Le père d’une fillette morte noyée appelle à la vigilance
Sa fille de 3 ans, Frédérique, a sombré dans la piscine familiale il y a dix mois
Coup d'oeil sur cet article
Le père d’une petite fille de 3 ans décédée par noyade l’été dernier lance un appel à la vigilance pour éviter que d’autres familles vivent un pareil drame, à l’approche de la saison estivale.
« Quand un enfant se noie, on pense tout de suite à de la négligence. Souvent, c’est plutôt une accumulation de circonstances accidentelles... En réalité, ça ne prend que quelques secondes. Il faut toujours être aux aguets parce que les enfants trouvent toutes sortes de manières d’échapper à notre surveillance », confie Christian Kaiser, qui tente, par son témoignage, « de donner un sens » à la tragédie qui a frappé sa famille.
Le 4 juillet, par un samedi d’été où le mercure effleurait les 30 degrés Celsius, la vie de sa famille a basculé.
On venait d’enlever la veste de sauvetage de sa petite Frédérique afin qu’elle puisse jouer sur le trampoline, indique le rapport du coroner André-H. Dandavino, rendu public cette semaine.
La fillette de 3 ans a échappé à la surveillance pour un court laps de temps avant d’être découverte inanimée dans la piscine adjacente à la ferme familiale, à Noyan, en Montérégie.
La piscine et le patio venaient tout juste d’être installés.
Un dispositif pour bloquer aux enfants l’accès à la piscine avait d’ailleurs été acheté quatre jours plus tôt, mais était en attente d’installation par l’entrepreneur.
« L’installation d’une piscine hors terre doit prévoir un système de barrière physique temporaire pour empêcher l’accès tant que l’installation n’est pas sécurisée », note le Dr Dandavino.
Un surveillant désigné
En plus de tous les dispositifs de sécurité existants, la vigilance est primordiale, insiste Christian Kaiser.
« Même avec une clôture de 4 pieds, un enfant peut pousser une chaise pour grimper. S’il porte une veste [de sauvetage], il peut aussi bien trouver une façon de l’enlever. Bref, ce sont tous des dispositifs nécessaires de plus, mais rien de cela ne remplacera la vigilance », insiste-t-il.
Il conseille ainsi aux parents de toujours désigner une personne pour surveiller lorsque des enfants sont en présence d’un quelconque plan d’eau.
« Le danger, c’est d’avoir plusieurs adultes autour d’une piscine, mais qui pensent tous que l’autre regarde, et vice-versa. Ça prend vraiment une personne désignée qui surveille », explique-t-il.
Afin de réduire les risques de noyade, Christian Kaiser croit aussi à l’importance des cours de natation dès le plus jeune âge.
« Le risque zéro n’existe pas, mais savoir nager, ça donne une chance de plus d’éviter un drame », soutient-il.
Faire sourire
Faire partager l’histoire de Frédérique afin de sensibiliser aux dangers de l’eau est pour Christian Kaiser une façon d’honorer la mémoire de sa petite fille.
« Frédérique aimait faire du bien et faire sourire les gens. Elle avait son côté tomboy. Elle venait dans la grange avec ses petites bottes et sa jupe, mais ce n’était pas grave si elle se salissait », se remémore-t-il avec un sourire dans la voix.
Celui-ci est également parent de trois autres enfants avec sa conjointe, Marie-Pier Lévesque.
L’été à venir soulève plusieurs inquiétudes
Le télétravail, un engouement pour les piscines et les sports nautiques ainsi qu’une saison estivale chaude et ensoleillée... les ingrédients qui ont mené à un lourd bilan sur le plan des noyades l’an dernier seront toujours présents cet été, laissant craindre le pire.
« Je suis obligé de dire, malheureusement, que tous les mêmes éléments sont là », s’alarme Raynald Hawkins, directeur général de la Société de sauvetage.
Rappelons que l’année 2020 s’est soldée par un triste bilan de 95 noyades comparativement à 58 pour l’année précédente, soit une augmentation de presque 64 %, selon les données préliminaires.
Encore cette année, les ventes de piscines explosent.
« Les vendeurs d’équipements de sports nautiques, comme de kayaks et de planches à pagaie, sont en rupture d’inventaire. Il n’y a jamais eu autant de location de chalets au Québec », cite en exemple M. Hawkins.
Et les experts météo annoncent des températures encore plus belles que l’été dernier, rapporte-t-il.
Attention au Télétravail
En raison de la pandémie, un nouvel ingrédient avait également fait son apparition la saison passée : le télétravail.
« Des États sud-américains ont démontré une corrélation entre la croissance du nombre de noyades au début de la pandémie et le télétravail. Ce n’est pas le temps de travailler sur le patio en surveillant la baignade. Si la piscine est ouverte, ça prend un sauveteur désigné. Sinon, la piscine doit être inaccessible », insiste M. Hawkins.
Il précise que les noyades chez les enfants représentent un phénomène silencieux de 20 à 30 secondes qui se déroule souvent à l’insu même des parents (voir texte ci-contre).
Des victimes qui sont jeunes
L’an dernier au Québec, les enfants ont été surreprésentés dans le bilan parce qu’au moins 12 jeunes de moins de 14 ans ont perdu la vie par noyade.
Parmi ces drames, 75 % se sont produits dans une piscine résidentielle.
« Je suis préoccupé, car ça fait un an qu’on n’a pas de cours de natation à cause de la COVID. De notre côté, c’est le deuxième printemps où on ne peut pas déployer le programme Nager pour la vie dans les écoles.»
« Plus d’enfants seront à risque », dit-il en souhaitant que les cours de natation soient une priorité pour les parents et les établissements scolaires dans la prochaine année.