«Soyez francs!» dit le roi des menteurs
Gagnant d’un coucours de menteries, il a des conseils pour nos candidats en campagne électorale
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine
Le mensonge et la fausseté en politique ne sont pas aussi électoralement payants qu’on pourrait l’imaginer, estime une sommité internationale en menterie.
«Je dis aux politiciens tentés de mentir ou de jouer un rôle : n’essayez même pas, vous ne l’avez pas, l’affaire... laissez ça aux professionnels!» s’exclame le conteur et vulgarisateur historique Éric Michaud.
Le mois dernier, lors d’un concours de menteries organisé depuis 1748 à Moncrabeau, dans le sud-ouest de la France, où siège une Académie des menteurs, le Québécois de 48 ans a affronté d’autres rois de la menterie, lauréats d’éditions précédentes.
Il a gagné.
Le voilà donc sacré rien de moins que «roi des rois des menteurs»...
L’art de mentir
«C’est un art oratoire en soi, la menterie, c’est une forme de conte où tu flirtes avec la réalité, mais pour t’en détourner» m’explique ce menteur aguerri qui est aussi, par ailleurs, le fondateur de la Confrérie des menteurs du Québec.
Pour le public français, M. Michaud a inventé une histoire de truite à fourrure et de canards surpris par le froid en pleine nuit dans leur sommeil qui s’envolaient tous ensemble en soulevant la glace avec eux...
«C’était des menteries taillées sur mesure pour des Français du sud qui ont des notions clichés du Québec, et ça, cette manière de cibler un groupe et d’adapter son histoire pour se conformer à ses attentes, ça ressemble beaucoup à nos politiciens en campagne», dit-il faisant référence à la campagne électorale qui bat son plein au Québec depuis le 28 août.
Syndrome de la radio no 1
«Tous les partis se veulent hyper importants et meilleurs que les autres, exactement comme toutes les radios se vantent d’être no 1, ça, c’est inévitable, mais les gens ne sont pas aussi crédules qu’on veut le croire et les journaux comme le tien veillent à vérifier les affirmations.»
Et selon lui, il ne faut pas non plus prendre les gens pour des cons.
Les gens ont un détecteur de fausseté et ils savent quand c’est exagéré à des fins de dramatisation... et ça n’aide pas vraiment les politiciens qui jouent de la sorte, quoi qu’en pense leur équipe de communication!»
Diplomatie de la menterie
Le roi des menteurs juge que l’on accable injustement les politiciens puisque, sans un certain degré de mensonge, la vie sociale serait impossible.
«Si tout le monde commence à dire toujours toute la vérité, il y aura une guerre dans une semaine. Et il n’y aura plus de couples dans deux semaines!»
Une des forces de François Legault depuis son élection a été, justement, sa promptitude à reconnaître ses gaffes et à faire soudainement marche arrière.
«Traditionnellement, les politiciens refusaient de reconnaître une erreur et, en voulant sauver la face, ils se rendaient ridicules!»
Ironiquement, le roi des menteurs recommande donc aux politiciens de se montrer... francs!
«Personne ne vous demande d’être parfaits et de tout savoir, soyez vous-mêmes!»