Un texte d’examen en anglais dans un cours en français
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Des étudiants en marketing au HEC Montréal ont reçu un examen final dont le texte était en anglais même si leur cours se donnait en français, symptôme d’une «paresse» linguistique, dénonce l’un d’eux.
«Les étudiants sont un peu gênés de dénoncer [...] Je ne voulais pas passer pour le gars qui ne veut pas parler anglais», soutient Julien (nom fictif).
Cet étudiant au baccalauréat en administration des affaires à l’école des Hautes Études commerciales (HEC) souhaite préserver son anonymat pour éviter que son témoignage n’affecte ses notes.
40% de la note
Dans un de ses cours de marketing, 40% de la note de la session est attribué à un travail que les étudiants doivent réaliser à partir d’une étude de cas mise en ligne il y a environ deux semaines, explique Julien. Cet examen de type «maison» doit être rendu à la mi-décembre.
Le document, dont Le Journal a obtenu copie, fait 21 pages et porte sur l’industrie du diamant.
Il s’agit d’un cas «d'une grande valeur pédagogique», explique Marie-Pierre Hamel des relations médias.
De plus, le cas a été discuté en français à plusieurs reprises en classe depuis le début de la session, affirme-t-elle. Les étudiants n’auraient donc pas été laissés à eux-mêmes devant l’exercice.
Qui dit vrai?
Selon Julien, ce n’est pas ce qui s’est passé. «Ils nous ont juste demandé si on avait des questions [sur le cas en question].» Le cas n’a pas réellement été étudié en classe, dit-il.
Julien considère qu’il maîtrise bien l’anglais. «Mais même moi, j’avais de la difficulté à comprendre».
La semaine dernière, il a déposé une plainte à l’ombudsman du HEC. Jeudi, une étude de cas alternative en français a été rendue disponible aux étudiants du cours. Ceux qui choisiront cette option auront toutefois eu deux semaines de moins pour réaliser le travail, déplore Julien.
Un niveau d’anglais intermédiaire est exigé pour obtenir le diplôme, rappelle Mme Hamel.
Les profs sont parfois déchirés entre choisir un cas en français et présenter un cas particulièrement intéressant, mais rédigé en anglais, explique-t-elle.
Cette autre étude de cas aurait pu être fournie plus rapidement si seulement l’étudiant avait manifesté son malaise plus tôt, ajoute-t-elle.
«Tabou»
Mais la culture pro-anglais du HEC fait en sorte qu’il y a un véritable «tabou» et une certaine «paresse» autour de la question, avance Julien, qui se serait déjà fait répondre qu’il n’était «pas ouvert d’esprit» par un chargé de cours dans le passé.
En 2017, Le Journal publiait d’ailleurs un dossier sur l’anglicisation des cours et programmes au HEC, que dénonçaient alors plusieurs professeurs.
Par exemple, des enseignants vont fournir des acétates à peine traduits de l’anglais. Des conférenciers francophones vont s’exprimer en anglais devant des étudiants francophones, illustre Julien.
«C’est inquiétant», s’exclame Maxime Laporte du Mouvement Québec Français, qui observe cette tendance dans plusieurs établissements francophones.
De son côté, l’Association étudiante du HEC n’a reçu aucune doléance d’étudiants à propos d’examens en anglais ou de malaise vis-à-vis de la langue. Il s’agit probablement d’un cas isolé, nuance donc le représentant Florent Roquette.