MindGeek: une structure complexe pour obscurcir les traces?
Malgré un «amalgame de 48 filiales», le vrai centre de décision serait à Montréal
Coup d'oeil sur cet article
Le géant MindGeek, contrôlé depuis Montréal et dont la majorité des employés travaillent au Québec, possède une structure d’entreprise internationale très complexe qui soulève des questions, selon plusieurs recours.
• À lire aussi: Des allégations très troublantes contre PornHub
• À lire aussi: Le géant québécois de la porno ne paierait pas d’impôt
Le géant du porno soutient avoir son siège social au Luxembourg, en Europe, même si le PDG de l’entreprise, Feras Antoon, a dû expliquer en comité parlementaire à Ottawa l’an dernier que 1000 de ses 1800 employés travaillaient à Montréal.
Antoon est lui-même installé au Québec, tout comme David Tassillo, le chef des opérations de MindGeek, et Corey Urman, un autre cadre supérieur.
L’entreprise possède aussi des bureaux à Nicosie (Chypre), Londres, Bucarest (Roumanie) et Los Angeles, selon son site internet.
Des « analyses de la structure d’entreprise complexe de MindGeek font référence à une myriade de compagnies dans des pays tels que les Îles Vierges britanniques, le Canada, Curaçao, Chypre, l’Allemagne, l’Irlande, le Luxembourg, l’île Maurice, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et les États-Unis », allègue une demande de recours collectif amendée déposée au Québec en novembre.
« MindGeek utilise délibérément une structure d’entreprise complexe qui est un amalgame d’au moins 48 filiales », poursuit le recours. L’objectif serait d’échapper à des responsabilités et de dissimuler l’identité de ses propriétaires, selon la procédure.
Montréal au centre
D’autres procédures judiciaires consultées par notre Bureau d’enquête pointent aussi clairement Montréal comme le véritable centre de décision de l’entreprise, voire son siège social.
Une poursuite en Caroline du Sud parle de MindGeek comme d’une « compagnie canadienne ».
« MindGeek a tenté de manière trompeuse de se dissocier de ses propres entreprises [dont PornHub], en rapportant faussement que c’était uniquement “une compagnie de technologie qui ne filme ni ne produit aucun contenu adulte et est établie au Luxembourg, pas à Montréal” », allègue une poursuite en Californie.
« Cette structure d’entreprise internationale est conçue pour que vous ne sachiez pas qui possède quoi, et que vous ne puissiez pas voir derrière le rideau », commente l’avocat Michael Bowe.
En comité parlementaire, le numéro 2 de MindGeek, David Tassillo, a expliqué que la structure de MindGeek avait été héritée de l’ancien propriétaire de l’entreprise (appelée à l’époque Manwin), l’Allemand Fabian Thylmann.
Thylmann a été accusé en 2015 dans une affaire d’évasion fiscale en Europe. Il a dû payer 5 millions d’euros.
Mystérieux propriétaires
L’identité des propriétaires de MindGeek est aussi enveloppée de mystère. Il a été révélé seulement l’an passé qu’un certain Bernd Bergmair détiendrait la majorité de l’entreprise.
Bergmair est un ex-banquier de Goldman Sachs, selon les allégations d’une poursuite en Californie. Il aurait déjà menti sous serment pour cacher son identité, selon le recours. « Il y a des gens riches derrière cette compagnie qui ne veulent pas qu’on sache qui ils sont », nous a dit l’avocat Bowe.