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Une résistance déjantée et tordue

Les relations de pouvoir portées au théâtre

Prospero
Photo courtoisie, Maxime Robert-Lachaine Emmanuel Schwartz donne la réplique à Lise Castonguay dans la pièce Quand nous nous serons suffisamment torturés.

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Originale et bien présentée, la pièce Quand nous nous serons suffisamment torturés explore de manière tordue et absurde les relations de pouvoir, particulièrement celles entre les hommes et les femmes, au Théâtre Prospero.

Le ton est donné dès la première des douze scènes, lorsque le personnage joué par Emmanuel Schwartz énumère ce que doit accepter sa captive, incarnée par Céline Bonnier. Au grand étonnement de ce mâle qui exige le respect en raison de son sexe, cette dernière résiste et remet en question son autorité, malgré des conditions matérielles généreuses et une dose de bienveillance.

S’ensuivent alors des tableaux où cet homme au caractère irascible et variable passe du dominant au dominé. Ces scènes marient l’humour, la colère, le sordide et le bizarre pour former une courtepointe singulière. Le public ne doit pas espérer un récit clair. La force du spectacle se trouve plutôt dans son côté inattendu et dans ses interactions incongrues entre personnages.

Mise en scène réussie

Monté pour la première fois en 2019 à Londres, ce texte du Britannique Martin Crimp s’inspire très librement du roman du 18e siècle de Samuel Richardson, Pamela ou la vertu récompensée

Christian Lapointe a traduit cette œuvre en plus d’assurer une mise en scène ingénieuse. Elle est marquée par un écran transparent placé devant les comédiens sur lequel sont projetées des images d’eux. Avec le décor en arrière-plan, cela donne un effet de superposition qui correspond à cette pièce empreinte de symbolisme, d’ironie et de deuxième degré.

Face-à-face à la hauteur

Le duo Emmanuel Schwartz et Céline Bonnier remplit ses promesses dans la peau de personnages troublés, qui naviguent entre manipulation et dépendance. Le comédien manie avec précision les variations soudaines d’humeur, tandis que l’actrice est convaincante avec celle qui ne s’en laisse pas imposer, mais qui veut quand même plaire.  

Jouant l’enfant du maître, Laura Côté-Bilodeau donne froid dans le dos. Elle se distingue notamment en interagissant de manière diabolique avec sa marionnette géante.

Dans un autre rôle secondaire, Lise Castonguay offre des moments candides sous les traits de cette domestique qui analyse volontiers son surpoids. Elle décortique les pour et les contre de sa masse, un sans-gêne qui contraste avec la grossophobie et la honte de son corps qui marquent notre société. 

Ce texte marqué par un récit fragmenté et des postures souvent caricaturales et irréalistes n’est pas pour tous. Mais cette façon inusitée de remettre en question les relations et nos comportements s’avère intéressante à ceux ouverts à ce genre d’exercice. 

Quand nous nous serons suffisamment torturés est présentée jusqu’au 5 mars au Théâtre Prospero.

  • Quand nous serons suffisamment torturés ★★★1/2

Une mise en scène de Christian Lapointe

Avec Céline Bonnier, Lise Castonguay et Emmanuel Schwartz 

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