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Denise Bombardier sous les draps

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Habituellement, quand sort un livre, un film ou une série télé sur une bande de copines à la sexualité débridée, l’auteure a 20 ou 30 ans et ses personnages ont le même âge. De Sex and the City à Bridget Jones, en passant par Les Simone, c’est comme si la sexualité des femmes s’arrêtait à 40 ans et que leur envie de s’envoyer en l’air avait une date de péremption, comme un yogourt abandonné dans le fond du frigo.

C’est pour cette raison qu’il faut saluer la parution du livre de ma collègue (et amie) Denise Bombardier. Dans Plus folles que ça, tu meurs, elle met en scène des «sex»agénaires qui aiment le sexe.

JOUIR SANS ENTRAVE

Dans un monde où on n’en a que pour les petites jeunesses, ça fait drôlement du bien d’entendre des femmes de 55 ou 60 ans parler de «baise», d’orgasme, de jouissance et évoquer franchement les prouesses sexuelles qui leur plaisent ou les font déchanter.

Dieu que ça fait du bien de découvrir, sous la plume sans pudeur de Madame B., des femmes d’expérience qui aiment le sexe et en parlent de façon tout à fait décomplexée.

Ma copine Denise, dans la vie de tous les jours, aime les plaisirs de la vie. Tous les plaisirs de la vie. Et dans ce livre coquin, on sent qu’elle a envie de régler ses comptes avec une génération qui pense qu’elle a le monopole de la jouissance sans lendemain. On n’a pas besoin d’être sur Tinder pour aimer passer une nuit sans conséquence avec un bel inconnu, quoi.

«La pénétration m’intéresse encore, mais n’est plus une obsession», dit l’une. «Si on a le choix entre un sextoy et un pénis, se décider n’est pas toujours simple», affirme une autre. Quant à la troisième, elle déclare avec humour: «À 55 ans, on obtient des cartes de réduction. Je trouve qu’on devrait aussi nous accorder des sauf-conduits face à certaines exigences masculines, déplaisantes pour nous, mais excitantes pour eux.»

Disons que ça défrise, si vous ne vous attendiez pas à lire des mots comme «pomper», «suçage» et «semence» sous la plume, si élégante, de ma collègue chroniqueuse, officier de la Légion d’honneur!

BAISSE UN PEU LA LUMIÈRE

Mais ce qui est le plus touchant, sous la plume de Denise, c’est qu’elle décrit avec beaucoup de justesse et de bienveillance le rapport ambigu que les femmes vieillissantes entretiennent avec leur corps. Elle parle sans détour des «fleurs de cimetière», ces taches de soleil qui apparaissent sur les mains avec le temps. Son personnage principal, Agnès, qui va avoir 60 ans, tamise les lumières pour sa première rencontre avec son futur amoureux. Mais elle ne se fait pas d’illusion sur son petit ventre et son visage, où la vie a inscrit son passage.

Les femmes que décrit Denise Bombardier sont des mères imparfaites, pas toujours capables de communiquer avec leurs enfants qui semblent leur échapper. Elles sont un peu cinglées, un peu bancales, bourrées de contradictions, mais terriblement attachantes.

Merci, Denise, d’avoir donné la parole à ces femmes dont le corps vieillit, mais dont la tête et le cœur ne prennent pas une ride.

 
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