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Lise Payette: une guerrière

Lise Payette Lise Payette
Elle fut la maîtresse femme de son époque. Photo d'archives


Qu’aurait pensé Lise Payette des hommages, parfois de surface, exprimés depuis 24 heures par ses amis et ses ennemis politiques ? Elle en aurait ri, sans doute.

Cette femme avait la rugosité du climat québécois. Chez elle, la douceur et la tendresse étaient réservées à quelques intimes. Au dernier homme de sa vie, qui l’adorait et qu’elle a aimé passionnément, et à sa petite-fille Flavie­­­, qu’elle idolâtrait.

Elle fut la maîtresse femme de son époque, l’incarnation du matriarcat québécois. Elle ne faisait pas dans la dentelle lorsqu’elle dénonçait ceux qui divergeaient d’opinion avec elle.

Elle s’est battue pour l’égalité des sexes, mais avait tendance à se moquer des hommes. Elle a créé le prix du plus bel homme du Québec, façon de caricaturer les concours de beauté réservés aux femmes-objets. Une douce vengeance qui passera comme une lettre à la poste. À preuve, l’énorme popularité de ses émissions.

Les Yvettes

Lise Payette n’était pas tendre avec les femmes non plus. La dénonciation des Yvettes lors de la campagne référendaire de 1980, alors qu’elle a comparé la femme de Claude Ryan à l’image insipide de la femme soumise que l’on trouvait dans les manuels scolaires la poursuivra tout au long de sa vie.

Sa vision du féminisme ne la protégera pas des critiques des jeunes militantes radicales d’aujourd’hui. Mais en un sens, Lise Payette s’est fait appliquer sa propre médecine, car quiconque l’affrontait dans le passé le faisait à ses risques et périls.

Ces dernières années, quelques déclarations malheureuses et difficilement compréhensibles au sujet de son ami Claude Jutra, dénoncé pour pédophilie et qu’elle a défendu bec et ongles, de même que sa défense de Michel Venne, de l’institut du Nouveau Monde, accusé d’agression sexuelle, ont provoqué un tsunami contre elle. Madame Payette avait tenté de dissuader la plaignante Léa Clermont-Dion pour la protéger, avait-elle affirmé.

Ce fut sa dernière sortie publique. Il serait regrettable que les jeunes féministes ne retiennent de Lise Payette que ce malheureux quiproquo qui semble l’avoir condamnée.

La battante

Madame Payette n’a jamais cherché à flatter les gens, les compromis n’étaient pas dans sa nature. Elle s’est battue toute sa vie à visage découvert et n’a jamais fait semblant d’apprécier ceux qui l’insupportaient.

Elle avait peu d’estime pour les femmes qui ne pensaient pas comme elle. Elle se battait pour les femmes en général, mais pouvait s’insurger contre des femmes en particulier, tolérant mal celles qui critiquaient son féminisme.

Contrairement à sa contemporaine Jannette Bertrand, elle a préféré le statut de guerrière à celui de victime. Janette a toujours aimé d’être aimée. D’ailleurs, le Québec l’a toujours prénommée Janette. Lise Payette, elle, est demeurée Madame Payette pour le grand public. C’est peu dire qu’elle en imposait.

L’histoire retiendra ses importantes réussites politiques et cette image d’elle et de Corinne Côté auprès de René Lévesque, le soir de la défaite du référendum de 1980. La femme forte était blessée mortellement dans son espoir­­­. Hier, 38 ans plus tard, elle vient d’entrer dans l’Histoire. Qu’elle repose en paix désormais.

 







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