Enfant martyre: les politiciens unis face au drame
Le gouvernement du Québec veut une enquête publique pour comprendre ce qui s’est passé à Granby
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Le décès tragique de la fillette martyrisée de Granby continue de susciter colère et indignation jusque dans la classe politique, au point où Québec a commandé jeudi une enquête publique ainsi qu’une commission spéciale.
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« Ça prend vraiment des monstres pour avoir fait ça, a lâché sans détour le premier ministre François Legault, en mêlée de presse. Comme tous les Québécois, je suis en beau maudit de ce qui est arrivé [...] à la pauvre petite fille. »
Lundi, cette fillette de 7 ans a été retrouvée dans un état critique dans la résidence familiale de Granby, où elle aurait été ligotée et bâillonnée avec du ruban adhésif. Elle a succombé à ses blessures le lendemain.
Depuis, Le Journal a dévoilé des détails troublants de la triste vie de martyre de l’enfant, notamment documentée devant les tribunaux, mais qui était aussi connue de plusieurs intervenants.
Faire la lumière
Le gouvernement a annoncé jeudi vouloir mettre sur pied une enquête publique du coroner, pour être « 100 % transparent » et faire la lumière sur les ratés du système.
« Ce sont tous les Québécois qui veulent savoir ce qui est arrivé à cette petite fille, ce qu’on aurait pu faire pour éviter que ça arrive », a affirmé M. Legault.
Or, les résultats ne seront pas connus avant plusieurs mois, voire des années. Une enquête publique ne peut pas interférer avec des enquêtes criminelles en cours ou des procédures judiciaires, a rappelé la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault.
Les députés se sont aussi dotés d’une procédure rarement utilisée pour tenter d’expliquer cette triste affaire. À l’unanimité, tous les partis ont accepté de mettre sur pied une commission spéciale sur la protection de la jeunesse.
Moment touchant
Dans un moment touchant, la proposition du premier ministre a aussitôt été applaudie par tous les élus présents au Salon bleu, même si le règlement interdit les applaudissements.
Un moment de silence a aussi été observé, avant lequel M. Legault a fait une accolade à un membre de chacun des groupes parlementaires, mettant de côté la partisanerie au profit de l’unité.
Cette réaction des élus fait écho à celle sur les réseaux sociaux, où la population ne décolère pas.
Signe que la tragédie affecte les gens, un syndicat a même dû demander au Centre jeunesse de l’Estrie de mettre un message automatisé pour indiquer que les appels déplacés ne sont pas tolérés, puisque les employés recevaient trop de menaces.
Une Première depuis Aurore
« C’est dommage que ça prenne un événement comme ça pour qu’on veuille changer les choses, laisse tomber Marie-Ève Clément, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la violence faite aux enfants. Je pense que la dernière fois qu’une situation particulière ait suscité autant d’attention, c’est Aurore [Gagnon]. »
« Tout le monde se sent personnellement atteint par cette histoire. Ça avait été le cas aussi en 1920. Les gens étaient énormément émus », a abondé dans le même sens l’historien Éric Bédard, sur les ondes de QUB radio. Selon Mme Clément, il est normal que la population veuille désigner un coupable.
« Ce n’est pas la DPJ le coupable. Je pense que c’est le système qui a un problème. Il manque de ressources, les intervenants sont débordés et épuisés. [...] Ça fait longtemps qu’on le sait », soutient la professeure à l’Université du Québec en Outaouais.
Elle espère que l’histoire de la fillette de Granby ne tombera pas dans l’oubli et qu’elle apportera de « réels changements ».
« Les services entre eux ne se parlent pas. Les parents peuvent tomber dans un trou. [...] Il faudrait injecter de l’argent dans les ressources de première ligne », soutient Mme Clément.
– Avec Héloïse Archambault et l’Agence QMI
«C’est tout le Québec qui a le goût de la prendre dans ses bras»
«Comme tout le monde, je suis choqué. Le Québec est choqué. Ma communauté est bouleversée par ce qui est arrivé», a lancé d’entrée de jeu le ministre François Bonnardel, jeudi, en entrevue avec Mario Dumont sur les ondes de LCN.
Pour le ministre responsable de la région de l’Estrie, la fillette morte après avoir été martyrisée «a été échappée complètement» par le système.
«On l’a échappée complètement. Tout le monde est conscient que le système a échoué complètement dans les dernières années», a ajouté M. Bonnardel.
Le ministre a évoqué la possibilité de créer une commission, comme celle sur le droit de mourir dans la dignité, pour évaluer les services de protection de la jeunesse.
«Tellement de questions, peu de réponses. De l’école à la DPJ : comment a-t-on pu échapper cette petite fille?», s’est demandé le ministre.
«C’est nos jeunes. C’est une petite fille est disparue, qui est partie. Je pense que c’est tout le Québec qui a le goût de la prendre dans ses bras», a ajouté François Bonnardel, visiblement ébranlé par cette affaire.
Une minute de silence a été respectée à la mémoire de la fillette, jeudi, à l’Assemblée nationale, à Québec. «J’ai rarement vu des moments d’émotions comme ça à l’Assemblée», a confié le ministre Bonnardel.
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