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Tuerie à la mosquée: 6 morts, 17 orphelins

L’une des victimes, Karim Hassane, laisse dans le deuil sa conjointe et leurs trois filles

Tuerie à la mosquée: 6 morts, 17 orphelins
Photo Stevens LeBlanc

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** Vous êtes invités à témoigner votre sympathie à la suite de cet attentat en écrivant à l'adresse opinions@quebecormedia.comNous publierons certains de ces messages en ligne par la suite.

«C’est injuste! On n’a pas le droit de prendre un papa et un mari comme ça. Comment je vais annoncer à mes filles qu’elles ne verront plus jamais leur papa?»

Louiza Mohamed Said cherchait ses mots, hier, au lendemain de la fusillade survenue au Centre culturel islamique de Québec.

La tuerie a fait six morts et plusieurs blessés parmi la soixantaine de fidèles qui se trouvaient à l’intérieur du lieu de culte. Dix-sept enfants se retrouvent orphelins.

Karim Hassane fait partie des victimes de l’attentat, survenu après la prière du soir. Il a reçu une balle dans le dos, qui lui a transpercé le poumon droit.

Il était le père de trois fillettes: Yamina, 9 ans, Sarah, 8 ans, et Sofia, 15 mois.

Karim Hassane était analyste informatique au Centre de services partagés du Québec.

«On ne mérite pas ça. Mon mari, c’est quelqu’un qui ne fait pas de mal à personne. Il est très respectueux», a confié Mme Mohamed Said, avec un trémolo dans la voix.

Parti du PEPS

Dimanche, l’homme de 41 ans est allé courir au Pavillon de l’éducation physique et des sports (PEPS) de l’Université Laval, comme il le fait régulièrement. Ensuite, il s’est rendu à la mosquée pour prier. Il y allait tous les vendredis et parfois le dimanche.

«Mon mari tardait à revenir du PEPS, alors j’ai appelé la sécurité pour savoir s’il était là. Je n’avais pas vu les infos», raconte Mme Mohamed Said, qui ne se doutait pas à ce moment-là qu’elle ne reverrait jamais l’homme qu’elle a épousé en 2006, en Algérie.

C’est une amie québécoise, qu’elle connaît depuis son arrivée au Canada en 2010, qui lui a mis la puce à l’oreille. «Elle m’a appelée et elle m’a dit: «Regarde ce qui se passe à la mosquée. Est-ce que ton mari est correct?» J’ai allumé la télé et j’ai fait le lien», détaille la mère de 41 ans.

Un ami de son époux est ensuite venu la chercher pour l’amener à l’hôpital, où les médecins lui ont confirmé ce qu’elle redoutait.

« Papa-poule »

Karim Hassane et sa femme Louiza Mohamed Said ont immigré au Canada pour offrir une meilleure éducation à leurs filles. «C’était leur rêve d’habiter au Canada. Ils aimaient le mode de vie et les valeurs des Canadiens», explique la sœur de Louiza, Samira Mohamed Said, jointe en Algérie.

Elle décrit son beau-frère comme un «papa-poule», qui faisait tout pour combler ses trois fillettes. Toute la famille a obtenu sa citoyenneté canadienne entre août 2014 et avril 2015. La petite Sofia, elle, est née ici en octobre 2015.

«Au début, beaucoup de gens nous ont aidés quand on est arrivés ici. Après, mon mari a dit: “c’est à notre tour”. On a donné de l’argent et des vêtements à des fondations pour aider les gens dans le besoin», se souvient Louiza Mohamed Said.

«Le Canada a perdu quelqu’un de bien. C’était un exemple», conclut-elle.

 

LE PORTRAIT DES VICTIMES

NOM : Karim Hassane

ORIGINE : Originaire d’Algérie, il vivait au Canada depuis 2010

ÂGE : 41 ans

FAMILLE : Marié et père de trois fillettes de 9 ans, 8 ans et 15 mois

TRAVAIL : Analyste informatique au gouvernement du Québec

  • Sa famille le décrit comme un «papa-poule», qui faisait tout pour plaire à ses filles
  • Il était aussi un homme très pieux, mais respectueux de tous.

 


NOM : Azzedine Soufiane

Tuerie à la mosquée: 6 morts, 17 orphelins
Photo courtoisie

ORIGINE : Maroc

ÂGE : 57 ans

FAMILLE : Père de trois enfants, âgés de 15 ans, 13 ans et 6 ans

TRAVAIL : Propriétaire de l’épicerie-boucherie Assalam (La Paix) à Sainte-Foy

  • Détenteur d’une maîtrise en géologie à l’Université Laval
  • Homme très pieux. Décrit comme extrêmement souriant par ses amis

Très pieux, Azzedine Soufiane, 57 ans, était un épicier aimé et respecté au sein de la communauté musulmane de Québec.

Son meilleur ami, Rachid Ben Amor, a décrit le défunt comme un homme au sourire permanent et contagieux. M. Soufiane était également admiré de son ami pour son honnêteté. Il pesait par exemple les épices qu’il vendait au gramme en s’assurant de soustraire systématiquement le poids du contenant. «Je lui demandais si ça changeait quelque chose qu’il y ait 5 grammes de plus, se remémore M. Ben Amor. Il me répondait que je ne prendrais pas sa place pour répondre de ça devant le Bon Dieu.»

Rachid Ben Amor s’est également souvenu d’un père fort soucieux du bien-être et de l’éducation de ses trois enfants. Accompagné de son épouse et de ses enfants, Azzedine Soufiane venait tout juste d’effectuer la Oumra (le petit pèlerinage) à La Mecque.

 


NOM : Aboubaker Thabti

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Photo courtoisie

ORIGINE : Tunisie

ÂGE : 44 ans

FAMILLE : Marié et a deux enfants

TRAVAIL : Travaille dans le milieu pharmaceutique

  • Arrivé à Québec il y a moins de 10 ans
  • Décrit comme un père de famille aimant et excessivement fier de ses deux enfants, âgés de 11 et 3 ans

Aboubaker Thabti, âgé de 44 ans, laisse son garçon de 11 ans et sa fillette de 3 ans orphelins. Selon des proches, le père de famille d’origine tunisienne travaillait dans le milieu pharmaceutique à Québec. Il était arrivé au Canada il y a moins de dix ans pour offrir une vie meilleure à sa famille, dont il était excessivement fier, a précisé l’un de ses amis qui a préféré demeurer anonyme.

L’épouse de la victime essayait d’avoir des détails depuis l’attentat terroriste.

Bien qu’elle se doutait que son mari faisait partie des victimes, la veuve d’Aboubaker Thabti a dû attendre jusqu’en après-midi avant d’avoir enfin une confirmation.

Elle est inconsolable depuis qu’elle a appris la nouvelle, ont soutenu des amis de la famille hier.

Lamia Siala, consule de Tunisie au Canada, a accompagné la femme au quartier général de la Sûreté du Québec.

«Ils ont fini par lui annoncer son décès avec beaucoup de tact et de professionnalisme. Nous nous sommes jetées l’une dans les bras de l’autre en pleurs», a raconté la diplomate encore ébranlée par cette terrible scène.

 


NOM : Mamadou Tanou Barry

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Photo courtoisie

ORIGINE : Guinée

ÂGE : 42 ans

FAMILLE : Père de 3 enfants

TRAVAIL : Comptable chez Lucas Meyer Cosmetic à Place de la Cité

 

NOM : Ibrahima Barry

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Photo courtoisie

ORIGINE : Guinée

ÂGE : 39 ans

FAMILLE : Père de 4 enfants

TRAVAIL : Employé de Revenu Québec

Deux victimes d’origine guinéenne, Mamadou Tanou Barry, 42 ans et Ibrahima Barry, 39 ans demeuraient dans le même immeuble à logements de la rue de la Pérade à Sainte-Foy. Toute la journée hier, des dizaines de proches et membres de la communauté guinéenne de Québec sont venus offrir leurs sympathies aux familles éplorées.

Ceux-ci étaient sans mot, alors que les deux pères de famille laissent dans deuil leur femme, ainsi que sept enfants. «C’est très difficile. C’étaient des gens courtois, simples et ouverts d’esprit. Ils allaient travailler, s’occupaient de leur famille et allaient prier», affirme Souleymane Bah, président de l’Association guinéenne de Québec, encore sous le choc.

Selon les proches rencontrés par Le Journal, les victimes fréquentaient régulièrement la mosquée de Québec. «Nous étions tous ensemble la veille [samedi soir], puisqu’un de nos compatriotes a perdu son père en Guinée. On a donc convoqué les gens de la communauté pour se rencontrer et aller prier », a-t-il raconté.

M. Bah indique par ailleurs que la mère de Mamadou Tanou Barry était arrivée de Guinée à Québec samedi soir, pour visiter son fils et sa famille.

 


NOM : Khaled Belkacemi

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Photo courtoisie

ORIGINE : Algérie

ÂGE : 60 ans

FAMILLE : Père de deux enfants adultes

TRAVAIL : Professeur titulaire et chercheur à la Faculté de des sciences de l’agriculture et de l’alimentation à l’Université Laval

  • Il était détenteur de deux doctorats en génie chimique, donc un obtenu en Algérie en 1995 et un autre obtenu à l’Université de Sherbrooke en 1990.
  • Il faisait partie du Centre en chimie verte et catalyse et de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF)

Khaled Belkacemi, 60 ans, était professeur titulaire à la Faculté de sciences de l’agriculture et de l’alimentation (FSAA). Son fils Amir lui a rendu hommage sur Facebook. «Mon père, un homme droit et bon, un exemple de résilience, un homme aimé de tous, un professeur et un chercheur émérite, un battant, qui a quitté son pays pour donner une chance à sa famille de vivre loin de l'horreur. Le destin nous a rattrapés», a-t-il écrit.

«C’est une lourde perte», a commenté Hani Antoun, professeur retraité, associé à la faculté et qui connaissait la victime. «C’était un homme très compétent et bien connu dans son domaine», poursuit M. Antou.

L’épouse de la victime, Safia Hamoudi, est également professeure titulaire et chercheuse dans la même faculté.

Jean-Claude Dufour, le doyen de la FSAA, a également bien connu M. Belkacemi. «C’était une personne extraordinaire, il était toujours souriant, vraiment performant. C’était un prof exemplaire, qui adorait ses étudiants gradués et qui enseignait très bien.»

Il faisait partie du Centre en chimie verte et catalyse et de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF) et avait cinq projets en cours de recherche.