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Rivière des Prairies: patauger parmi les déchets

Un arrondissement veut organiser des activités nautiques dans un secteur pollué de la rivière des Prairies

On trouve aussi des cônes de circulation et des déchets de construction.
Photo Anne Caroline Desplanques On trouve aussi des cônes de circulation et des déchets de construction.

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Une mairesse d’arrondissement veut promouvoir les activités nautiques sur la rivière des Prairies, alors que les berges sont jonchées de détritus et que la qualité de l’eau est douteuse.

Des panneaux municipaux se mêlent aux déchets de plastique en tout genre.
Photo Anne Caroline Desplanques
Des panneaux municipaux se mêlent aux déchets de plastique en tout genre.

« C’est écœurant comme ça se peut pas, un vrai dépotoir », dénonce Paul Mayer en montrant au Journal un couple de bernaches guider ses oisillons entre un cône orange et un amoncellement de plastique.

Résident de la pointe est de l’île de Montréal, M. Mayer consacre sa retraite à la conservation des espaces verts du secteur. Il a notamment présidé l’association des Amis du parc de la Pointe-aux-Prairies.

C’est en admirant les oiseaux migrateurs nichés au bord de la rivière des Prairies qu’il a découvert la malpropreté des berges, le long du boulevard Gouin Est, à la hauteur du club de golf de l’île de Montréal.

La mairesse de l’arrondissement Rivière-des-Prairies—Pointe-aux-Trembles, Chantal Rouleau, veut pourtant promouvoir le kayak, le paddle board et d’autres activités nautiques dans ce secteur. Le projet laisse le guide d’aventure Christian Desautels sceptique.

« Quand on regarde les cotes de pollution, ce n’est pas une zone où j’envisagerais des activités de contact avec l’eau, c’est la zone la plus polluée de la rivière », dit-il.

M. Desautels préside l’organisme La route de Champlain qui exploite un pôle d’activités récréotouristiques fondé sur l’accès à la rivière des Prairies, à Montréal-Nord.

« La première amélioration sur laquelle il faut travailler, c’est l’usage que font les citoyens des berges. Je vois des pêcheurs jeter leurs canettes de bière, leur pot de styromousse, leur fil à pêche, etc. Il y a de l’éducation à faire », dit-il.

La mairesse Rouleau assure que les berges seront nettoyées « très, très rapidement ».

Coliformes

Mais, en plus de l’accumulation de déchets, le suivi de la qualité bactériologique des cours d’eau à Montréal montre la piètre qualité de l’eau entre le pont de l’autoroute 25 et le golf.

Le nombre de coliformes fécaux par millilitre d’eau dépasse les 200 par endroits, la limite au-delà de laquelle la baignade et les autres activités de contact avec l’eau sont compromises, d’après le ministère de l’Environnement.

Alain Saladzius, de la Fondation Rivières, explique que cette portion de la rivière est sous l’influence des déversements d’eaux usées de Montréal et de Laval.

Surverses

Au cours de journées pluvieuses, les deux villes déversent leur trop-plein d’eaux usées dans la rivière, sans traitement, via des égouts de surverse.

Ni Montréal ni Laval n’informent les citoyens de ces déversements. Pour Daniel Green, de la Société pour vaincre la pollution, tant que cette information ne sera pas rendue publique, « toucher à l’eau aux alentours de Montréal sera une activité à risque ».

Mme Rouleau assure que « la qualité de l’eau de la rivière des Prairies s’améliore ». Selon elle, la construction de bassin de rétention d’eau réduira le nombre de surverses de 40 %.

 

Un égout à ciel ouvert se jette dans la rivière

Laval a transformé en égout à ciel ouvert un ruisseau qui se jette dans la rivière des Prairies en amont du secteur où Pointe-aux-Trembles veut encourager le nautisme.

Le ruisseau Lapinière rejoint la rivière des Prairies près du pénitencier fédéral de Saint-Vincent-de-Paul, à Laval. Les arrondissements de Montréal-Nord et Rivière-des-Prairies—Pointe-aux-Trembles se trouvent sur la rive montréalaise de la rivière.

Certaines portions du cours d’eau sont si contaminées qu’aucun poisson n’y vit, d’après une enquête menée par le Conseil régional de l’environnement (CRE) de Laval, en 2014, intitulée Le ruisseau Lapinière, entre habitat et égout à ciel ouvert.

Depuis, il n’y a pas eu d’amélioration, indique Alain Saladzius de la Fondation Rivières.

La mairesse de Rivière-des-Prairies—Pointe-aux-Trembles, Chantal Rouleau, assure que la pollution en provenance de Laval demeure en bordure des rives de l’île Jésus et ne traverse pas jusqu’à la berge montréalaise.

Pas de kayak

Mais Christian Desautels, qui exploite un pôle d’activités récréotouristiques à Montréal-Nord, doit éviter le secteur lors de ses sorties en kayak.

« On a fait des démarches auprès de Laval pour exploiter la zone du ruisseau Lapinière, sur la rivière, mais on nous a bien avertis que c’est un secteur problématique à cause des surverses », dit-il.

En plus de charrier la pollution des quartiers résidentiels et de la zone industrielle qu’il traverse, le ruisseau sert de récepteur pour le réseau d’assainissement des eaux de Laval et reçoit, en temps de pluie ou de fonte, le trop-plein d’ouvrages de surverses, écrit le CRE dans son étude.

Le problème n’est pas nouveau. En 1993 déjà, Jean Rizzuto, alors candidat à la mairie de Laval, accusait le maire de l’époque, Gilles Vaillancourt, de laisser les eaux usées se déverser dans le ruisseau.

Vingt-cinq ans plus tard, Laval a entrepris l’installation de 150 enregistreurs de débordement d’égout sur tout son territoire et déposera ces jours-ci un plan de travail pour la réduction des surverses, indique la porte-parole de la Ville, Sarah Bensadoun.

 

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