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Des vétérinaires à bout de souffle

Une pénurie de médecins pour petits et gros animaux se fait sentir en région et dans la métropole

vétérinaire
Un appel téléphonique a suffi au Dr Bruno Ouimet pour se trouver un emploi en raison du grand nombre de postes à pourvoir. On le voit dans une clinique de l’arrondissement de Lachine, à Montréal, auscultant Ralph, un sphynx de 4 ans. Photo Chantal Poirier


Les Québécois raffolent tellement de leurs animaux de compagnie que cela provoque une surcharge de travail chez des vétérinaires qui n’hésitent plus à parler de pénurie dans leurs rangs.

« La place des animaux dans notre société et les soins qu’on veut leur donner occupent de plus en plus d’espace dans nos vies », constate la présidente de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ), Caroline Kilsdonk.

L’économie étant plus favorable, une croissance de la clientèle dans les cliniques vétérinaires s’observe depuis cinq à sept ans, selon l’Association des médecins vétérinaires du Québec en pratique des petits animaux (AMVQ). En 10 ans, le nombre de chats et de chiens a grimpé de 10 % au pays, selon un sondage réalisé en 2018 pour l’Institut canadien de la santé animale.

Les propriétaires sont de plus en plus soucieux de la santé de leur animal et consulteraient davantage qu’il y a quelques années.

Loin de se plaindre, le président de l’AMVQ, Jean Gauvin, croit que cette augmentation de clientèle peut en partie expliquer le sentiment de pénurie de vétérinaires. L’équilibre travail-famille de même que la féminisation de la profession font aussi partie de l’équation.

 

  • Jean Gauvin était à l’émission Le 6 à 9 de Caroline et Maka sur QUB radio:

 


 

Quel congé de maternité ?

« On a des appels de membres qui ont de la difficulté à pouvoir prendre un congé de maternité », illustre le Dr Gauvin, lequel évoque aussi le cas d’un vétérinaire qui a pris une seule semaine de vacances en cinq ans.

« Nos places pour les vaccins annuels sont comblées jusqu’à la fin de l’été. » Ces mots résonnent sur la boîte vocale de la clinique vétérinaire S. Dubé de Val-d’Or, en Abitibi, qui cherche à pourvoir deux postes depuis septembre dernier.

« Nous avons deux vétérinaires. Il y a un an, à pareille date, ils étaient cinq. Ce sont des postes permanents, mais on prend aussi des remplacements. Par contre, comme on est éloigné, c’est compliqué pour quelqu’un de venir aider sur une courte période », raconte Sophie Couture, qui s’occupe de la gestion de personnel de l’endroit.

Selon l’AMVQ, l’Abitibi, la Côte-Nord et la Gaspésie font partie des régions les plus touchées.

45 offres non comblées

« Présentement, nous avons environ 45 offres d’emploi annoncées dans l’infolettre destinée à nos membres, qui ne semblent pas trouver preneur », explique la Dre Kilsdonk de l’OMVQ.

Les grands centres ne sont pas en reste, mais la problématique les touche différemment, selon les intervenants interrogés. Les impacts vont souvent se faire sentir quand vient le temps de trouver des médecins pour assurer les urgences ou pour être de garde, selon la Dre Kilsdonk.

« J’ai travaillé dans trois autres provinces avant, et la situation est semblable. Quand j’ai voulu venir au Québec, j’ai fait un appel et je me suis fait offrir un emploi », raconte Bruno Ouimet, un vétérinaire salarié dans une clinique de l’arrondissement de Lachine, à Montréal, depuis un an et demi.

Le manque de techniciens en santé animale, les infirmiers de la médecine vétérinaire, a aussi un impact dans les cliniques. Cette pénurie et celle des vétérinaires sont un enjeu partout au pays.

Les Vétérinaires au Québec

  • 2640 médecins vétérinaires
  • 67 % sont des femmes
  • 58 % pratiquent dans le domaine des petits animaux
  • 86 126 $ revenu annuel médian d’un vétérinaire salarié pour animaux de compagnie (2016)
  • 87 433 $ revenu annuel médian d’un vétérinaire salarié pour grands animaux (2016)

*Source : Ordre des médecins vétérinaires du Québec

Des médecins français pour régler le problème

Devant la pénurie de vétérinaires au Québec, des entreprises recrutent du côté de la France afin de combler leurs besoins.

« Des cliniques ont commencé à recruter du côté de Lyon, en France. Présentement, c’est la seule faculté en France où les équivalences sont reconnues au Québec », précise le président de l’Association des médecins vétérinaires du Québec (AMVQ).

Selon lui, des discussions sont en cours afin de favoriser une agrégation des facultés, comme c’est le cas en Amérique du Nord.

Même son de cloche du côté de l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ).

Tout comme dans le monde des humains, le Dr Gauvin se demande si le fait de déléguer plus d’actes médicaux aux techniciens en santé animale ne pourrait pas faire partie de la solution.

En ce moment, ceux qu’on pourrait qualifier d’infirmiers pour animaux peuvent entre autres effectuer des prélèvements et recueillir des données physiologiques.

Valoriser les régions

En plus de ces idées, la présidente de l’OMVQ, Caroline Kilsdonk, croit qu’il faut inciter les jeunes vétérinaires à aller en région.

« Il faut valoriser le rôle social et communautaire que peut jouer le vétérinaire dans des communautés rurales. Son impact est plus grand en région », explique la Dre Kilsdonk, qui parle en quelque sorte de « vétérinaire de famille ».

Besoin d’une étude

Contrairement à ses confrères, la doyenne de la Faculté de médecine véterinaire de l'Université de Montréal, Christine Theoret, n’est pas prête à parler de pénurie, mais elle est « bien au courant des difficultés de recrutement », qui sont surtout régionales.

Elle précise que l’OMVQ, l’AMVQ et la Faculté ont entamé des démarches pour qu’une étude soit réalisée pour en savoir plus.

« Comme on n’a pas de données, on ne veut pas non plus prendre des décisions qui pourraient avoir des conséquences non souhaitables », explique la Dre Theoret.

 







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