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De grandes luttes oubliées

Frères insoumis
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Entre les émeutes de la conscription à Québec et les mineurs en colère de la Virginie-Occidentale, le début du 20e siècle fut agité de bien des manières, foi des frères Leblanc emportés par ces mouvements.

Claude Vaillancourt est écrivain et musicien, mais il est aussi président d’ATTAC-Québec, un groupe qui lutte pour la taxation des transactions financières. C’est un artiste engagé. 

Ce sens de l’engagement colore son dernier roman, Frères insoumis. Il ne s’agit pourtant pas d’un manifeste, plutôt d’un récit palpitant qui met en scène deux jeunes hommes de Québec, happés sans l’avoir cherché par des luttes collectives.

Pour Adrien et Charles Leblanc, ça commence chez eux, au printemps 1918. Les jeunes Canadiens devaient s’enrôler pour ce qu’on appelait alors la Grande Guerre. Mais au Québec, celle-ci était si impopulaire que les demandes d’exemption pleuvaient, tout comme les entourloupes pour ne pas partir. L’heure était maintenant à l’arrestation des récalcitrants.

En réaction, tant à Montréal, Shawinigan et Québec, ça proteste et manifeste. Les frères Leblanc, tout juste 20 ans, en sont. Mais à Québec, ça vire à l’émeute en cette fin de semaine pascale et quatre civils sont tués. L’armée a gagné.

Pour échapper à la conscription, les frères Leblanc décident donc de fuir.

Ce sera d’abord vers Lowell au Massachusetts, là où les manufactures de textile ont un constant besoin de main-d’œuvre, comme le savent un million de Québécois partis travailler en Nouvelle--Angleterre. Ils y ont même recréé leur Petit Canada.

Mais des mésaventures amoureuses obligeront les deux frères à s’éclipser à nouveau. Cap sur les mines de charbon, qui cherchent des travailleurs. Après tout, ils ont le cœur vaillant et l’esprit à l’aventure.

En 1921, les Leblanc se retrouvent donc en Virginie-Occidentale, débarquant sans le savoir au cœur d’un conflit féroce entre les travailleurs et les sociétés minières. Chaque côté compte des milliers de partisans armés et en colère.

Sommés dès leur arrivée de choisir leur camp, les deux frères vont du côté des grévistes. C’est ainsi qu’ils participeront à la grande bataille du mont Blair, le plus important affrontement armé jamais survenu aux États-Unis hors la guerre de Sécession.

Luttes et solidarité

Claude Vaillancourt arrive à arrimer les tourments de garçons qui s’interrogent sur leur avenir à des événements qui dépassent leurs vies personnelles. La candeur des jeunes Québécois fait encore mieux ressortir la dureté du monde.

Le roman rend avec force le sens de luttes et de solidarités dont nous n’avons plus idée aujourd’hui. Le refus des Canadiens français de se plier aux ordres britanniques ; l’exténuant travail en usine ; l’exploitation des mineurs, mélange de gens du cru et d’immigrés.

Ces rappels historiques, détaillés, nous happent, davantage au fond que le destin des deux frères, tout solidaires sont-ils. Forts de leur jeunesse et d’un chez-soi, quartier Saint-Sauveur, où une famille les attend, ça finira bien pour eux. 

Mais pour les petits de ce monde, on peut encore – et Vaillancourt en témoigne par son engagement militant – se poser la question.

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