L’effet canadien sur les soldats ukrainiens
Nos militaires ont entraîné plus de 33 000 Ukrainiens depuis 2015 pour le combat qu’ils livrent actuellement
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Les militaires ukrainiens doivent beaucoup au Canada dans leurs succès contre la Russie. Les Forces armées canadiennes les ont entraînés pendant plus de six ans, transformant l’armée ukrainienne en redoutable machine de guerre moderne.
« Les Canadiens ont été les plus nombreux à entraîner les Ukrainiens. Je suis convaincu qu’ils ont contribué en grande partie au succès que nous voyons maintenant », indique au Journal le major-général Mick Ryan, retraité de l’armée australienne, maintenant un auteur et conférencier, entre autres.
Entre 2015 et les derniers jours avant l’invasion russe, les Forces armées canadiennes (FAC) ont entraîné plus de 33 000 candidats des Forces de sécurité de l’Ukraine, dans le cadre de l’opération UNIFIER.
Au fil des ans, cette mission de formation est devenue un emblème de la relation de sécurité entre le Canada et l’Ukraine. Bien que le Canada ait envoyé peu d’armes par comparaison à d’autres pays, sa contribution humaine est unique.
Adieu, méthode soviétique
Les Canadiens, dont 800 Québécois, ont guidé les Ukrainiens dans tous les domaines, des rudiments du métier de soldat aux compétences avancées en ingénierie et en médecine. Des Suédois, des Danois, des Américains et des Britanniques leur ont aussi prêté main-forte.
« Leur objectif était la modernisation de leurs forces dans le but de devenir un jour membre de l’OTAN, de sortir du paradigme soviétique », explique au Journal le lieutenant-colonel des FAC Jeffrey Toope, qui a dirigé l’opération entre octobre 2019 et avril 2020.
L’objectif est clairement atteint, estime le major-général Ryan, qui est aussi analyste affilié au Center for strategic and international studies, à Washington.
Il explique que les Ukrainiens se battent maintenant de façon très différente des Russes. Comme les forces de l’OTAN, ils sont par exemple capables d’opérer en petites unités indépendantes sans attendre des ordres d’un commandement centralisé, ce dont les Russes semblent incapables.
Grâce à cet enseignement, si elle continue de recevoir des armes suffisamment puissantes, « l’Ukraine pourrait réaliser l’une des plus belles victoires militaires de l’ère moderne », estime M. Ryan.
Leçons du Donbas et d’Afghanistan
Interrogé par la chaîne ukrainienne UATV en 2019, le lieutenant-colonel Frédérick Côté expliquait que le conflit dans le Donbass, un territoire séparatiste prorusse de l’est de l’Ukraine en guerre depuis 2014, était un formidable moteur d’apprentissage.
« Ce qu’ils nous disent [les soldats qui reviennent du Donbass] est précieux, parce que ça nous permet de rendre l’entraînement plus pertinent », disait-il.
Les Canadiens ont aussi transmis les leçons de l’Afghanistan, où ils se sont démarqués en médecine de guerre : l’hôpital de Kandahar a connu le plus haut taux de survie jamais enregistré, sous la gouverne du major Marc Dauphin.
« J’aime penser que ce que nous avons enseigné à sauver des vies maintenant », souffle M.Toope.
L’opération UNIFIER en chiffres
- 33 346 candidats des Forces de sécurité de l’Ukraine (SFU) ont participé à la formation
- 800 militaires de la base de Valcartier, près de Québec, ont participé
- 726 cours donnés
- 200 militaires canadiens déployés en relais tous les six mois depuis 2015
- 890 millions $ investis