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La révolution d’Agnès: la traversée des femmes

we 0417 Boileau
La révolution d’Agnès
Jean-Michel Fortier
La Mèche
228 pages
2021
Photo courtoisie


La révolution d’Agnès a tous les airs d’une aimable fantaisie : souriante, agréable, qui cherche à faire plaisir. Mais bien des choses se trament sous la légèreté du roman.  

Le lieu et l’époque de La révolution d’Agnès nous renvoient à un monde peu à peu devenu mythique : on est à Percé, face au célèbre rocher, en 1969. Les protagonistes habitent tous une pension, mode d’habitation qui n’a plus cours aujourd’hui.

Madame Sergerie en est la propriétaire et elle a trois pensionnaires : Guimond, policier à la retraite, Harold, quadragénaire qui vit de ses rentes et qui, époque oblige, cache son homosexualité, et la toute jeune Agnès, ancienne étudiante devenue shampouineuse et qui rêve de mieux.

Il y a aussi le vieux Steven Norton, nouvel amoureux de madame Sergerie et qui est prêt à tout pour elle. 

Leur tranquille routine, comme celle de tout Percé, sera subitement perturbée parce qu’un cuirassé vient jeter l’ancre tout près du rocher. Va-t-on les attaquer ? Mais les jours ont beau passer, rien ne bouge.

Et puis peu à peu, on voit apparaître l’équipage : toutes des femmes, toutes d’orange vêtues. Elles mènent une mission secrète – n’ont-elles pas fait exploser l’arche du rocher ! – et leur seule présence attire la curiosité, mais aussi l’envie de se joindre à elles, comme le ressentent Agnès et madame Sergerie.

Jean-Michel Fortier nous raconte cette rocambolesque aventure à la manière qui lui est propre, fidèle à ses deux romans précédents : ses personnages sont typés, colorés, mais restent réalistes.

De même, ils se retrouvent plongés dans des situations décrites avec juste ce qu’il faut pour en souligner le ridicule. Prenez ce faire-part de mariage : le velours mauve de l’enveloppe ne fait-il pas davantage porno que noces ?

C’est dit sur l’air de ne pas y toucher, et c’est le ton adopté tout au long du récit. Sauf que le regard bascule à mesure qu’on avance et qu’on découvre les secrets des personnages.

Métaphore 

La première partie est écrite au « vous » (« une dame âgée se cramponne à votre bras pour vous crier des reproches », ainsi débute le récit), manière de nous fondre au personnage de Guimond, qui semble ainsi au cœur de l’histoire.

Or, dans la deuxième partie, centrée sur les projets de revanche sur la vie qu’élabore Agnès, c’est un narrateur anonyme qui tient le fil du récit, comme dans les romans classiques. On verra ici se déployer les nouveaux liens de solidarité que crée Agnès avec les femmes de Percé, mais aussi avec Harold.

Troisième et dernière partie, la narration au « vous » est de retour : cette fois, c’est pour nous associer à Agnès. Elle s’est installée sur le mystérieux bateau et c’est beaucoup moins amusant que prévu : « Vous êtes devenue une ennuyée ». Par contre, Hélène Sergerie s’y plaît beaucoup. 

Quelle jolie métaphore sur le féminisme qui s’apprêtait à prendre le large, et à entraîner les femmes, chacune à son pas.







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