Michael Rousseau s’excuse dans un français qui ne vole pas haut
Le patron d’Air Canada a affronté les élus fédéraux qu’il n’a guère convaincus
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Même s’il dit suivre des cours tous les jours, le patron d’Air Canada, Michael Rousseau, a eu beaucoup de difficulté à s’exprimer en français lors de son témoignage devant le comité permanent des langues officielles où il s’est excusé pour ses propos tenus l’automne dernier à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
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« Je suis désolé, je m’excuse encore ici et je prends la responsabilité de mes propos. Je regrette l’impact que cela a causé sur nos employés. Je suis déterminé à faire mieux », a-t-il dit, dans un français hésitant.
En novembre dernier, M. Rousseau avait créé un immense tollé après avoir fait peu de cas de l’importance du français chez Air Canada en marge d’une conférence devant les gens d’affaires.
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Cours peu fructueux
Lors de cette allocution, M. Rousseau avait inclus quelques phrases livrées laborieusement dans la langue officielle du Québec. Quelques mois plus tard, lors de son témoignage devant le comité, force est d’admettre que la situation ne s’est pas vraiment améliorée.
« J’aurais aimé prononcer une plus grande partie dans les deux langues officielles, mais ma capacité de parler le français n’est pas encore à la hauteur », a-t-il avoué.
Pourtant, le dirigeant affirme suivre des cours intensifs de français, de façon quotidienne.
« J’ai des cours tous les jours avec deux tuteurs différents. Ils me donnent des devoirs à compléter tous les soirs », a-t-il soutenu.
Réponses seulement en anglais
Mais les députés se sont montrés bien peu impressionnés par l’apprentissage du dirigeant.
« Non seulement sa présentation n’était pas à moitié en français et en anglais, ce qui est le minimum, mais aucune de ses réponses n’était en français », s’est étonnée la députée néo-démocrate Niki Ashton.
« Si après six mois d’apprentissage intensif du français, M. Rousseau ne peut pas répondre en français aux questions, c’est pas très rassurant », s’est aussi désolé le député bloquiste Mario Beaulieu.
Ce dernier aimerait que la loi 101 s’applique au transporteur qui est plutôt assujetti à la loi sur les langues officielles, qui vient d’être revue par Ottawa.
La moitié des employés bilingues
Le dirigeant s’est dit toutefois « sincère » dans son engagement à faire progresser le français au sein d’Air Canada, notamment par la création d’un département aux langues officielles, des propositions qui ont laissé les parlementaires sur leur appétit.
« Le chef qui est le pilote à bord ne semble pas être préoccupé. Si vous – et au conseil d’administration –, vous n’utilisez pas le français, comment vous pouvez descendre dans les autres niveaux de votre chaîne d’employés ? » s’est demandé le député conservateur Joël Godin.
Selon des vérifications faites par Le Journal, le Commissaire aux langues officielles a reçu plus de 2500 plaintes depuis novembre dernier. Une enquête est encore en cours.
Comité parlementaire : la loterie des cours de langue et autres moments marquants
◆ Jacques Gourde, député du PCC : Il n’y en a pas de formation linguistique à Air Canada. Je suis estomaqué, je suis vraiment estomaqué ! [...] Les 130 000 heures [de formation], on peut le diviser soit par 10, soit par 20, divisé par sept ans. Ça fait pas beaucoup d’heures par année. En tout cas, c’est une loterie recevoir des cours linguistiques par Air Canada. Il n’y en a pratiquement pas. C’est assez pour moi !
Michael Rousseau : Pas de réponse
◆ Mario Beaulieu, député bloquiste : Il y a la moitié des francophones au Québec qui ne parlent pas anglais, est-ce que vous engageriez un unilingue français à Air Canada ?
M. Rousseau : Oui, on embaucherait un francophone, nous embauchons selon les capacités et nous voulons embaucher le plus d’employés bilingues que possible.
◆ Joël Godin, député du PCC : C’est votre objectif [d’améliorer le français], c’était l’objectif de vos prédécesseurs également, mais ça ne marche pas, les résultats ne sont pas là, est-ce que vous pouvez vous réinventer, faire un lac-à-l’épaule ? Nous, ce qu’on veut, c’est de protéger le français.
M. Rousseau : Oui, je suis d’accord avec cette question, on a le même objectif, on va trouver d’autres mesures pour améliorer notre rendement. On a des comités internes qui s’en chargent.
◆ Arielle Kayabaga, députée du PLC: Quelles leçons avez-vous tirées de cette expérience-là ? Qu’est-ce que vous feriez mieux la prochaine fois ?
M. Rousseau: J’ai appris qu’il faut participer pleinement dans la société québécoise, et pour y arriver, il faut parler français et j’aurais dû l’apprendre plus tôt, c’est une erreur de ma part.