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En toute confidence: Mathieu Rheault

Mathieu Rheault
Photo Eric Myre

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Il nous a tous marqués lors de son passage à Star Académie, son talent remarquable et sa sensibilité touchante nous donnent juste envie de plonger dans son univers. C’est lors de mon passage au Manoir de Waterloo que Mathieu s’est confié sur les troubles alimentaires qui ont marqué sa jeunesse. 

Comment a débuté ton trouble de comportement alimentaire ?

Je pense que cette obsession de correspondre au standard masculin véhiculé dans la société était présente en moi depuis bien longtemps. C’est au cégep, à l’âge de 18 ans, que mon trouble s’est manifesté le plus clairement. Une peine d’amour m’a plongé dans un trouble alimentaire. J’étais très dur envers moi et je voulais un corps bien défini et sculpté. Si j’ai eu quelques semaines de privation intense (anorexie), j’ai ensuite vite plongé dans la boulimie. Je mangeais mes trois repas par jour, mais je courais aux toilettes pour me faire vomir ensuite, toujours à l’abri du regard des autres. À l’école, chez des amis, au restaurant, partout je visitais les toilettes pour éliminer les calories que je venais d’ingurgiter. Je ressentais énormément de culpabilité et surtout c’était un lourd secret à porter, car personne n’était au courant de la détresse que je vivais. 


Parle-moi de l’évolution de ta relation avec les aliments ?

J’ai pesé jusqu’à 220 livres, puis au cours de mes années de troubles alimentaires mon poids est descendu à 155 livres. Je travaillais alors comme caissier dans une épicerie et les commentaires des clients valorisant ma perte de poids n’ont fait qu’alimenter mon trouble. Le fait qu’ils me félicitaient pour le poids que je perdais me donnait envie de continuer à maigrir. Le secret était lourd à porter. Après trois ans de troubles intenses, j’ai fondu en larmes devant mes parents et je leur ai dévoilé mon lourd secret. Quelle libération ! Un peu comme mon coming out fait quelques années auparavant. Juste le fait d’en parler m’a fait le plus grand bien. Mes parents se sont montrés compréhensifs et aidants. Jusqu’à l’âge de 25 ans, j’ai quand même souffert de boulimie, mais la communication à mes proches a contribué à diminuer les crises. J’étais aussi heureux d’avoir enfin donné l’accès à cette partie de moi. 


Comment as-tu vécu tes cinq semaines à l’Académie ?

Le confinement à l’hôtel avant l’entrée à l’Académie s’est bien déroulé, car nous avions nos trois repas sans nécessairement d’accès illimité à des aliments. Malgré la solitude, je n’ai pas eu de débordements. L’entrée à l’Académie a été plus difficile considérant l’accessibilité en tout temps à un garde-manger bien rempli. Le stress bien présent et les montagnes russes d’émotions auraient pu être des déclencheurs de débordements alimentaires. Les repas étaient copieux et les collations de fin de soirée (pizza, pogo et autres) faisaient partie de notre quotidien. Le fait que nos horaires étaient très chargés m’a pourtant aidé à ne pas mettre trop d’accent sur la culpabilité alimentaire. En sortant de l’Académie, j’avoue avoir le sentiment que j’ai pris du poids et je travaille fort pour retrouver l’harmonie. 


Comment évalues-tu ta relation avec les aliments aujourd’hui ?

Avant la pandémie, je considère que j’avais atteint une stabilité physique et psychologique, je me sentais bien. La pandémie a été plus difficile réduisant mon accessibilité aux activités sportives. Je reconnais que je suis très exigeant envers moi-même et je dois travailler là-dessus. Mon chum m’aide beaucoup. Quand j’ai envie de me faire vomir, je réaligne mes pensées vers des pensées plus positives et des activités qui me font du bien. J’ai notamment un besoin de bouger, de faire du sport, ça m’aide beaucoup mentalement. Je n’ai aussi plus de balance, je ne me pèse plus pour ne pas entretenir d’obsession sur le poids, je suis bien plus qu’un chiffre sur la balance, je veux me sentir confortable dans mon corps sans viser de poids précis. Je suis conscient du long chemin parcouru et je ne veux plus revenir en arrière. J’essaie de ne plus être dans le « tout ou rien », mon chum me le rappelle constamment, ce n’est pas parce que j’ai mangé plus à un repas que ma journée est foutue. Si je vais beaucoup mieux aujourd’hui, je considère que je reste fragile et que la guérison c’est le travail d’une vie.


À quoi ressemble ton alimentation aujourd’hui ?

Je prends maintenant plaisir à déjeuner. Rôties, granola, café à la boisson d’avoine font partie de ma routine matinale. Je recherche des aliments santé et riches en fibres. J’ai rarement faim le midi, mais je prends des collations, des fruits, des noix, du yogourt notamment. Le soir, c’est un souper essentiellement végé, je ne mange de la viande que quand je suis invité, sinon, mon chum et moi on adore les protéines végétales. On choisit les recettes et on les cuisine ensemble. En soirée, on se fait souvent du maïs éclaté, à partir des grains et non des sachets commerciaux. Un petit plaisir qu’on prend plaisir à savourer.


Que dirais-tu aux personnes qui vivent avec un trouble alimentaire en secret ?

Je dirais que jamais personne ne va te juger comme toi tu peux te juger et qu’en confiant son problème à quelqu’un, on se libère d’un poids énorme et c’est la première étape vers l’harmonie. Il ne faut pas attendre d’être dans le pire creux pour se libérer. Si je me confie aujourd’hui c’est que je trouve important d’en parler, si je peux aider, à ma façon, les gens à se confier pour mieux se libérer d’un trouble alimentaire, je suis comblé.

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