L’écriture porteuse de la mémoire de l’avenir
Coup d'oeil sur cet article
C’est un roman qui donne envie d’écrire, de lire et de provoquer le destin amoureux qu’a lancé Sophie Létourneau une semaine à peine avant le premier confinement. Véritable baume sur nos cœurs de confinés, Chasse à l’homme offre une réflexion sur l’écriture belle comme les souvenirs que l’on arrive à se construire.
Aujourd’hui enseignante en création littéraire à l’Université Laval, l’écrivaine de 40 ans se remémore avec affection les lettres manuscrites qu’elle rédigeait à l’adolescence. Ses nouvelles ayant intensifié son envie d’écrire aussi, ses années d’étude en littérature et Polaroid son premier livre écrit en 2004 à 23 ans, mais publié alors qu’elle en avait 26.
Renouant avec son plaisir d’écrire « en ayant une personne en tête », elle a publié en 2013 le roman Chanson française où l’utilisation du pronom « tu » lui permettait de s’adresser directement au personnage, elle pour qui le rapport à l’autre est d’une importance capitale.
« Puis, par paresse, je me suis mise à écrire des histoires vraies dans un cours de création littéraire, parce que je n’avais pas le temps d’imaginer des choses, raconte-t-elle en riant. Je me suis rendu compte que c’est quand j’écrivais des histoires vraies que le groupe réagissait le plus, qu’il y avait le plus d’enthousiasme. J’ai décidé d’explorer ce filon, d’écrire des choses qui sont vraies et qui créent un choc plus grand. »
Fascinée par les gens qui se racontaient généralement à travers leurs beaux moments, l’autrice a pourtant d’abord privilégié les récits de souvenirs un peu troubles, aigres-doux. « Après avoir écrit cela, précise-t-elle, j’ai eu envie d’aller dans un mode plus joyeux, de trouver une vérité dans la joie. »
Un feu d’artifice de coïncidences
C’est assurément dans la joie qu’elle a écrit le superbe livre Chasse à l’homme. Un roman d’autofiction en fragments (composé de courts textes en prose) dont le thème central est l’amour. Celui de l’homme de sa vie dont elle est en quête, mais aussi de la littérature et de l’écriture.
« Je me suis demandé : est-ce qu’on peut inventer l’avenir ? Est-ce que je peux écrire une histoire et faire en sorte qu’elle arrive, qu’elle devienne vraie ? Si l’écriture avait un pouvoir de fantasme et si je pouvais faire en sorte que les choses se produisent ? »
Son projet ? Partir à la recherche de l’homme de sa vie tout en modifiant son rapport au temps. Écrire sa vie afin de prouver que les mots ont le pouvoir de modeler la réalité.
« Je pense que l’autofiction est une manière pour les auteurs de prendre le contrôle de comment on se raconte, mais aussi de comment les autres nous voient. »
La prémisse de cette histoire tournée vers le futur est simple. Après avoir consulté une voyante lui ayant affirmé qu’elle rencontrerait l’homme de sa vie à 33 ans, la jeune femme qui en avait alors 28 a refusé d’attendre que le temps fasse son œuvre. Chasse à l’homme est ainsi le récit 100 % authentique de cette quête de l’amour, mais aussi de tout ce qui est arrivé d’inexplicable, de troublant et d’un peu magique au fil de ces années.
Ce livre boîte aux trésors est aussi composé de voyages menant de Montréal à Paris en passant par Québec et Tokyo, de citations d’auteurs — et surtout d’autrices — connus venant appuyer ces mystérieux élans et de beaucoup de joie ; de celles des histoires qui finissent bien.