Jean-Carl Boucher fait son cinéma
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On l’a vu grandir à l’écran grâce à l’attachant personnage de Ricardo qu’il incarné pendant une dizaine d’années dans les populaires comédies 1981, 1987 et 1991. Mais même s’il mène une belle carrière comme acteur depuis l’âge de 12 ans, Jean-Carl Boucher a toujours caressé le projet de passer derrière la caméra un jour. C’est maintenant chose faite avec Flashwood, son premier long métrage à titre de réalisateur.
La sortie de ce film, qu’il a tourné sur une période de sept ans avec plusieurs de ses bons amis acteurs (dont Pier-Luc Funk, Simon Pigeon et Karelle Tremblay), représente pour Jean-Carl Boucher l’aboutissement d’un vieux rêve. Car les gens qui le connaissent bien savent que le jeune homme de 26 ans se passionne pour la réalisation depuis qu’il est tout petit.
« [Quand j’étais] plus jeune, mes idoles n’étaient pas des acteurs, mais plutôt des réalisateurs », souligne Jean-Carl Boucher en entrevue au Journal.
« Quand j’allais dans un club vidéo, je cherchais des films réalisés par des cinéastes que j’aimais et non des films qui mettaient en vedette tel ou tel acteur. Ma passion première, c’était la réalisation. »
Jean-Carl Boucher a eu la chance de baigner dans le milieu du cinéma très jeune. À 12 ans, il décrochait un rôle dans le film Un été sans point ni coup sûr, du réalisateur Francis Leclerc. C’est sur ce plateau qu’il a fait la rencontre de Pier-Luc Funk et Simon Pigeon, qui sont devenus des amis inséparables (ils jouent aussi dans Flashwood).
« Le tournage d’Un été sans point ni coup sûr a tellement été une belle introduction au milieu du cinéma », relate Jean-Carl Boucher.
« J’avais la chance d’être aux premières loges pour voir travailler Francis Leclerc et son directeur photo, Steve Asselin. Ils ont été mes deux mentors à l’époque. Ils m’ont dit : tu peux jouer parce que c’est le fun à ton âge, mais un jour, tu devrais tenter ta chance à la réalisation. J’ai été vraiment chanceux de pouvoir apprendre à leurs côtés. »
Pier-Luc Funk se souvient que déjà, à l’époque, Jean-Carl Boucher prenait plaisir à mettre en scène sa bande d’amis dans des petits films amateurs : « Jean-Carl avait sa caméra et on tournait des petits films entre nous où on jouait des gens de la mafia qui se battaient, et c’est Jean-Carl qui réalisait cela », raconte Pier-Luc Funk.
« On avait 12 ans. Et nous voilà aujourd’hui en train de faire la promotion d’un film réalisé par Jean-Carl. Je trouve que c’est un bel accomplissement. Jean-Carl a une connaissance exceptionnelle du cinéma et je trouve ça beau qu’il ait décidé de faire un film de façon totalement libre. C’est un bonheur d’être dirigé par lui parce qu’il a plus confiance en toi que tu en as en toi-même ».
L’effet Ricardo
Après la sortie d’Un été sans point ni coup sûr, en 2008, tout a déboulé très vite pour Jean-Carl Boucher. Il a obtenu un rôle dans la série jeunesse Tactik qui a été diffusée pendant six ans sur les ondes de Télé-Québec. Parallèlement à cette aventure, le cinéaste Ricardo Trogi lui a confié le personnage de son alter ego dans sa série de comédies autobiographiques 1981, 1987 et 1991, qui ont obtenu beaucoup de succès au box-office entre 2009 et 2018.
La trilogie de Trogi a forcément eu une influence majeure sur la jeune carrière de Jean-Carl Boucher. Encore aujourd’hui, il lui arrive régulièrement de se faire appeler Ricardo dans la rue. « On m’a même déjà dit : hey, Ricardo, bravo pour ton film 1492 ! », lance-t-il en riant.
Dans un monde idéal, Jean-Carl Boucher aimerait pouvoir continuer à travailler derrière la caméra tout en poursuivant sa carrière d’acteur. Il a d’ailleurs plusieurs autres projets de films en chantier, dont une comédie « à la Superbad » qu’il a coscénarisée avec Pier-Luc Funk.
« Je pense que c’est très possible de faire les deux (le jeu et la réalisation), observe-t-il. J’admire beaucoup Robin Aubert. Je trouve qu’au Québec, c’est lui qui s’en sort le mieux avec cette dualité-là. C’est un artiste qui a un côté sombre aussi. C’est le fun de révéler aussi qui est l’artiste derrière le comédien. Parce qu’en tant que comédien, il y a juste une partie de toi qui est révélée. Je pense que j’ai une démarche assez précise et personnelle comme réalisateur et scénariste et j’ai aussi envie de montrer ce côté-là de moi. »
Un film entre amis
Jean-Carl Boucher avait 19 ans quand il a tourné les premières scènes de Flashwood, l’été 2013. À cette époque, le jeune acteur était loin de se douter que ce petit film tourné entre amis lancerait officiellement sa carrière de réalisateur, sept ans plus tard.
Tourné sans argent d’organismes, Flashwood réunit à l’écran plusieurs amis acteurs que Jean-Carl Boucher a côtoyés pendant six ans dans la série Tactik, comme Pier-Luc Funk, Antoine Desrochers, Simon Pigeon et Laurent-Christophe de Ruelle. D’autres amis de longue date du jeune cinéaste se sont greffés à la bande, dont l’actrice Karelle Tremblay et Maxime Desjardins-Tremblay.
« Le but, au départ, était tout simplement de faire un film entre amis de façon instinctive », explique Jean-Carl Boucher, rencontré sur la terrasse d’un hôtel de Montréal la semaine dernière.
« Je venais de finir de tourner dans la série Tactik et le film 1987 avec plusieurs de ces acteurs qui sont de bons amis. Je trouvais cette gang-là tellement talentueuse et inspirante, et après la tempête de fun qu’on avait eu ensemble, j’ai eu envie de leur donner chacun un personnage et d’aller chercher d’autres comédiens que j’apprécie. Les gens qui sont dans le film sont tous des amis ».
La première partie de Flashwood a été tournée en cinq jours à Boisbriand, où les parents de Jean-Carl Boucher demeurent. Flashwood, c’est d’ailleurs le surnom que des jeunes de Boisbriand ont donné à leur ville. Un titre approprié puisque le film dépeint un groupe de jeunes qui s’ennuient et qui errent sans but précis dans leur banlieue.
« J’ai dit aux acteurs : voyons ça comme un laboratoire, indique Jean-Carl Boucher. Il y a beaucoup d’improvisation, mais ça part toujours de quelque part. J’avais écrit un scénario de 25 pages qui a servi de canevas. Je voulais créer un univers avec ces personnages alors je leur ai dit de commencer la scène et de se laisser aller. Ça marchait super bien parce que les gars se connaissaient bien et ils savaient comment se répondre et s’écouter. Il s’est passé quelque chose de magique pendant le tournage. »
Évolution
Sauf que, ne sachant pas quoi faire avec ce matériel, Jean-Carl Boucher a mis le projet de côté pendant quelques années. Ce n’est que cinq ans plus tard qu’il a eu ce flash : pourquoi ne pas revisiter les mêmes personnages cinq ans plus tard ?
« Je me suis dit que ce serait le fun de voir où ces personnages sont rendus cinq ans plus tard. J’ai rappelé la gang et on s’est réunis pour un autre cinq jours de tournage. Je trouvais ça intéressant de revivre la même expérience avec les mêmes personnes pour voir si on était capables d’obtenir la même énergie et la même magie. La structure était déjà là, ils connaissaient déjà leurs personnages, leurs lignes. Je leur ai dit : allez-y, vivez. Je voulais créer des moments, des sensations. »
Jean-Carl Boucher a répété le même exercice deux ans plus tard, pour donner un troisième acte à son film. Au final, Flashwood suit ces jeunes banlieusards sur une période de sept ans. Mais le réalisateur se défend d’avoir voulu brosser le portrait d’une génération.
« J’ai grandi en banlieue, tout comme Pier-Luc (Funk) et Antoine (Desrochers), souligne Jean-Carl Boucher. Étant devenus comédiens jeunes, on s’est tous déplacés rapidement vers la ville pour le travail. Et je me suis rendu compte que quand on revenait en banlieue pour revoir nos parents, on sentait tous une espèce de déconnexion, un sentiment qu’on n’avait rien à faire là. Je me suis demandé ce qui se serait passé si on était restés là pendant toute notre jeunesse. Flashwood, c’est une interprétation de ce que j’imagine que ça peut être, une gang dans une banlieue. »
Le film Flashwood prend l’affiche le 7 août