Gestion de l’offre : Trudeau refuse de négocier sur la place publique
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Confronté aux reportages voulant qu’Ottawa s’apprête à faire des concessions sur la gestion de l'offre dans la renégociation de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), Justin Trudeau a refusé d’entrer dans les détails mercredi.
«Évidemment, nous ne négocierons pas en public», a déclaré le premier ministre canadien mercredi en conférence de presse dans le nord de l’Ontario.
«C’est sûr que les Américains veulent qu’on élimine la gestion de l’offre, ils ont été très clairs là-dessus, mais moi aussi j’ai été très clair. Nous allons défendre la gestion de l’offre, nous allons défendre nos producteurs laitiers, et les négociations se poursuivent», a-t-il affirmé, ce qui n’exclut pas la possibilité de céder certaines parts de marché aux producteurs des États-Unis.
Un accord vendredi?
Pressés de mettre fin aux négociations après s’être entendus lundi avec le Mexique, les États-Unis souhaitent conclure les négociations d’ici vendredi, en vue d’une adoption de l’accord à la fin novembre.
Le premier ministre canadien a reconnu qu’une entente était possible d’ici vendredi, mais qu’elle était conditionnelle à la conclusion d’un bon accord pour le Canada. Justin Trudeau doit d’ailleurs appeler jeudi ses homologues des provinces et territoires afin de faire le point.
Prenant la parole dans le bureau ovale, le président américain Donald Trump a affirmé de son côté que les négociations se «passaient très bien» et qu’elles pourraient se terminer vendredi.
Freeland à Washington
Arrivée à Washington la veille afin de revenir à la table de négociation, la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a elle aussi refusé de négocier en public mercredi, au terme d’une «conversation productive» avec le représentant américain au commerce, Robert Lighthizer.
«Beaucoup a été accompli», a indiqué la ministre, évoquant des discussions «extrêmement intenses».
Il s'agit d'une reprise des pourparlers pour le Canada, puisque le Mexique et les États-Unis sont parvenus à s'entendre lors de discussions bilatérales sur leurs différends, particulièrement dans le domaine de l'automobile.
Concessions en vue
Selon ce qu'a rapporté le «Globe and Mail» mardi soir, les négociateurs canadiens seraient sur le point d’offrir des concessions aux Américains sur la gestion de l'offre, dans l'espoir d'obtenir des compromis sur d'autres points litigieux, comme l’exception culturelle et le mécanisme de règlement des disputes.
Le système de gestion de l'offre permet de réguler, à l'aide de quotas de production et de droits tarifaires, les secteurs de l'industrie laitière, de la volaille et de la production d'œufs au Canada.
De nombreuses organisations agricoles se sont opposées à toutes concessions dans ce dossier. Dans les dernières années, le Canada a déjà cédé des parts du marché laitier dans le cadre de l’accord commercial avec l’Union européenne et du Partenariat transpacifique.
Faire vite
Dans les trois pays, on se montre plutôt pressé de conclure un nouvel accord, même si Donald Trump brandit régulièrement la menace de signer deux accords bilatéraux si les négociations ne vont pas dans son sens.
Au Canada, M. Trudeau fait face à la pression du calendrier politique, alors que des élections doivent avoir lieu dans un an et qu'il faut éviter d'apparaître comme capitulant devant le président américain.
Aux États-Unis, il y a aussi urgence car Washington veut résoudre la question avant les législatives de novembre. Et au Mexique, le président Enrique Peña Nieto veut signer le pacte commercial avant de laisser la place à Andrés Manuel Lopez Obrador le 1er décembre.
LES PARTIS D'OPPOSITION RÉAGISSENT :
«À cause de l’échec de Justin Trudeau sur l’ALENA, le Canada est laissé pour compte et des milliers d’emplois sont en danger. La défense des Canadiens se fait avec un pays fort, pour être compétitifs au lieu de capituler. Il est temps que les adultes reviennent aux commandes.» - Andrew Scheer, chef du Parti conservateur, sur Twitter
«Il est évident, ce n’est pas facile de négocier avec Donald Trump. Mais nous ne pouvons pas nous laisser intimider, accepter un mauvais accord pour le Canada. Le gouvernement doit lutter pour tous et toutes, pas seulement pour Bay Street.» - Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique, sur Twitter
«Il faut que les élus qui siègent à Québec et à Ottawa, tous partis confondus, fassent front commun et affirment d’une seule voix que nous refusons que les agriculteurs québécois soient abandonnés par un Canada soumis aux velléités de Monsieur Trump.» - Xavier Barsalou-Duval, député du Bloc québécois
- Avec l’Agence France Presse