«Chaos»: destins croisés sur fond de tragédie
Un concert, celui d’INVO (Simon Morin), idole de l’heure de la trempe de Simple Plan, qui rentre à Montréal après une triomphale tournée mondiale. Un concours organisé sur les réseaux sociaux, qui permet à 10 admirateurs invétérés d’assister au spectacle à partir de la section VIP. Puis, une tragédie, qui scelle et fait dévier les destins de tout ce beau monde, et dont on suivra l’avant, le pendant et l’après au moyen de «flashbacks» pendant 10 épisodes.
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Ce sont là les grandes lignes de Chaos, nouvelle série canon de TVA imaginée, coproduite (avec Amalga) et coécrite (avec un bassin d’auteurs, dont Gabriel Sabourin) par Josélito Michaud.
Même sous la torture, ce dernier ne révélera pas la nature du drame qui déclenche l’intrigue, ni comment celui-ci influe sur le parcours des différents protagonistes. On sait seulement qu’il y aura des décès et des blessés.
L’histoire de résilience et de reconstruction qu’est Chaos, réalisée par Stéphan Beaudoin, se déroule sur trois mois. Josélito Michaud jure qu’il n’y aura pas de suite et que les nombreux tentacules du récit seront tous bouclés au bout de 10 heures.
L’œuvre proposera aussi une réflexion sur les aléas de la célébrité.
«La tragédie va révéler que la gloire ne répare pas grand-chose. J’aime les paroles de Daniel Bélanger, qui dit que ce sont des calories vides. C’est un gros gâteau, qui ne nous remplit jamais...», illustre Josélito Michaud, citant l’auteur-compositeur qui a créé les chansons d’INVO pour les besoins de la série.
Amitié spontanée
Josélito Michaud est visiblement fier de son Chaos. Ses yeux s’enflamment lorsqu’il souligne qu’il s’agit d’une série chorale, «avec beaucoup de monde» (voir encadré), et que des choix déchirants ont dû être tranchés au montage pour condenser le tout en seulement 10 épisodes.
Les anecdotes se bousculent dans sa bouche, des dames qui lui ont fredonné «Le monde est chill...» en le croisant cet été, jusqu’à l’amitié spontanée qui s’est tissée entre les jeunes acteurs du projet dès le premier jour de tournage, au printemps. Plusieurs d’entre eux foulaient un plateau pour la première fois depuis la pandémie. En moins de deux, un grand pique-nique s’organisait au parc Jeanne-Mance (à quelques pas du Théâtre Rialto, où étaient enregistrées les scènes du concert au cœur de l’histoire), et les troupes de Chaos se sont retrouvées à former un immense cercle occupant un vaste périmètre du parc.
Josélito vante aussi l’immense talent de direction de comédiens du réalisateur Stéphan Beaudoin, sa douceur et son écoute. Et, il s’émeut encore davantage de s’étonner lui-même de la charge de travail imposée par la reconstitution du concert au Théâtre Rialto, qui a exigé une dizaine de jours de travail minutieux, complexifié, rappelons-le, par les restrictions sanitaires.
Tel est ton destin
Le grand thème à l’origine de Chaos? Le destin. Josélito Michaud se dit fasciné par ces revers de l’existence, qui nous emmènent à la bonne ou mauvaise place, au bon ou mauvais moment. «On n’a aucun pouvoir dans la vie, siffle-t-il. On a seulement le pouvoir de se relever ou non.»
Enfant de familles d’accueil, Josélito s’est jadis longuement questionné sur le sort de petits camarades croisés dans ses maisonnées temporaires. Le 4 septembre 2012, notre homme accompagnait Pauline Marois, alors nouvelle première ministre du Québec, qui devait traverser la rue Sainte-Catherine, du Théâtre du Nouveau Monde (TNM) au Métropolis (maintenant MTelus), en cours de soirée. Une pluie soudaine a contraint Madame Marois à emprunter une voiture pour s’y rendre. Et c’est ce caprice météo qui lui a permis d’éviter les premières balles prévues par le tireur Richard Henry Bain, posté à deux coins de rue...
Le drame du 11 septembre 2001, aux tours du World Trade Center, a aussi beaucoup hanté Josélito Michaud. «Des gens qui y travaillaient tous les jours, ce matin-là, n’y étaient pas, alors qu’un messager y mettait les pieds pour la première fois et en est mort...»
«Il y a quelque chose d’énigmatique, de mystérieux, là-dedans. Avec les auteurs, on voulait qu’à la fin de Chaos, tout le monde ait envie de profiter de la vie, maintenant. Si on savait que notre vie peut s’arrêter tantôt, peut-être qu’on profiterait davantage de nos moments. Ça peut être beaucoup plus court qu’on pense. On le voit aussi avec la COVID...»
La fin de son histoire, Josélito Michaud ne la voulait justement pas à la sauce Walt Disney.
«La finale va à la fois déranger et soulager. Parce que, dans la vraie vie, ça ne finit pas toujours très bien. Pour certains, oui, et pour d’autres, non. Mais chacun a sa résolution. Le 10e épisode a été long à écrire, parce qu’on a beaucoup réfléchi aux façons de résoudre une quête, dans la vie. (L’explorateur) Bernard Voyer disait: à chacun son Everest. Chacun a droit à sa petite montagne, et chacun a son objectif...»
La passion de Lysandre
Jasant destin, Chaos a un peu orienté celui de Lysandre Ménard, actrice principale de la fiction, découverte dans le film La passion d’Augustine, de Léa Pool, en 2014.
La pianiste et comédienne de 28 ans a étudié à Londres, à la Royal Academy of Music, où elle a complété une maîtrise, de 2017 à 2020.
Elle commençait à jeter les bases d’une carrière musicale là-bas en jouant dans des groupes et en lorgnant des postes d’enseignante dans des écoles, mais gardait toujours un pied à Montréal, hésitante à s’établir pour de bon dans la capitale anglaise. Un courriel de Josélito Michaud reçu l’an dernier, totalement inattendu, lui a confirmé que ses questionnements étaient fondés.
«J’avais le "feeling" que je n’avais pas tout terminé ici, raconte Lysandre. Le jeu me manquait beaucoup. Et les astres se sont alignés! J’ai reçu le courriel de Josélito, que je ne comprenais pas (rires). Et on a eu une rencontre par FaceTime, qui a changé beaucoup de choses...»
Le producteur avait remarqué la jeune Ménard dans «La passion d’Augustine» et lui offrait d’emblée le rôle d’Eugénie dans Chaos, sans audition.
«Je me suis beaucoup inspiré d’elle pour écrire la série, spécifie Josélito Michaud. Je l’avais en tête en écrivant ça. Il fallait qu’Eugénie soit une pianiste classique très rigoureuse, qui ne s’est jamais vraiment amusée. C’était clair que c’était Lysandre. C’était une évidence. On savait qu’elle n’avait pas joué depuis longtemps, mais on avait hâte de voir où elle était rendue...et son personnage a gagné en importance après qu’on ait vu ses performances.»
Lysandre Ménard lancera un album simplement intitulé Lysandre en 2022, et souhaite maintenant continuer à jouer comme comédienne.
Chaos prendra l’antenne de TVA et TVA+ le mardi 14 septembre, à 21 h. Un album dérivé de la série, réunissant une dizaine de voix féminines – Beyries, Mélissa Bédard, Cœur de Pirate, Véronique Béliveau... – sur des chansons connues et des compositions originales de Daniel Bélanger, sortira aussi cet automne.