Premier Acte: un huis clos direct et brutal
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Inspirée par les conditions de remise en liberté de l’animateur Jian Ghomeshi, accusé d’agression sexuelle en 2014, la pièce Disgrâce est un direct, foudroyant, en plein visage. On ne prend pas position. On expose les faits. Brutalement.
À l’affiche jusqu’au 7 mai à Premier Acte, cette création de la compagnie La Trâlée raconte l’histoire d’une mère qui accepte d’accueillir chez elle, pour la durée des procédures judiciaires, son fils, un animateur vedette accusé d’agression sexuelle. Le huis clos est intense et puissant.
Mis en scène par Gabriel Cloutier Tremblay, le texte de Nadia Girard Eddahia, parsemé de silences, résonne dans la petite salle de 80 places.
Les 85 minutes, sans aucune longueur, de Disgrâce débutent avec l’arrivée de Thomas Perron chez sa mère. Un homme visiblement brisé.
Solidement interprétée par Marie-Ginette Guay, la mère est heureuse. Elle retrouve un fils qu’elle a perdu depuis son ascension dans le paysage médiatique. Pour elle, les retrouvailles sont presque heureuses.
Son fils, accusé d’avoir agressé deux femmes, a été victime, précise-t-elle, de petites chipies et de « vaches » jalouses. Elle le défend. Il ne peut pas être coupable.
Pas de gants blancs
Joué par Gabriel Fournier, « Tom-Tom » est un personnage plus grand que nature. Il se considère comme une victime. Son avocate l’empêche de s’expliquer dans les médias. Frustré, il insiste. Il tient à donner sa version.
Une troisième victime s’ajoute. La mère ressent tout à coup une haine à l’endroit de son fils dans son petit village. Ça jase.
Son avocate, excellente Frédérique Bradet, croit avoir trouvé une faille. La crédibilité des victimes, qui auraient été consentantes, dont on entend des extraits de témoignages, sera attaquée lors du procès.
L’équilibre de Thomas, frustré d’avoir tout perdu, est fragile. Impulsif, il explose et le démontre, lors d’une simulation d’entrevue initiée par son avocate.
À quelques jours du procès, la mère réalisera, lors d’un face à face tout en intensité, la gravité du problème de son fils. Un point de non-retour.
La trame sonore, remplie d’effets sonores, amplifie le sentiment de tension. On retrouve une séquence fort étrange et intéressante, lors d’une insouciante séquence de danse mettant en vedette l’accusé, sa mère et l’avocate, au son d’un succès disco déformé des années 70.
Il n’y a pas de gants blancs. On expose les faits. Directement et brutalement. Disgrâce fesse fort. C’est bien joué, très bien rendu et dans l’air du temps. La proposition la plus forte, jusqu’à maintenant, de la saison 2021-2022 de Premier Acte.