La «maison des fous» d’une mère et de sa fille autiste
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Devant surmonter ses propres préjugés, ceux du reste de la société ainsi que les déficiences du système de santé et d’éducation, la comédienne Maude Laurendeau, qui est mère d’une enfant autiste, a écrit une pièce documentaire présentée chez Duceppe à la mi-novembre.
Son expérience est relatée dans Rose et la machine. La comédienne y joue son propre rôle avec, en face d’elle, Julie Le Breton qui incarne à elle seule les 43 autres personnages !
« J’ai été confrontée au système et à la difficulté d’obtenir des services à la suite du diagnostic de ma fille en 2017, dit-elle en entrevue téléphonique. Avec les listes d’attente, les rendez-vous, les informations contradictoires ou même le manque d’information, j’ai réalisé que la machine n’était pas faite pour répondre aux besoins de ma fille. Cela ressemble parfois à la maison des fous... »
Pour faire le suivi de tous ces rapports et rendez-vous pour sa fille, la comédienne avait commencé à prendre des notes et se bâtir un dossier. Puisque l’autisme varie d’un individu à l’autre et qu’il n’est pas encore totalement compris, elle est devenue petit à petit « la spécialiste du cas de sa fille ».
Puis un déclic a eu lieu en cours de route pour celle qui n’avait aucune idée de toute cette réalité avant le diagnostic de sa fille.
« Lorsque j’ai vu que je n’étais pas la seule à vivre tout cela, j’ai voulu en parler, ajoute-t-elle. Cela donnait du sens à ce qui m’arrivait. »
Théâtre documentaire
L’actrice avait participé il y a une dizaine d’années à la pièce documentaire Sexy béton qui traitait de la tragédie de l’effondrement d’un viaduc à Laval en 2006. Elle a donc fait appel à la même troupe, Porte Parole, qui avait produit ce spectacle et qui se spécialise dans ce genre de production.
« Je trouvais que cette forme de théâtre est une bonne façon de prendre la parole », mentionne-t-elle.
Grâce au dossier qu’elle a monté sur sa fille, à des entrevues réalisées avec des spécialistes ainsi qu’avec d’autres parents, la comédienne a écrit la première pièce de sa vie en puisant dans ses souvenirs et les éléments qu’elle a pu documenter.
« Tout passe à travers ma vision des choses, dit Maude Laurendeau. C’est mon parcours qui est mis en scène, pas celui de mes proches. »
Puisqu’elle joue son propre personnage, il s’agit de tout un défi, surtout du point de vue émotionnel.
« Ce n’est vraiment pas facile. Je n’ai aucune distance par rapport à mon sujet, déclare-t-elle. Mais je suis entourée par une équipe extraordinaire qui me réconforte. »
Reconnaître la différence
La comédienne espère que son œuvre permettra aux spectateurs de reconnaître la diversité et d’adapter le système en conséquence.
« Je voudrais qu’on se questionne par rapport à la différence. On n’a pas un rapport très sain avec la différence et on n’y est pas préparé. Plaquer de l’inclusion et de l’acceptation, cela ne fonctionne pas. Il faut y être sensibilisé. »
Elle estime que cette problématique touche aussi d’autres types d’enfants, comme ceux qui souffrent d’un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité. Ayant vécu un « mélange d’incompréhension et de tristesse » en voyant qu’il est si difficile d’avoir une place dans « notre monde », Maude Laurendeau est par conséquent fébrile de voir la réaction du public face à son œuvre.
« Je suis dans une période stressante parce que le spectacle n’a pas été encore présenté, confie-t-elle. Je connais le spectacle que je porte, mais j’en connais pas encore la portée. »
Elle aura bientôt sa réponse, car Rose et la machine est présentée dès le 17 novembre au Théâtre Jean-Duceppe.