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Déficience intellectuelle: il est temps de balayer les préjugés

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Lettre ouverte à toi qui, comme moi, as un frère ou une sœur ayant une déficience intellectuelle.

Cher/chère toi,

Comme la fin de mon tournage pour District 31 tombe pile avec le début de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, je voulais t’écrire cette lettre pour te dire que je pense aussi à toi.

Tu ne le sais peut-être pas, mais j’ai un frère qui a une déficience intellectuelle. Jean-Sébastien, c’est mon petit frère, et comme on a treize mois de différence, on a tout vécu ensemble. C’est mon frère d’armes avec qui j’ai tout partagé : premiers jeux, premières chicanes, premières peines.

Si nos vies se sont déroulées ensuite en parallèle, nous sommes toujours restés très proches. Dès mes débuts sur scène, il m’a toujours suivi. Lors de mes premiers matchs d’impro ou de mes premiers spectacles de théâtre, Jean-Sébastien était là. Tout ce que j’ai fait, il l’a vu, et aujourd’hui, je me rends compte qu’il fait partie des premières personnes à qui je pense lorsque je travaille. Pour que je puisse m’épanouir dans son regard.

Ces phrases qui font mal

Pourtant, il ne l’a pas eu facile. Dès l’enfance, j’ai été témoin des premiers préjugés : « Il ne peut pas faire ça, il n’est pas capable de, c’est impossible pour lui... » Toi aussi, j’imagine que tu les as entendues, ces phrases qui font mal, ces préjugés qui restent les mêmes à l’âge adulte et qui seraient pourtant si faciles à déconstruire.

Comme moi, tu as sûrement vu ton frère ou ta sœur accomplir des choses parce qu’on lui a donné la chance de s’épanouir. Jean-Sébastien a vécu en appartement, il est allé à l’école, il a été amoureux, il a eu un travail, une vie sociale. Mon frère est un citoyen exemplaire et je me dis que ces préjugés, il est temps de les balayer. C’est aussi pour ça que la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle a été créée.

Un cadeau

Je voulais aussi te dire de ne pas avoir honte de ton frère ou de ta sœur, même si, dans le moment présent, c’est difficile. Tu verras que cette personne c’est un cadeau qui te permettra, et qui te permet déjà, de développer des qualités qui feront de toi un être humain meilleur : l’ouverture, l’empathie, la bonté et l’optimisme...

Et puis, je te dirais surtout de ne pas avoir honte de trouver que c’est difficile. C’est normal ! Tu n’as pas choisi cette vie-là. Les gens te regardent d’une étrange façon, tes amis te jugent... N’aie pas de culpabilité à ressentir cette honte. Surtout, dis-le. Parce que le dire va amener d’autres personnes comme moi à te dire : « attends, tu vas voir ».

Tu verras que ces gens qui rejettent ton frère ou ta sœur, ce ne sont peut-être pas de bonnes personnes pour toi. Tu trouveras tes vrais amis ailleurs. Tu verras que ta vie et ta façon d’être avec lui ou elle te font aussi participer à créer un monde plus inclusif.

Mon frère m’a beaucoup donné et je te le dis, mes enfants ont aussi eu ce cadeau 40 ans plus tard. Alors, dis-toi que, pour toi aussi, ta sœur ou ton frère te donnera beaucoup. Sois patient, sois ouvert et tu verras...

Vincent-Guillaume Otis
Porte-parole de La Semaine québécoise de la déficience intellectuelle