La fraude alimentaire plus sophistiquée que jamais
Des producteurs paient cher pour falsifier les aliments et ainsi augmenter leurs profits
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SAGUENAY I Les fraudeurs alimentaires sont à la fine pointe de la technologie et s’inspirent du dopage sportif pour créer des produits de plus en plus sophistiqués que les experts ont de la difficulté à détecter.
Dans le monde du sport, des organisations et des athlètes paient des scientifiques pour qu’ils créent des produits dopants indétectables par les laboratoires de l’Agence mondiale antidopage.
Ce type de tricherie très élaborée se déplace dans le milieu de l’alimentation. Des laboratoires à la fine pointe de la technologie sont utilisés pour falsifier des produits chimiquement.
La fraude alimentaire est un crime économique qui explose dans le monde, souligne Sébastien Rioux, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en économie politique de l’alimentation et du bien-être au département de géographie de l’Université de Montréal.
«Aujourd’hui, lorsqu’on parle de falsification alimentaire, on parle de méthode extrêmement sophistiquée», explique l’universitaire, qui va expliquer au congrès de l’ACFAS demain pourquoi ce type de fraude continue de croître malgré l’augmentation des exigences et des certifications.
«Un des enjeux dans le futur, c’est cette bataille-là entre les gens qui font la fraude alimentaire et les spécialistes qui essaient de la détecter», illustre Sébastien Rioux.
Les riches producteurs déboursent des fortunes afin de trouver une façon d’altérer des produits pour augmenter leur marge de profit.
De leur côté, les scientifiques de l’Agence canadienne d’inspection des aliments rivalisent d’imagination pour démasquer ces fraudes. Toutefois, les scientifiques manquent de moyens.
Déjà en 2010, une étude chiffrait à 15 milliards $ les sommes qui se sont retrouvées dans les poches des fraudeurs, soit 10 % du marché mondial.
Crime parfait
L’exemple du miel est bien documenté. L’ajout de sucre liquide pour diluer le produit serait à la base d’une énorme fraude. « On le sait depuis longtemps qu’il y a des problèmes, surtout en provenance de la Chine », souligne M. Rioux.
Ce qui a allumé les experts, c’est la quantité trop élevée de miel sur les tablettes des épiceries.
«Lorsqu’on fait les comptes, il n’y a pas assez d’abeilles dans le monde pour produire tout le miel qui est vendu. Ça ne fonctionne pas», ajoute-t-il.
Toutefois, les agences et les chercheurs sont dans l’impasse. «On n’est pas capable de le prouver. Ça se passe dans les laboratoires avec des technologies de pointe », indique Sébastien Rioux. « On sait qu’il y a un crime, mais on ne trouve pas.»
Innover pour mieux frauder
Lorsque les inspecteurs inventent de nouvelles méthodes de détection, les fraudeurs innovent rapidement une façon de contourner l’obstacle.
«Les cas de fraude se trouvent plus souvent dans la chaîne au niveau des grands distributeurs de produits avant d’être remis aux compagnies de distribution. Elles sont encore plus impressionnantes sur le plan de l’importation de produits», explique M. Rioux.
Exemples de fraude alimentaire
Cas d’adultération (fraude à grande échelle)
- Sirop d’érable
- Lait (le cas de la mélamine dans le lait en Chine)
- Huile d’olive modifiée
- Faux jus de fruit naturel
- Miel dilué
- Tomates en conserve
Fausse représentation
(fraude à plus petite échelle)
- Changer la date de péremption
- Vendre un poisson ou une viande qui n’est pas celui affiché dans le comptoir
- Fausse certification biologique