Les contribuables ne paieront pas les avocats de Zampino
L’ex-président du comité exécutif aurait trop attendu avant de plaider sa cause
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La Ville de Montréal vient de remporter une victoire contre l’ancien président du comité exécutif Frank Zampino. Elle n’aura pas à lui payer les 1,6 M$ qu’il réclamait pour payer ses frais d’avocat dans une affaire de corruption alléguée, a appris notre Bureau d’enquête.
Zampino avait été arrêté en mai 2012 à la suite d’une enquête de l’Unité permanente anticorruption (UPAC), concernant le projet immobilier Faubourg Contrecœur.
La Couronne reprochait au bras droit de l’ex-maire Gérald Tremblay d’avoir comploté pour favoriser l’entrepreneur Paolo Catania afin que son entreprise développe d’immenses terrains dans l’est de Montréal.
Mais six ans plus tard, le 2 mai 2018, Zampino a été acquitté des six chefs d’accusation criminels qui pesaient contre lui. L’aventure lui a toutefois coûté cher en frais juridiques : très exactement 1 598 012,44 $, selon la réclamation qu’il a soumise à la Ville de Montréal.
Selon la loi provinciale, les villes sont tenues de rembourser ce genre de frais lorsqu’un élu ou un fonctionnaire est accusé pour des gestes commis « dans l’exercice de ses fonctions ».
En théorie, Zampino aurait pu bénéficier d’un remboursement de sa facture d’avocat en démontrant que c’est à titre d’élu municipal qu’il aurait posé les gestes qu’on lui reprochait.
Il a trop attendu
L’ex-numéro deux de la Ville de Montréal a toutefois subi un revers en Cour supérieure, car il a trop attendu avant de faire cette demande.
Dans une décision datée du 1er août dernier, la juge Johanne Mainville, de la Cour supérieure, souligne que M. Zampino avait au plus tard jusqu’en mai 2015 (soit trois ans après avoir été accusé) pour faire valoir qu’il avait droit au remboursement.
C’est le Code civil du Québec qui prévoit ce délai maximal de trois ans.
« À la place, M. Zampino a choisi d’attendre que le jugement soit rendu sur le fond du litige [en 2018] avant de déposer une demande, malgré sa connaissance depuis 2012 de la procédure fondée sur des allégations de nature criminelle portées contre lui », écrit la juge.
En conséquence, la Ville de Montréal n’aura pas un sou à verser à Frank Zampino.
Entre-temps, Zampino, qui a démissionné en 2008, n’en a pas fini avec la justice. Il fait face à d’autres accusations criminelles en lien avec un stratagème allégué de trucage de contrats publics totalisant 160 M$.
En juin, il a déposé une requête en arrêt des procédures dans cette affaire, en affirmant que l’UPAC avait illégalement enregistré certaines de ses conversations couvertes par le privilège avocat-client.
Dans les règles
Hier, un enquêteur de l’UPAC a affirmé que son organisation avait procédé selon les règles de l’art et avec l’autorisation d’un juge pour effectuer l’écoute.
En 2013 et 2014, deux autres ex-élus, soit les anciens maires de Boisbriand Sylvie St-Jean et Robert Poirier, avaient eux aussi échoué en tentant de faire rembourser leurs frais d’avocat par les contribuables.
Tous deux avaient été reconnus coupables d’abus de confiance, mais la justice a décidé que les actes auxquels ils s’étaient livrés ne pouvaient être considérés comme ayant été posés dans l’exercice de leurs fonctions d’élus.