Juste Investir est Justin Klumak, employé d’Olymbec. C’est aussi un avocat interne de ce géant de l’immobilier qui a rédigé les poursuites de Juste Investir contre la Ville de Pointe-Claire et le ministère de l’Environnement.

Remonter la chaîne

Si le gouvernement décide un jour d’imposer des amendes à Juste Investir parce qu’elle refuse de déconta­miner son site, il pourrait se tourner contre M. Klumak, enregistré comme patron de la coquille dans les documents publics.

La Loi sur la qualité de l’environnement prévoit en effet que le dirigeant d’une entreprise qui commet une infraction «est présumé avoir commis lui-même cette infraction».

«Ils vont peut-être tenter de remonter la chaîne de responsabilités», confirme Odette Nadon, associée chez BCF, spécialisée en droit de l’environnement.

Notre Bureau d’enquête a voulu savoir si M. Klumak avait pris des précautions pour se protéger, mais il n’a pas rappelé. Olymbec, son avocat et celui de Juste Investir ont refusé de répondre à nos questions.







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