Le vertige de la création
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En guise de troisième album, l’auteure et artiste visuel Catherine Ocelot propose La vie d’artiste, un album savoureusement inclassable qui s’intéresse aux affres de la création dans lequel elle déploie tout son talent.
Créer est un sport extrême à bien des égards. Le corps, l’esprit et l’âme sont rudement mis à l’épreuve. Si l’acte donne des ailes, la chute peut s’avérer brutale. Rien d’étonnant que les sept créateurs interviewés dans l’album empruntent des traits mi-anthropomorphiques, constitués de jambes humaines et de poitrails d’oiseaux. Confinés entre ciel et terre, ces êtres – dont les cinéastes Micheline Lanctôt, Raphaël Ouellet et l’autrice de bande dessinée Julie Delporte – se livrent avec une étonnante franchise à l’alter ego d’Ocelot.
La forme unique de ce nouvel opus, amalgamant finement l’autofiction, l’entretien et le tragicomique de situation digne des meilleurs albums du tandem français Ruppert et Mulot a-t-il offert une part de vertige à son auteur ? « Lier mes envies d’entrevues, de récit oscillant entre réalité et fiction et aborder la vie d’artiste dans un seul récit n’était pas évident. J’ai eu peur d’être incapable de rendre le tout fluide de par sa forme atypique. », affirme l’artiste. « Ce fut long à faire, complexe à construire, à assembler. » Bien qu’inusité par sa forme, l’album se dévore d’un seul trait grâce à l’intelligence, la sensibilité et la drôlerie dont il fait preuve.
L’art du dialogue
Déjà, dans Talk-Show, son précédent album publié chez Mécanique Générale en 2013, mettant en scène un animateur ours recevant des invités de marque en entrevue, l’artiste faisait preuve d’un sens aigu du dialogue. Pour Vie d’artiste, elle se hisse parmi les meilleurs dialoguistes du médium aux côtés de Fanny Britt, Samuel Cantin, Alexandre Fontaire Rousseau, Michel Falardeau et Michel Rabagliati.
« Je m’intéresse aux autres, c’est ce qui explique mon amour du dialogue, avoue l’auteure à l’autre bout du fil. J’avais envie d’aller à la rencontre de créateurs issus de différents milieux pour ensuite mettre en scène l’impact qu’ont eu ces entretiens sur moi. J’ai fait le livre que j’aurais aimé lire à 20 ans, alors que je ne connaissais rien du monde des arts. »
Autofiction
L’univers de la bande dessinée lui était également inconnu. C’est lors d’un contrat de pige à feu Bande à Part, sur les ondes de Radio-Canada, qu’elle fit la rencontre de l’auteur Jimmy Beaulieu, alors chroniqueur BD à l’écrit pour la plateforme web. « J’ignorais tout de ce renouveau que vivait le médium, qu’une bande dessinée adulte au format moins classique existait. Ça m’a à ce point emballée que je lui ai proposé un premier album en 2006, alors qu’il dirigeait Mécanique Générale à l’époque. »
Son intérêt pour l’autofiction lui est venu plus tard, tant du 7e art avec Un château en Italie de Valeria Bruni Tedeschi, que du 9e art avec La collectionneuse de Pascal Girard.
Avec Vie d’artiste, Catherine Ocelot prend véritablement son envol.
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