Du bonheur en conserve

C’est l’automne, l’air se rafraîchit, les arbres rougissent. Dans la cuisine de Camilla Wynne, boulevard Saint-Laurent à Montréal, on est bien au chaud et ça sent bon les confitures qui mijotent. J’essaie de deviner: cannelle? Clous de girofles? Camilla sourit: «C’est ma marmelade de Noël», dit-elle, un savoureux mélange de clémentines, jus de citron, rhum agricole et épices de Noël.

Des mélanges originaux comme celui-là, elle en invente chaque année depuis cinq ans pour les ajouter à sa collection de confitures, gelées, marmelades, marinades et chutneys, fabriqués pour la plupart à partir des produits de notre terroir puis vendus sous l’étiquette Preservation Society.

«Le bonheur, c’est quand ton garde-manger est plein de ce que tu as fait toi-même», soutient la jeune femme de 35 ans qui a grandi en Alberta avant de venir étudier au Québec, il y a 17 ans. Elle a bien tenté de se trouver une autre définition de la félicité en apprenant le grec ancien et le latin sur les bancs de l’Université McGill, «mais je passais mon temps à rêver de gâteaux», dit-elle. Un an plus tard, elle s’inscrivait au programme de pâtisserie de l’ITHQ.

«J’ai toujours aimé faire de la pâtisserie avec mes grand-mères», dit Camilla. Elle a longtemps cru, comme tous ses collègues de classe, qu’elle finirait par faire carrière en restauration. Elle a fait son stage avec Patrice Demers au défunt restaurant Les chèvres avant d’y être embauchée.

«J’adorais cela, dit-elle, mais j’aimais aussi faire de la musique.» À l’époque, Camilla jouait du clavier pour la formation musicale Sunset Rubdown. Le groupe a enregistré un album et partait en tournée. Elle a dû faire un choix. La musique et la magie de la scène l’ont emporté sur le sucre et la farine. Le groupe a roulé pendant cinq ans jusqu’à ce que tout s’arrête après un dernier spectacle à Tokyo.

400 pots par semaine

À 29 ans, Camilla s’est retrouvée devant un grand vide qu’elle a apprivoisé en allant prendre un peu de recul à Vancouver. Démarrer une entreprise de fabrication de conserves lui trottait dans la tête depuis l’âge de 20 ans. Sa coloc, qui avait une maison de campagne, lui avait enseigné l’art de conserver les aliments en pots. «J’aimais le feeling de cuisiner en gang, dit-elle, et surtout de savoir que tout ce qu’on faisait pouvait être conservé longtemps.»

Avant de partir pour Vancouver, elle avait commencé à vendre ses conserves maison dans une foire artisanale. L’intérêt était là, elle le sentait. À son retour, elle a plongé les yeux fermés. «Je suis une mauvaise vendeuse, je n’ai même pas fait de plan d’affaires. J’ai décidé d’agir et d’apprendre sur le tas. Ça m’a bien servie, constate-t-elle. Les bonnes personnes ont toujours été là sur mon chemin pour m’aider.»

Depuis, sa petite compagnie roule bien (400 pots par semaine en moyenne). Même si les nouvelles entreprises québécoises de fabrication de conserves artisanales se multiplient autour d’elle depuis 5 ans, elle mise sur l’originalité de ses produits pour se démarquer. Compétitionner avec des géants comme Bonne maman n’est pas son but. Elle aime beaucoup trop couper ses fruits à la main. Ce qui la comble par-dessus tout, c’est de partager sa passion en organisant des ateliers où elle apprend aux participants tous les secrets de fabrication des conserves maison pour qu’ils puissent à leur tour goûter au plaisir de remplir leurs étagères de petits pots faits main.

Produits vedettes

• Photo courtoisie, Etienne Marquis

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Preservation Society