Que de chemin parcouru pour Marie-Philip Poulin
La capitaine canadienne fait maintenant figure de vétérane dans l’équipe
Quand Marie-Philip Poulin foulera la glace du Centre Vidéotron dans le maillot de l’équipe canadienne, dimanche, ses souvenirs se bousculeront à vive allure dans sa tête. Cette rencontre préparatoire face aux Américaines prendra des allures de grandes retrouvailles pour la hockeyeuse de Beauceville.
Débarquées jeudi soir dans la capitale Poulin et ses coéquipières de la formation canadienne disputeront à Québec le premier d’une série de six matchs hors-concours contre leurs rivales éternelles, en prévision des Jeux de Pyeongchang. Les émotions ont déjà envahi la Beauceronne, pour qui il s’agira d’une première prestation devant les siens dans un contexte pareil.
« D’habitude, je suis toujours seule quand je débarque à l’aéroport [de Québec]. Là, on était toute l’équipe ensemble. J’ai fait un pas de recul et je me suis dit “wow !”, c’est toute l’équipe canadienne qui est ici, à Québec, où j’ai joué mon hockey mineur et où c’est proche de la Beauce. Quand je vais arriver au Centre Vidéotron, demain, je vais prendre une grande respiration et c’est là que je vais réaliser qu’il y a beaucoup de chemin qui s’est fait. Mais ça ne s’est pas fait tout seul », a raconté la capitaine canadienne en entrevue au Journal.
« Ça va très vite ! »
À 26 ans seulement, Poulin revendique un palmarès bien garni qui comprend la conquête de ses deux médailles d’or olympiques (2010 et 2014) en tête de liste de ses exploits.
De ses débuts dans le programme national à ses nombreux honneurs individuels avec les Terriers de l’Université de Boston, en passant par ses championnats dans la Ligue canadienne féminine, la Québécoise a laissé une profonde marque dans son sport. Elle avoue qu’elle abordera les prochains Jeux avec un regard différent.
« J’ai un rôle différent à chaque olympique, mais c’est très excitant de pouvoir penser que j’ai déjà deux Olympiques sous ma ceinture. Ça va très vite ! J’en profite à chaque moment. Pour moi, chaque journée est très spéciale. Je suis chanceuse en tant qu’athlète de pouvoir m’entraîner chaque jour et de jouer au hockey. C’est parfois quelque chose qu’on prend pour acquis, mais c’est un rêve pour moi », a-t-elle affirmé.
« Quand tu vieillis, ça va encore plus vite, et je veux juste prendre un pas de recul et profiter de chaque moment. Ça va vite quand tu t’amuses et tu as l’impression que ta carrière se déroule en un claquement de doigts », a observé l’attaquante étoile, consciente de son nouveau rôle de vétérane auprès des recrues de l’unifolié n’ayant jamais vécu la frénésie d’une année olympique.
Une rivalité intense
L’affrontement de dimanche entre les deux meilleures équipes au monde devrait être un prélude à la finale du tournoi en Corée du Sud, en février. Les Canadiennes ont remporté les quatre précédents titres sous les anneaux, mais depuis leur victoire à Sotchi, elles ont dû se contenter trois fois de l’argent aux championnats du monde devant les États-Unis. Une fois de plus, Poulin s’attend à une guerre de tranchées au cours des prochaines semaines.
« La rivalité est très grande. Oui, le respect est là en tant qu’équipes de hockey, mais on a les mêmes buts. Chaque fois qu’on embarque sur la glace contre elles, on n’est pas amies. On est comme à la guerre. On sait que ce sera une bataille et c’est ce qui fait que c’est encore plus spécial contre elles. »
Un petit salaire plus que bienvenu
La décision de la Ligue canadienne de hockey féminin (CWHL) de rémunérer ses joueuses cette saison a été chaudement accueillie par Marie-Philip Poulin. Même si ces salaires demeurent à des années-lumière de ceux versés aux hockeyeurs professionnels, la joueuse étoile espère d’ici la fin de sa carrière qu’elle pourra vivre uniquement de son sport.
Les salaires oscillent entre 2000 $ et 10 000 $, avec un plafond fixé à 100 000 $ pour chacune des sept formations du circuit. La CWHL a élargi ses cadres en ajoutant deux équipes en Chine, ce qui a contribué à la naissance d’une échelle salariale. Marie-Philip Poulin profite aussi de l'appui financier de Tide pour atteindre ses objectifs olympiques.
Un semblant de parité
« C’est un pas dans la bonne direction. On veut toujours élever la barre au hockey féminin et que ça grandisse. Cependant, il y a encore beaucoup de chemin à faire. C’est un bon début d’avoir un petit salaire. Les filles doivent encore travailler, mais ce montant peut aider pour les déplacements et pour l’entraînement. On en est très reconnaissantes, mais il y a encore du travail à faire », a mentionné Poulin, qui a remporté les grands honneurs l’an passé avec les Canadiennes de Montréal.
Poulin caresse de grandes ambitions pour la suite du hockey féminin, souhaitant qu’un semblant de parité au niveau salarial soit établi. Si les millions de dollars de la LNH semblent irréalistes, les montants empochés par les joueurs des ligues mineures pourraient être une avenue plus probable dans l’avenir.
« Un jour, si on peut être comme les gars, si on pouvait vivre de ça, si on pouvait s’entraîner tous les jours, ce serait un autre rêve pour nous de pouvoir faire ce que les pionnières ont fait avant nous en créant le hockey féminin, d’en vivre », a-t-elle relaté.
Poulin, qui est l’une des quatre Québécoises de l’équipe nationale, ratera la majeure partie de la saison de la CWHL en raison de la centralisation à Calgary des meilleures joueuses au pays d’ici les Jeux.