Pour se protéger, l’humain doit prendre de meilleures habitudes et même utiliser les virus
Attention: maladies émergentes, un grand dossier
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Une armée de sentinelles pour nous protéger
Même s'il en existe des millions sur la Terre, les virus sont loin d'être tous dangereux. Certains peuvent même devenir un outil de surveillance ou encore aider à combattre des bactéries nuisibles.
Les changements environnementaux augmentent nos chances de contracter de nouvelles maladies, parce qu'ils entraînent plus de mouvements chez les animaux et les insectes porteurs de virus, de bactéries ou d'autres corps pathogènes.
Or, bien que ce soit difficile à croire après deux ans de pandémie, les virus peuvent également être utiles pour combattre d'autres nuisances dangereuses pour l’humain.
Car contrairement à la bactérie, un organisme qui peut se reproduire seul, le virus doit infecter une cellule pour se multiplier. Il s’agit de l’entité biologique la plus abondante sur la planète, puisqu’on dénombre environ 10 millions de virus — dont 10 000 différents — par goutte d’eau. Heureusement, très peu d’entre eux peuvent provoquer une maladie humaine.
Mais s’il existe des virus qui affectent spécifiquement les humains et les animaux, certains d’entre eux s’attaquent aux bactéries. On les appelle des bactériophages.
«Ce sont des prédateurs naturels. On pense qu’on pourrait peut-être les utiliser pour se débarrasser des bactéries qui sont pathogènes à l’homme», explique Sylvain Moineau, professeur titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les bactériophages à l’Université Laval.
Une guerre microbiologique
Surveiller un organisme
Ainsi, en surveillant les virus présents dans un environnement, on pourrait être informé de l’arrivée d’une bactérie dangereuse pour l’homme et prendre des mesures en conséquence.
«Ils sont utiles si on veut monitorer un organisme. Ils sont partout, abondants, et ils sont toujours en train de changer», précise-t-il, les comparant à des sentinelles.
Les changements climatiques entraînent la fonte des glaciers et le dégel du pergélisol, ce qui libère des microbes préservés dans la glace depuis plusieurs centaines d’années.
En Russie, un jeune garçon de 12 ans est notamment décédé en 2016 après avoir été infecté par la maladie du charbon, «l’anthrax», qui se trouvait préservée sur un cadavre de renne gelé. En s’intéressant aux changements des virus présents dans un environnement, on peut ainsi être informé de la présence d’une telle bactérie.
«Il y a des exemples un peu effrayants de bactéries libérées qui ont causé des maladies chez les animaux comme les caribous, mais il faut souligner le fait que c’est très rare», ajoute le chercheur.
Sauf que dans environ 25 ans, l’Arctique devrait être sans glace durant l’été, donc c’est maintenant — ou jamais — qu’il faut l’étudier, estime M. Culley.
«On doit comprendre les implications de ces changements pour nous protéger et pouvoir se préparer pour cette transition», martèle-t-il.
De petits gestes pour réduire les risques
On peut éviter de contracter bien des maladies en adoptant de bonnes pratiques. Voici quelques petits gestes à intégrer au quotidien pour réduire les risques d’en attraper, selon les experts.
1. La distanciation aussi avec les animaux sauvages
Nourrir un animal sauvage, le flatter, le manipuler, l’adopter: aussi mignon soit-il, il faut cesser ces comportements. Car si l’animal semble en santé, il peut quand même transmettre des maladies, prévient Ariane Massé, biologiste au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs. En plus, «en nourrissant des animaux, on favorise une agglomération d’animaux qui peut engendrer une propagation de maladies», ajoute-t-elle.
2. Pantalons longs et sentiers battus
Pour une sortie en nature, il faut porter des vêtements longs et un chasse-moustiques pour diminuer les risques d’être piqué par un insecte. Et lorsqu’on marche dans les hautes herbes ou si la nature est plus dense, on peut rentrer les pantalons dans les bas. Pas très fashion, mais efficace.
3. Se laver les mains
Il n’est pas nécessaire d’être en contact direct avec un animal pour tomber malade. Le lien avec un environnement souillé par des urines ou des selles peut suffire à transmettre des maladies. Carré de sable, poulailler, parc; il vaut toujours mieux se laver les mains régulièrement après avoir joué dehors.
4. Bonne cuisson
La viande mal cuite infectée est la source d’infection parasitaire la plus commune chez l’humain, explique Hélène Carabin, experte en parasitologie. Une bonne cuisson demeure un moyen efficace pour éviter la présence d’un malvenu.
5. Surveiller pitou et minou
Les animaux de compagnie peuvent aussi être des vecteurs de maladies et de parasites. Ces derniers sont souvent à l’interface entre l’humain, l’environnement et les animaux sauvages. Ils sont une porte d’entrée pour nous. Les propriétaires d’animaux de compagnie doivent suivre les conseils de leur vétérinaire pour la vaccination et les traitements.
6. S’examiner et consulter
Derrière les oreilles, la tête, les jambes; après une journée en nature, il faut s’examiner pour s’assurer de retirer tout insecte qui serait resté accroché. En cas de symptômes, il est important de mentionner l’événement à son médecin, pour lui mettre la puce... à l’oreille.
Apprendre à vivre avec les bêtes et adapter nos comportements
Les Québécois n’auront pas d’autre choix que de modifier leurs comportements pour apprendre à vivre avec certaines espèces d’animaux ou d’insectes porteurs de maladies, qui deviennent indélogeables une fois qu’elles s’implantent sur un territoire.
«On n’a plus besoin de voyager pour s’exposer [à des pathogènes étrangers]. Une fois que notre météo est favorable à l’implantation d’une espèce de tique, c’est un point de non-retour. C’est un changement qui est là pour rester», estime Catherine Bouchard, vétérinaire épidémiologiste spécialisée dans la maladie de Lyme.
Avec les changements climatiques, les bibittes du sud – insectes et animaux – migrent de plus en plus vers le nord, transportant avec eux leurs pathogènes, explique la vétérinaire.
S’il existe des plans d’intervention pour certaines maladies qui permettent de diminuer les risques de transmission, d’autres ne peuvent être évitées qu’en adoptant de bons gestes.
«On n’est pas trop interventionnistes dans l’environnement parce que c’est très complexe», commente Christopher Fernandez-Prada, responsable du laboratoire de parasitologie de l’Université de Montréal.