Belles grosses bactéries poilues
Un spectacle combine l’animation 3D façon jeu vidéo et la microbiologie pour projeter des bactéries géantes
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Imaginez-vous un écran de cinéma en forme de dôme où sont diffusées des projections, un peu comme au planétarium. Mais au lieu de planètes ou d’étoiles surgissent des monstres hirsutes et de toutes formes : des bactéries.
Se plonger dans un bain de microbes géants n’est peut-être pas une raison habituelle d’aller au cinéma, mais, croyez-moi, ça en vaut la peine, visuellement.
J’aime le Planétarium et je ne veux pas dire du mal des étoiles, mais les bactéries offrent un bien meilleur spectacle !
Du moins, pourvu qu’on les grossisse des millions de fois pour les voir imposantes, colorées, belles et poilues.
Pour une fois, ce sont elles, les géantes. Et c’est nous qui sommes minuscules.
L’Infinité du minuscule
« Notre animation commence comme si on était dans l’espace, puis on se rend compte qu’on est plutôt dans l’infiniment petit », m’explique Mireille Camier, qui met en scène ce spectacle intitulé La poésie des bactéries : immersion dans l’infiniment petit.
« Ce que l’on pense être un environnement étoilé s’avère en réalité un bouillon de bactéries dans lequel on baigne. »
Cette expérience montréalaise, un partenariat entre l’Université de Montréal et la Société des arts technologiques (SAT), est-elle une première mondiale ? Probablement.
« Je n’ai jamais entendu parler d’une animation immersive de bactéries géantes comme celle-ci », dit l’animateur et microbiologiste Yves Brun, 60 ans, recruté par l’UdeM pour diriger un laboratoire en 2019 après une longue carrière à l’Université de l’Indiana.
Cet Acadien d’origine né dans un village de pêcheurs a eu la piqûre vers l’âge de 9 ou 10 ans quand ses parents lui ont acheté un microscope pour Noël.
Un demi-siècle plus tard, le professeur Brun a entrepris cet étrange projet qui utilise l’expertise en animation de jeu vidéo (typiquement montréalaise) pour montrer au grand public très clairement des créatures aussi méconnues qu’omniprésentes.
« Les bactéries géantes projetées sur le dôme calquent la réalité et sont à l’échelle », s’enthousiasme M. Brun.
Vulgarisation efficace
Lors de ma visite, le spectacle était en cours de création. Je ne l’ai donc pas vu finalisé. Mais ça promet.
En 2016, son laboratoire a publié une vidéo montrant une bactérie étirant un « bras » pour aller chercher un morceau d’ADN et le gober comme un morceau de maïs soufflé.
Même le New York Times a consacré un reportage à cette incroyable séquence devenue virale sur Twitter.
Chose rare, M. Brun manifeste autant la vocation de vulgarisateur de son savoir que celle de chercheur de pointe.
Il me raconte comment telle bactérie résiste aux radiations et colonise les réacteurs nucléaires, comment telle autre produit de l’électricité, telle autre de la lumière, ou comment telle autre recèle une boussole magnétique pour s’orienter, etc.
Le pouvoir des bactéries permettrait même de soigner certaines maladies génétiques.
Des milliards de ces bibittes invraisemblables peuplent votre corps. Pourquoi n’iriez-vous pas faire leur connaissance ?
► Du 12 au 22 avril, à 19 h, à la Satosphère.