La CSN et la FTQ contre le partage des pourboires dans les restos
Les centrales syndicales estiment que le vrai problème, c’est les salaires trop bas
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Dans le tout dernier débat entourant les pourboires, les deux plus grandes centrales syndicales du Québec croient que ce n’est pas aux serveurs à partager leurs revenus, mais bien à l’employeur d’augmenter les salaires en cuisine dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre.
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Dans une lettre publiée ce matin sur le site web du Journal, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) se disent contre le partage des pourboires.
«C’est comme si on se partageait la misère. Pourquoi ça serait aux serveurs et serveuses de partager leurs pourboires alors qu’ils ont un salaire de 11,40 $ de l’heure?», lance le patron de la FTQ, Daniel Boyer, lors d’une entrevue avec Le Journal.
Toutefois, selon les données de l’Association Restauration Québec (ARQ) qui plaide pour le partage, les serveurs ont touché en moyenne 35,92 $ de l’heure (avec pourboires) l’an passé. En comparaison, un chef cuisinier obtenait 23,14 $ de l’heure, et un plongeur, 15,07 $.
Mais ces chiffres ne donnent pas le vrai portrait de la situation, croit M. Boyer.
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«Dans les grands restaurants, c’est sûr que les serveurs font des payes pas mal intéressantes. Mais la grande majorité ne travaille pas dans les Toqué ou les Joe Beef. Dans un Jarry Smoked Meat avec une facture de 20 $, le pourboire ne sera pas ben gros», lance-t-il.
Même son de cloche pour la présidente de la CSN, Caroline Senneville, qui représente plusieurs milliers d’employés dans le secteur de l’hôtellerie.
«Quand tu travailles sur une terrasse et qu’il pleut toute la semaine, tu restes pris avec ton 11,40 $ de l’heure. Il ne faut pas oublier que le métier de serveuse-serveur, c’est encore très précaire», explique-t-elle.
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Hausser les salaires
Selon les centrales, les employeurs devraient plutôt majorer les salaires des autres travailleurs, notamment des cuisiniers qui ont eu une augmentation de 10 % « seulement au cours des deux dernières années ».
«On est conscient que ce n’est pas facile dans le milieu de la restauration, mais c’est aux restaurateurs à les payer adéquatement. Tout ne doit pas reposer sur le salaire des serveurs», lance M. Boyer.
Selon les syndicats, le partage des pourboires avec les cuisiniers ne réglerait pas le problème de pénurie dans la restauration.
«La difficulté de recrutement qu’on voit en cuisine va se déplacer au personnel en salle. On aura de la difficulté à trouver des serveurs», prédit Mme Senneville.
En outre, les centrales craignent par-dessus tout que l’employeur se retrouve avec le gros bout du bâton si Québec décide de changer la Loi sur les normes du travail.
«Dans plusieurs restos, il y a une entente pour le partage et ça fonctionne. Notre peur, c’est que l’employeur décide que lui-même pige dans l’assiette, on a déjà vu cela», dit M. Boyer.
«La loi des normes du travail explicite déjà très clairement qui est le travailleur à pourboires. Ils ont un salaire différent et ça revient à ces personnes-là, entre elles, de déterminer la part qu’elles veulent donner», plaide Mme Senneville.