Les fabuleux trésors de l’Oratoire
La réserve secrète de son impressionnant musée déborde de curiosités parfois déconcertantes
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Lorsque la rénovation du dôme de l’Oratoire en aura fait le plus haut point d’observation sur Montréal avec une vue à 360 degrés, la « porte d’entrée » où aller prendre l’ascenseur (où aller gravir les 434 marches de l’escalier si vous préférez) sera le Musée de l’Oratoire.
Celui-ci sera consacré au frère André, à Saint-Joseph, aux objets du rite catholique et, bien sûr, aux crèches.
D’ailleurs, le 28 novembre, l’Oratoire présentera une version réduite de son exposition de crèches de Noël, une première depuis le confinement.
« Nous avons plus de 1000 crèches et nous continuons d’en acquérir », révèle Chantal Turbide, la conservatrice du Musée de l’Oratoire, dont la réserve comporte quelque 30 000 objets, œuvres ou artefacts patrimoniaux.
Parmi les pièces importantes ou curieuses que j’ai pu contempler : la casquette en feutre du frère André et son fameux manteau, l’aiguille ayant servi à recoudre sa poitrine après l’extraction de son cœur, une dent de sainte Julienne (une molaire, selon mon amie dentiste), des dizaines de précieux calices et tabernacles soigneusement enveloppés, une quantité phénoménale de statues, de sculptures et de tableaux.
Ne me demandez pas où se situe cette réserve. J’ai juré à Mme Turbide de ne pas le révéler.
« Quand on conserve autant d’objets précieux, on se prémunit contre le vol », explique-t-elle.
Je sursaute devant un établi sur lequel reposent la tête et les mains du frère André, les modèles de cire ultraréalistes du défunt musée Grévin. Récupérée par l’Oratoire, cette statue figurera peut-être dans le nouveau musée qui occupera tout le cinquième étage.
Certaines statues de l’artiste québécoise Sylvia Daoust (1902-2004), qui ont longtemps été prêtées et exposées au Musée des beaux-arts de Montréal, ont été rapatriées et figureront probablement dans l’exposition.
Comme un butin de pirate
La pièce qui a des allures de trésor de pirate, c’est la salle des objets métalliques, souvent en argent ou en or. On y trouve des médailles, des calices (dans lesquels on boit le vin consacré), des ciboires (dans lesquels on met les hosties) et des tabernacles (dans lesquels on range les ciboires)...
« Une partie du musée va expliquer le rite catholique aux visiteurs qui, parfois, le connaissent mal ou pas du tout, grâce à ces objets », soutient Mme Turbide.
Lorsqu’elle est arrivée en poste, il y a 12 ans, la réserve avait des allures de capharnaüm ou de magnifique bric-à-brac. Elle a patiemment tout classé, tout catalogué, tout rangé.
« Certains objets nous ont mystifiés, comme des cierges recourbés qui se sont avérés des chandeliers de bénédiction des gorges pour la fête de la Saint-Blaise », s’enthousiasme Mme Turbide.
Le prêtre promenait la flamme près de la gorge du fidèle et priait pour qu’il ne contracte pas un rhume ou une grippe, un rituel complètement oublié de nos jours.
Ironiquement, les objets qui ont le plus de valeur dans le trésor sont probablement les humbles vêtements du frère André, qui ne possédait presque rien.
Les curieux devront prendre leur mal en patience, car le nouveau Musée de l’Oratoire devrait ouvrir en même temps que l’observatoire du dôme, dans quatre ou cinq ans.