Santé et sécurité au travail: les Québécois interpellés par leurs droits
Les innombrables répercussions de la pandémie de COVID-19 ont engendré un très vif regain d’intérêt pour ces enjeux dans la population
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La crise sanitaire et la pénurie de main-d’œuvre ont fait basculer les Québécois vers le télétravail en leur ouvrant les yeux sur les enjeux de santé mentale et de sécurité au travail, estime un avocat, qui publie une nouvelle édition de son livre à succès portant sur ces enjeux.
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«Les gens sont beaucoup plus préoccupés par la santé et la sécurité au travail», résume Bernard Cliche, avocat et coauteur de Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles : aspects pratiques et juridiques, qui vient de faire l’objet d’une neuvième édition, à la fin août.
En pleine pandémie, la question explosive du vaccin au travail a suscité de vifs débats opposant les droits fondamentaux et les droits collectifs, qui ont fini par l’emporter, souligne l’avocat, dont le guide pratique publié aux Éditions Yvon Blais fait office de bible en la matière depuis sa première édition en 1985.
«C’est quelque chose parce qu’auparavant, au Canada surtout, on a eu des gouvernements qui misaient beaucoup sur les droits individuels», souffle-t-il.
Guide pratique
Au Journal, l’expert insiste : l’acheteur type de son livre est moins un avocat qu’un représentant syndical ou une personne aux ressources humaines, qui a soif de lumières pour voir clair dans des cas concrets.
Avec la réforme du ministre du Travail, Jean Boulet, Bernard Cliche sentait le besoin de produire une nouvelle mouture de l’ouvrage pour bien cerner les modifications majeures à la loi, qui ont un impact réel chez les travailleurs.
Ces derniers mois, l’omniprésence du télétravail a permis de révéler au grand jour jusqu’où vont désormais les nouvelles dispositions de la loi.
«Dans le cadre du télétravail, l’employeur doit prendre des mesures pour que l’employé ne subisse pas de violences conjugales à la maison. Ça va loin», illustre Bernard Cliche.
En d’autres mots, un patron doit aujourd’hui s’assurer que son employé(e) ne se trouve pas au centre d’un manège toxique de violence familiale.
Sans surprise, la place accordée aux blessures psychologiques est également centrale à l’ère où le harcèlement fait les manchettes des journaux.
«On élargit la notion de lésion psychologique pour rendre la preuve plus facile», explique Bernard Cliche.
Des évolutions pour le mieux
Fini le temps où les travailleurs sous le choc devaient pédaler et se fendre en quatre pour démontrer qu’ils ont bel et bien subi un traumatisme au boulot.
«Par exemple, un pompier ou un ambulancier qui trouve un enfant mort dans un accident d’auto, c’est tragique. Avec la réforme, la loi rendra plus facile de démontrer que l’on a eu un choc», poursuit-il.
D’après l’avocat, la santé mentale sera le défi des prochaines années, autant en indemnisation qu’en prévention.
Dès le mois prochain, la loi donnera plus de dents à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).
«Ce qui est nouveau, c’est la possibilité pour la CNESST de forcer les employeurs à faire des démarches supplémentaires pour garder leurs travailleurs avec des limitations fonctionnelles», conclut-il.
Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles : aspects pratiques et juridiques, Bernard Cliche, Claire Fournier, Karine Dubois et Carolane Pétrin, 9e édition, Montréal : Éditions Yvon Blais, 2022.