Carnet de campagne: Semaine 1
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Nos journalistes sont montés à bord des cinq caravanes des partis politiques qui sillonnent les routes du Québec jusqu’au 3 octobre. Chaque dimanche, Le Journal vous présente les coulisses de ce périple électoral.
PSPP et le yogourt
Lors d’une conférence de presse mercredi dans le stationnement d’un Maxi, à Montréal, le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, expliquait qu’en raison de l’inflation, sa femme n’avait pas acheté de yogourt grec à la vanille, son préféré. « [Le pot] était à 7 $ et quelque chose, presque 8 $. [Ma femme] m’a dit “je l’ai pas acheté, ça n’a pas de bon sens”. »
De passage à Gatineau, vendredi, au Holliday Inn où l’équipe séjournait quelques jours plus tard, que trouvait-on dans le frigo du buffet ? Du yogourt grec à la vanille. Inclus dans le prix de la chambre. Ben oui.
−Annabelle Blais
On a trouvé le « vrai chef » de QS !
Les journalistes ont eu toute une surprise, mardi, en voyant apparaître le visage de leur «nounou d’autobus» à LCN. Le jeune homme chargé de chouchouter les journalistes est en fait le vrai chef de Québec solidaire !
Jean-François Lisée a lancé une attaque devenue célèbre, au Face à face de TVA en 2018, en demandant à Manon Massé : « Qui tire les ficelles à Québec solidaire? ».
Le moment était peut-être mal choisi (en plein segment sur la santé), mais la question demeure pertinente.
À QS, les «porte-paroles» que sont Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé n’ont ni le titre, ni officiellement les pouvoirs d’un chef, au sens de la loi électorale.
Celui qui peut approuver ou expulser les candidats, c’est Nicolas Chatel-Launay, un jeune homme de 32 ans à la voix douce qui s’occupe d’organiser les chambres d’hôtel, de réserver les restos, de remplir le frigo ; autrement dit, de garder les journalistes heureux.
Sa présence est toutefois pratique, et permet de le questionner lorsque ressurgit, par exemple, l’histoire du candidat expulsé pour ses propos anti-wokes.
La fin de Québec « solitaire »
Pour la première fois de son histoire, la campagne de QS est suivie à temps plein par une caravane de journalistes. Dans le passé, le parti peinait à attirer les médias, si bien que Le Devoir, seul dans l’autobus, avait titré : « Solitaire parmi les solidaires ».
Avec dix députés désormais, et une chance théorique de former l’opposition officielle, QS mène cette année « la plus grande campagne électorale de son histoire », dixit Gabriel Nadeau-Dubois.
Le parti a commencé la semaine en Estrie, avant de visiter Montréal, Québec, puis de s’offrir un tour de la Gaspésie, avec des arrêts dans le Bas-du-Fleuve. QS ambitionne cette année de faire des percées dans l’Est-du-Québec, autrefois le fief du Parti Québécois.
Mais ça vient avec un certain recentrage du discours. Exit le désarmement de la police. Pas question, non plus, de fermer la cimenterie McInnis, pourtant le plus gros pollueur au Québec. Gabriel Nadeau-Dubois parle plutôt de protéger les travailleurs, tout en forçant l’entreprise à réduire ses émissions.
On ne gagne pas une élection en promettant des pertes d’emplois.
−Patrick Bellerose
La cohabitation tranquille
Éric Duhaime fait campagne dans le même autobus que les journalistes qui le suivent. C’est un autobus bleu, qu’on appelle à la blague «liberté 125» ou «le convoi de la liberté».
Un vieux modèle, qui aurait 13 ou 14 ans.
«C’est le bus qui a coûté le moins cher, dit fièrement le Directeur exécutif du parti, Raffael Cavaliere. Un vrai bus de conservateur».
Au-dessus de nos têtes, il y a des compartiments à bagages vides, à l’exception d'un ou deux dans lesquels il y a des boites de barres tendres et des San Pellegrino à l’orange et à la poire, un breuvage un peu surprenant.
Les journalistes se sont naturellement placés dans les bancs du centre du car, comme s’ils fuyaient naturellement les extrêmes. La plupart du temps, nous travaillons en silence.
Derrière nous, Duhaime et son entourage voyagent dans un petit salon, dont la porte grise demeure fermée plus souvent qu’autrement.
Là, le chef conservateur lit les journaux, il prend des notes sur des petits bouts de papier jaune, il participe à des entrevues par téléphone ou par visioconférence, il joue parfois à un jeu vidéo, mais on ne veut pas nous dire lequel.
Vers 14h, l’attaché de presse du parti, Cédric Lapointe, quitte le cubicule pour venir nous annoncer sur un ton grave qu’il vient d’obtenir des informations importantes, souvent à propos de pancartes qui ont été vandalisées.
Quelqu’un ici a soumis l’hypothèse qu’il cherche à nous garder occupés.
À de rares occasions, le chef sort lui aussi de son antre pour venir échanger avec les journalistes.
Ça dure quelques minutes, puis il retourne préparer ses annonces à l’arrière, et on ne l’entend plus.
Si on a une question, il n’y a qu’à cogner à la porte.
Dans les autres autobus de campagne, les journalistes reçoivent de l’information à l’avance.
Cela leur permet de préparer quelques lignes et de tenir leurs lecteurs informés le plus rapidement possible.
Ici, les communiqués de presse arrivent souvent sur le tard, parfois même quelques heures après l’événement, et il faut se montrer poliment achalant pour obtenir des informations d’avance.
Duhaime prépare ses annonces jusqu’à la toute dernière minute.
Ce n’est pas, selon mon impression, qu’il n’est pas prêt, c’est qu’il se prépare constamment.
Au premier jour de campagne, on nous avait dit que le chien de Duhaime, Mia, serait avec nous dans la caravane à peu près tous les jours.
Ce n’est pas le cas, elle n’est venue que vendredi.
«Après la première journée, elle était tellement fatiguée que j’ai décidé de la laisser à la maison. Elle viendra peut-être de temps en temps», confie le chef conservateur.
Bref, je dirais que c'est une cohabitation tranquille.
−Gabriel Côté