Des pavés du 19e siècle sont détruits
La Ville laisse le soin aux entrepreneurs de déterminer les pierres à garder parmi celles trouvées sur les chantiers
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Sous l’asphalte de plusieurs rues de Montréal se trouvent des pavés de granit datant du 19e siècle. Mais comment la Ville s’assure-t-elle qu’ils soient préservés avec tous les chantiers en cours ?
Question simple en apparence, mais réponse particulièrement compliquée à obtenir quand on tombe dans la bureaucratie ridicule de l’administration montréalaise.
Éric Faille est aux premières loges d’un grand chantier visant à reconstruire les égouts et les aqueducs de la rue Saint-Cuthbert, à l’angle de Saint-Urbain, dans l’arrondissement Le Plateau-Mont-Royal. Lorsque l’asphalte a été arraché, le citoyen a tout de suite remarqué la présence de pavés en granit.
« J’en ai vu un bon nombre être détruits, ça m’a inquiété », raconte M. Faille en me montrant une vidéo et des images de la scène. En questionnant les employés du chantier, il a appris qu’environ 3000 pavés avaient été préservés et livrés à la voirie de l’arrondissement.
« C’est une bonne nouvelle, mais il est impossible de savoir combien ont été détruits et jetés, ça pourrait être plusieurs milliers », souligne M. Faille.
Difficile d’y voir clair
J’ai contacté les porte-parole de l’arrondissement et de la Ville centre pour savoir comment fonctionne la préservation des pavés. Après plusieurs échanges de courriels, l’option de parler à un humain étant exclue, j’ai fini par comprendre qu’en théorie, les entrepreneurs de la Ville récupèrent un maximum de pavés de granit qui sont ensuite revalorisés dans les rues du Vieux-Montréal ou sur d’autres aménagements.
« La Ville se fie à la bonne foi des entrepreneurs, on ne demande pas combien sont détruits versus combien sont récupérés, je ne pense pas qu’il y ait de registre à ce sujet », me confie une source du domaine de la construction.
Ma quête pour en savoir plus sur la gestion des pavés anciens m’a donné bien des maux de tête. Impossible d’avoir une entrevue avec l’élu Alex Norris au sujet du chantier Saint-Cuthbert. Norris est pourtant un ancien journaliste ! Impossible aussi de parler aux archéologues de la Ville pour connaître l’histoire et la valeur des pierres. Et impossible d’avoir des réponses à d’autres questions, comme le nombre de pavés que la Ville possède dans sa réserve archéologique.
Suivis plus rigoureux
« C’est dommage que la Ville ne soit pas plus transparente, commente Dinu Bumbaru, directeur des politiques d’Héritage Montréal. Elle a un devoir de préserver ces pierres, qui sont porteuses du patrimoine montréalais. La moindre des choses est de répondre aux questions. » Selon M. Bumbaru, il faudrait mieux former les surveillants et les inspecteurs de chantier pour s’assurer de récupérer un maximum de pavés. Un ex-gestionnaire à la Ville souhaitant préserver l’anonymat partage le même avis. « Je ne pense malheureusement pas qu’il y ait un suivi assez rigoureux sur le terrain. On fait trop confiance aux entrepreneurs. Et pourtant on a bien vu dans le passé que ce n’était pas une bonne idée. »
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