Guérir par le baseball
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Dimanche soir. Je m’installe pour compléter ma chronique hebdomadaire pour Le Journal. En regardant le match entre les Astros de Houston et les Red Sox de Boston à la télé, j’ai la tête remplie d’idées pour ma chronique. Dès que j’écris la date, tout change. C’est incroyable comment cette date du 11 septembre m’affecte encore. Elle m’affectera à jamais...
Le 11 septembre 2001, j’habitais au coin de Broadway et de la 77e rue, dans le quartier Upper West Side, à New York. Je prenais une marche avec mon chien en ce beau mardi matin lorsqu’à 8 h 46, un avion a frappé la tour Nord du World Trade Center. Dès mon retour dans mon appartement, le téléphone sonne. Ma mère est au bout du fil : « Derek, le World Trade Center est en feu, un avion l’aurait frappé ! »
J’allume mon téléviseur et je vois de la fumée qui s’échappe de la tour. Et alors que j’essaie de comprendre ce qui a bien pu se passer, un autre avion, un Boeing 757, percute l’autre tour.
« Maman, je vais te rappeler. »
J’avais une école de baseball à New York. Des ligues, des programmes parascolaires, des camps, etc. Des milliers de jeunes participaient à mes programmes chaque semaine à Manhattan. J’avais des amis qui travaillaient au World Trade Center, tout comme des parents de joueurs de mon programme. Bref, pratiquement chaque habitant de New York connaissait quelqu’un qui travaillait dans une des tours.
Un de mes bons amis et son épouse travaillaient dans le World Trade Center et habitaient à quelques pas des tours.
« Derek, nous sommes corrects, mais nous devons évacuer Lower Manhattan, pouvons-nous venir chez vous ? »
Sans hésiter, je leur ai dit oui et je leur ai offert d’aviser leurs collègues également. Plusieurs vagues de personnes ont passé chez moi. Les gens voulaient entrer en contact avec leurs familles et essayer de planifier une façon de quitter New York. Ma famille me demanda de rentrer à Montréal et d’attendre que tout revienne à la normale. Ce n’était pas une option pour moi, il fallait aider.
Contribuer à ma façon
La Croix-Rouge avait trop de dons de sang et personne n’avait le droit de s’approcher du sud de Manhattan. Je savais exactement ce que je devais faire. Sous le leadership du maire Rudy Giuliani, je comprenais clairement quelle forme devait prendre ma contribution. C’était le baseball.
Les milliers de jeunes de mon quartier devaient avoir la chance de jouer. Le lendemain, j’ouvrais mes portes et les enfants pouvaient venir jouer à la balle.
Il fallait laisser les parents composer avec les événements tragiques et, dans plusieurs cas, essayer de trouver des membres de leur famille, des amis ou des collègues qui manquaient toujours à l’appel. De notre côté, on jouait au baseball.
Il fallait aussi isoler les jeunes des images en boucle des avions qui frappaient des édifices à New York et Washington, des gens qui sautaient du 90e étage, des tours qui s’effondraient...
Une solution ? Non seulement des images de vieux matchs de baseball, des films de baseball et des jeux de baseball. Des centaines de jeunes passaient me voir chaque jour. Pour une heure, pour la journée, selon les besoins. Ce qui comptait, c’est que les enfants puissent être des enfants.
La semaine suivante, le baseball majeur était de retour. Les Mets et les Yankees rendaient hommage aux premiers répondants en portant les casquettes des services de police et de pompier. Malgré une défaite des Yankees lors de la Série mondiale, le baseball avait joué un rôle primordial dans la vie des gens et dans ce qu’on pouvait appeler un retour à la normale.
Et voilà que je termine maintenant cette chronique avec la tête toujours remplie d’idées. Je pourrai vous en faire part la semaine prochaine, le 18 septembre.