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Meurtre par compassion: il «souffrait de la voir souffrir»

Le Montréalais accusé du meurtre de sa femme souffrant d’Alzheimer a livré un témoignage émotif

palais de justice de Montréal
Photo Chantal Poirier Michel Cadotte, accompagné de ses avocats Elfriede Duclervil et Nicolas Welt, a témoigné pour sa défense, lundi à Montréal.

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Le Montréalais qui a tué sa femme atteinte d’Alzheimer « souffrait de la voir souffrir » quand il l’a tuée avec un oreiller dans le CHSLD où elle résidait, a-t-il émotivement témoigné lundi.

« Je ne sais pas ce qui s’est passé... je ne voulais plus qu’elle souffre, je souffrais pour elle... [Après] je l’ai regardée, elle avait l’air tellement sereine », a dit en versant des larmes Michel Cadotte, lundi au palais de justice de Montréal.

Cadotte, 57 ans, est accusé du meurtre au deuxième degré de Jocelyne Lizotte, survenu le 20 février 2017 au CHSLD Émilie-Gamelin. S’il reconnaît avoir causé la mort de son épouse, il a plaidé non coupable en raison de son état d’esprit à ce moment.

Tout au long de son témoignage, Cadotte a expliqué à quel point il aimait sa femme, pour qui il avait arrêté la drogue dans les années 1990. Le diagnostic d’Alzheimer précoce est tombé vers 2008.

L’état de Mme Lizotte s’est dégradé au point où elle ne reconnaissait plus personne. Elle était attachée en tout temps.

Aide à mourir

En 2016, il avait fait en vain une demande d’aide médicale à mourir, mais sa femme n’était ni en fin de vie ni capable de donner son consentement.

« Elle me répétait, avant la maladie, qu’elle préférait mourir, qu’elle ne voulait pas perdre sa dignité, a expliqué Cadotte. Dans nos mandats d’inaptitude, c’était inscrit que si on perdait nos capacités neurologiques, on voulait être médicamenté pour ne pas souffrir, même si ça entraînait la mort. »

Pendant des années, Cadotte s’est occupé de sa femme. Il a été diagnostiqué avec une dépression, ce qui ne l’a pas empêché de prendre soin de sa femme.

En contre-interrogatoire, il a admis qu’en 2014, il avait confié une fois à une psychologue qu’il souhaitait rencontrer une autre femme, ou encore qu’il avait furtivement pensé à un possible futur sans sa femme.

Il a également expliqué qu’à l’époque, il traînait sur lui une seringue. Mais s’il a déjà dit qu’il pourrait l’utiliser pour abréger les souffrances de sa femme, c’était surtout pour lui-même.

« Je me disais qui si on m’annonçait une maladie dégénérative comme ma femme, je n’attendrais pas, moi », a-t-il dit.

Au fil des ans, Cadotte a expliqué que les seuls moments où il a pensé mettre fin aux jours de sa femme, c’est quand elle était placée à l’hôpital Royal Victoria avec des soins non adaptés à son état.

Il retrouve ses vieux démons

Cadotte explique qu’il avait recommencé à boire le soir quelques jours avant le drame. Il était alors isolé, avec peu ou pas de soutien. Et quand il est allé la voir le 20 février, il a vu qu’elle était attachée à sa chaise, avec le cou trop penché sur le côté.

Puis il a nourri sa femme, mais la tâche s’est avérée plus ardue que d’habitude.

« Je devais pousser avec la cuillère pour faire entrer la purée. Je la faisais manger et je pleurais en même temps. »

Peu après, il a voulu la coucher, mais la tête de la femme de 60 ans glissait sur l’oreiller. C’est à ce moment qu’il l’a tuée.

« J’ai mis l’oreiller et j’ai attendu... Quand j’ai enlevé l’oreiller, ses yeux étaient ouverts, a témoigné Cadotte en versant des larmes. Elle avait l’air sereine, je ne l’avais pas vue comme ça depuis des années. »

Il est ensuite allé fumer, tout en écrivant un message sur Facebook annonçant le décès, pour ensuite demander à une infirmière de prévenir la police.

« Je regrettais parce que je ne l’avais plus pour moi, mais au moins elle ne souffrait plus. »

Le contre-interrogatoire de Cadotte se poursuit mardi. Un psychiatre et un psychologue devraient ensuite témoigner pour la défense.

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