Pour éviter que le Vieux-Beloeil ne devienne le «Nouveau-Beloeil»
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Préoccupée par la disparition progressive de son patrimoine bâti, la Ville de Beloeil entend prendre tous les moyens pour le préserver. Pour ce faire, elle compte prochainement citer en bloc 55 bâtiments anciens d’intérêt.
La municipalité de la Montérégie a déposé un projet de règlement afin de protéger les façades extérieures de ces immeubles qui sont pour la plupart situés dans le Vieux-Beloeil ou en bordure de la rivière Richelieu.
«Lorsque je suis arrivée à Beloeil en 2007, les vieilles maisons sur bord de l’eau et la montagne m’ont séduite. Il y avait un cachet, une âme. Avec le recul, je constate que notre patrimoine s’étiole peu à peu. Je me sens le devoir comme municipalité d’en prendre soin et de préserver ces beaux bâtiments», lance la mairesse Nadine Viau.
Cette dernière observe à regret que le Vieux-Beloeil se transforme tranquillement en «Nouveau-Beloeil».
Des municipalités québécoises ont déjà cité des bâtiments en tant que biens patrimoniaux, mais aucune d’entre elles n’en a cité 55 d’un seul coup, avance la mairesse qui reconnaît que cette décision s’avère audacieuse.
«Nous voulons lancer un message important à la population: le patrimoine bâtiment, le jour où il est démoli, il est parti à jamais. C’est tellement facile détruire un bâtiment patrimonial, ça prend à peine une demi-journée», dit-elle.
La mairesse a pu voir de près la difficulté des villes à protéger leur patrimoine bâti lorsqu’elle a travaillé pendant quelques années pour le service d’urbanisme de la Ville qu’elle dirige aujourd’hui.
«Nous n’avions pas des règlements assez forts pour nous opposer à la démolition d’un bâtiment patrimonial alors que les élus et l’administration ne voulaient pas que ce bâtiment soit démoli. Nous étions obligés d’accepter la demande du promoteur parce qu’elle répondait à tous les critères en place», se souvient-elle.
Une église et une maison de la culture
Les immeubles ciblés pour une protection municipale ont une valeur patrimoniale «forte», «supérieure» et «exceptionnelle». Parmi eux, il y a une église, une maison de la culture et plusieurs résidences privées. D’autres bâtiments sont des restaurants, des bureaux de professionnels et des commerces de services. Pour les choisir, Beloeil s’est basée sur un rapport réalisé en 2015 par une firme spécialisée en patrimoine culturel.
Les propriétaires ont été avertis au début de l’été de l’intention de la Ville. Ils pourront se faire entendre lors d’une consultation publique le 14 septembre, soit quelques semaines avant que le règlement entre en vigueur.
La mairesse Viau dit vouloir accompagner des propriétaires avec des outils et des pistes de solution pour s’assurer que l’extérieur des bâtiments soit protégé. D’ailleurs, des subventions leur seront accessibles, car la Ville a adhéré à un programme de soutien au milieu municipal en patrimoine immobilier de la MRC de la Vallée-du-Richelieu.
Rappelons que la protection du patrimoine immobilier a été renforcée l’an dernier avec l’entrée en vigueur de modifications à la législation mises de l’avant par la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy dans la foulée d’une série de démolitions d’immeubles patrimoniaux très médiatisées ces dernières années.
En vertu de ces modifications, les MRC sont maintenant tenues «de se doter d’un inventaire des immeubles qui présentent un intérêt patrimonial sur leur territoire» et «les municipalités sont [...] tenues d’émettre des avis publics, de tenir des consultations et d’informer la ministre de la Culture et des Communications en cas de demande de permis de démolition», avait précisé le cabinet de la ministre au moment de leur entrée en vigueur le 1er avril 2021.