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C'est quoi une famille ?

C'est quoi une famille ?
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Dernièrement, je suis allée au « shower » d’une amie, qui donnera naissance à son premier enfant dans quelques semaines. Nous étions une quinzaine de mamans réunies pour célébrer la venue du bébé, conçu grâce au sperme d’un donneur anonyme. En écoutant les récits de maternité de l’une et de l’autre, j’ai eu l’étonnante surprise de constater qu’il n’y avait aucune famille traditionnelle composée d’un papa et d’une maman mariés. 

En attendant l’arrivée de Julie, qui n’avait aucune idée qu’une soirée était organisée pour célébrer sa grossesse tant attendue, j’observais avec ravissement les décorations qui ornaient le salon où nous étions toutes réunies. Accrochée au plafond, se trouvait une longue guirlande de fanions sur lesquels étaient écrits les prénoms de toutes nos petites merveilles. Il y en avait 34. Des dizaines de bouts de chou qui ont presque tous été conçus dans des contextes familiaux fort différents.   

Le déclin de la famille traditionnelle 

Il y avait ma grande amie Madeleine, une maman célibataire avec qui j’ai partagé un taxi pour me rendre à la fête. Au tournant de la quarantaine, sans amoureux, mais avec un désir viscéral de devenir mère, cette belle grande brune a décidé de se faire inséminer pour concrétiser son rêve de fonder une famille.   

J’ai rencontré Claire qui allait aussi donner naissance dans quelques semaines. Son deuxième accouchement pour son troisième garçon. L’autre petit, conçu avec la semence du même donneur, c’est son amoureuse qui l’a porté. Les deux femmes, lesbiennes, ont même été enceintes en même temps, donnant naissance à leurs garçons à quelques semaines d’intervalle. Tant qu’à être dans les couches, aussi bien tout faire en même temps! Plus facile aussi pour l’allaitement. Quand l’une n’est pas disponible, l’autre peut donner le sein sans problème. C’est ce qu’elles ont fait. « Avec ce troisième gars qui s’en vient, nous, les filles, serons désormais en minorité dans notre famille. », s’amuse à dire Claire en caressant son ventre arrondi par 31 semaines de grossesse.  

Il y avait des mères vivant dans une famille recomposée, d’autres séparées ou conjointes de fait, et pas une seule maman mariée avec le père de ses enfants.   

Tous les modèles sont valables   

Après que j’eus terminé de faire connaissance avec toutes les convives, Julie est arrivée. Surprise de nous retrouver toutes réunies pour elle - ou plutôt pour eux, elle et son poupon à naître - elle n’a pu retenir ses larmes. Ça fait si longtemps qu’elle souhaite donner la vie; des années.   

Elle a essayé autant comme autant avec son homme, passant même par les douloureux processus physiques et psychologiques de la procréation assistée.   

Les deux sont pourtant fertiles. Lui a d’ailleurs eu deux enfants d’une union précédente.  

C’est finalement grâce à un donneur de sperme anonyme que Julie est finalement tombée enceinte.   

Dans un mois, elle tiendra son petit miracle dans ses bras et son amoureux deviendra papa pour la troisième fois.  

Du courage pour réformer le droit de la famille   

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’au cours des dernières décennies, les modèles familiaux se sont diversifiés au Québec. Le droit de la famille, lui, n’a pas évolué depuis 40 ans, comme si « famille » rimait encore uniquement avec couple hétéro marié avec enfants.   

En 2015, un important rapport sur la modernisation du droit familial a été déposé au gouvernement du Québec. L’équipe de Me Alain Roy, qui a piloté le dossier, suggère une foule de modifications au Code civil pour que la justice soit plus à jour avec nos nouvelles réalités familiales: les conjoints de fait, l’engagement des beaux-parents ou la gestion pour autrui, ce qu’on appelle communément « les mères porteuses ».  

Mais les Libéraux n’ont pas eu le courage d’y donner suite.  

Or, en novembre dernier, la nouvelle ministre de la Justice, Sonia LeBel, a réitéré la promesse électorale caquiste de réformer le droit de la famille dès le premier mandat. Un engagement à saluer.  

Bien qu’il puisse être délicat, voire explosif, d’aborder un enjeu aussi fondamental que celui de la famille, force est d’admettre qu’il est plus que temps que ça se fasse. Pour tous les petits dont les prénoms apparaissent sur les fanions de notre guirlande et pour tous ceux qui viendront s’y ajouter.   

*Les prénoms ont été changés pour préserver l’intimité des mamans, mais les histoires, elles, sont bien réelles. 

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