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Visages de notre histoire: Daisy Peterson, source d’inspiration de deux légendes du jazz

Cours de musique au Negro Community Centre, avec Daisy Peterson (à gauche).
Cours de musique au Negro Community Centre, avec Daisy Peterson (à gauche). Photo avec l’aimable autorisation des archives de l’Université Concordia, Fonds NCC


Une famille de talents  

Les Montréalais amateurs de jazz connaissent bien Oscar Peterson ou Oliver Jones. Or, peu de gens savent que c’est grâce à Daisy Sweeney (née Peterson), la sœur aînée d’Oscar, que ces deux légendes ont pu développer leur talent sur le clavier d’un piano. Née à Montréal en 1920, Daisy Peterson grandit au sein de la communauté noire d’ascendance afro-américaine de Montréal, dans le quartier de la Petite-Bourgogne, près de Pointe-Saint-Charles. Son père, Daniel, comme beaucoup d’autres hommes de la communauté, est porteur-bagagiste pour la compagnie ferroviaire du Canadien National. Musicien amateur, il exige de ses enfants qu’ils apprennent la musique. Daisy apprend donc le piano et poursuit ses études en musique à l’Université McGill. Elle finance ses études en travaillant comme domestique, puis comme riveteuse dans une usine d’aviation pendant la Seconde Guerre mondiale. Talentueuse mais prise d’un puissant trac au moment de se produire sur scène, elle s’oriente vers l’enseignement. À cette époque, elle commence à enseigner aux jeunes de son quartier, notamment au Negro Community Centre.

Un centre communautaire où s’amuser et apprendre  

Cours de musique au Negro Community Centre, avec Daisy Peterson (à gauche).
Soupe populaire, Noël 1937. Mission Old Brewery (ancienne West End). Photo Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Fonds Conrad Poirier

L’ancienne église méthodiste West End de la rue Coursol, dans le quartier de Pointe-Saint-Charles, a été érigée en 1891. À partir de la fin des années 1920, elle est vendue à la mission Old Brewery, qui offre des services d’hébergement et des soupes populaires, comme celle de notre photo, prise au Noël de 1937. Au début du 20e siècle, le racisme et la discrimination, des phénomènes depuis longtemps inscrits dans la société, rendent difficile l’accès aux logements, aux emplois et aux services sociaux pour les personnes noires, notamment à Montréal. L’idée de former un organisme qui réponde aux besoins de la communauté se fait vite sentir. Le pasteur Charles H. Este fonde donc, en 1927, le Negro Community Centre. En 1955, le centre s’installe dans l’ancienne église West End en fusionnant avec l’organisme anglo-protestant Iverley. Les services sont offerts conjointement aux deux communautés jusqu’à la séparation des organismes, dans les années 1970. Le centre, qui continue d’offrir des cours de musique, des activités physiques, des cours pour adultes et des services de santé communautaires, occupera les lieux jusqu’en 1989. Daisy Peterson Sweeney y enseignera le piano à des centaines d’enfants du quartier durant environ 40 ans.

Un héritage à faire revivre  

Cours de musique au Negro Community Centre, avec Daisy Peterson (à gauche).
Murale de Kevin Ledo. Photo Olivier Bousquet

Daisy Peterson Sweeney jouait aussi de l’orgue et savait chanter. Elle s’impliquait dans les activités des églises du quartier. On lui doit aussi, avec l’appui de Trevor Payne, la création du Black Community Youth Choir, devenu depuis le Montreal Jubilation Gospel Choir, un chœur gospel montréalais de renommée internationale. Daisy Peterson Sweeney est décédée en 2017. Le centre a fusionné avec d’autres organismes et l’ancienne église, longtemps abandonnée, est aujourd’hui démolie. Or, la communauté noire est encore présente dans le quartier de la Petite-Bourgogne et l’héritage du Negro Community Centre se transmet à travers les organismes communautaires actuels. Il est possible que, grâce à la mobilisation de certains citoyens, l’organisme puisse bientôt revoir le jour sous la forme d’un centre culturel. D’ici là, Daisy vous sourit sur la magnifique murale de l’artiste Kevin Ledo, rue Saint-Martin.

-Chronique réalisée avec l’aimable collaboration de Steven High, historien, Université Concordia, et de David Shelton, président du centre culturel NCC/Charles H. Este.

  







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