COVID-19 : ce qu’il faut savoir sur la stratégie suédoise
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Souvent dénoncée comme un contre-exemple, mais louée par les adversaires des confinements, l’approche « souple » de la Suède face à la COVID-19 a suscité de vifs débats depuis le début de la pandémie.
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En quoi consiste la « stratégie suédoise »?
Jugeant pratiquement impossible d’empêcher le virus de circuler, les autorités suédoises se sont fixé l’objectif de spécifiquement protéger les personnes âgées et à risques, et) comme ailleurs (d’éviter la saturation des services de santé, tout en tolérant un certain niveau de contagion.
Redoutant un impact trop lourd sur la société, la Suède n’a pas confiné sa population ni fermé les écoles pour les moins de 16 ans.
Singularité quasi mondiale : le pays n’a jamais recommandé l’usage des masques, les jugeant inefficaces et privilégiant les appels à la distanciation.
Autre spécificité : en dehors de quelques interdictions, la stratégie repose essentiellement sur des « recommandations » ayant valeur de règle officielle, mais pas coercitive.
Quelles sont ces recommandations?
Outre les classiques lavages de main et distanciation physique, les recommandations incluent notamment le télétravail où c’est possible et l’auto-isolement en cas de symptômes.
Au printemps, deux interdictions ont été appliquées : pas de visite en maison de retraite et pas plus de 50 personnes dans les événements publics. Lycées et universités ont aussi été fermés.
Avec l’arrivée d’une seconde vague en octobre, l’Autorité de santé publique et le gouvernement ont durci les recommandations dans les régions touchées, puis au niveau national depuis le 14 décembre.
Les Suédois ont notamment été appelés à ne fréquenter que les membres de leurs foyers. Lors d’événement, le public est désormais limité à 8 personnes.
En revanche, bars, restaurants ou magasins n’ont à aucun moment dû fermer. Mais des mesures de distanciation doivent s’y appliquer et on ne peut actuellement être plus de huit à la même table.
Pourquoi cette stratégie?
Le pays scandinave peut s’appuyer sur une confiance élevée dans ses autorités, avec des recommandations généralement bien suivies même quand elles ne sont pas obligatoires.
La Suède a toujours juré que sa stratégie n’était pas dictée par l’objectif de sauver l’économie.
Mais, juridiquement, le pays n’a pas de loi d’urgence lui permettant de fermer des parties de la société en temps de paix.
Une loi temporaire de trois mois adoptée en avril, qui nécessitait le feu vert du parlement pour chaque nouvelle mesure, n’a jamais été utilisée.
Une nouvelle loi est désormais promise, qui doit permettre de fermer certains magasins et établissements, mais seulement en mars 2021.
La Suède a-t-elle recherché l’immunité collective?
La stratégie a été souvent décrite comme visant l’immunité collective, lorsqu’une part de la population ayant contracté le virus et développé des anticorps serait suffisamment élevée pour arrêter la contagion ce, que les autorités ont toujours nié.
« Cela n’a jamais fait partie de notre stratégie », démentait ainsi l’épidémiologiste en chef Anders Tegnell auprès de l’AFP en septembre. « Une immunité collective qui arrête complètement le virus n’arrivera qu’avec un vaccin », affirmait-il aussi en mai.
Mais l’architecte de la stratégie suédoise a plusieurs fois affirmé qu’il ne voyait pas d’un mauvais œil une contamination contenue.
« C’est bien d’avoir une immunité élevée dans la population, nous en voyons les effets » sur la baisse du nombre de cas, disait-il à l’AFP en juin.
Des courriels internes de l’autorité sanitaire révélés par la presse ont également montré que l’immunité collective avait bien fait l’objet de discussions en mars.
Quel bilan?
Sur fond de vif débat et malgré des critiques grandissantes, la Suède s’est jusqu’ici refusée à qualifier sa stratégie d’échec, appelant à en juger sur le long terme.
Avec plus de 75 morts pour 100 000 habitants mi-décembre, elle affiche un bilan jusqu’à dix fois plus lourd que ses voisins, la Finlande (8), la Norvège (7) ou le Danemark (16).
Mais elle fait mieux que plusieurs pays européens ayant pris des mesures de confinement comme la Belgique (157), l’Italie (109), l’Espagne (104) ou la France (87).
Le gouvernement a admis en mai avoir échoué à protéger les maisons de retraite, où près de la moitié des morts de la première vague ont été enregistrés.
« La stratégie de protection des personnes âgées a échoué », a cinglé une commission indépendante mardi dans un rapport préliminaire.
Quant au respect des consignes, difficile d’être catégorique : près de 90% des Suédois affirment les suivre, selon un récent sondage. Mais gouvernement et responsables sanitaires déplorent ces dernières semaines qu’elles ne soient pas encore suffisamment respectées.