L’achat de produits usagés ne rime plus avec pauvreté
Deux Québécois sur trois achètent des objets de seconde main, selon un sondage
L’inflation fait grimper le coût de la vie pendant que les salaires ne suivent pas, ce qui rend les objets de seconde main attrayants. Les Québécois en sont très friands, révèle une nouvelle enquête.
Ils sont deux sur trois à avoir acheté, vendu, donné ou reçu des biens usagés entre mai 2021 et mai 2022, indique un sondage réalisé par le magazine Protégez-vous, qui consacre une bonne partie de sa prochaine édition au sujet.
« Le marché de seconde main n’a jamais été aussi accessible », écrit la journaliste Amélie Cléroux.
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Elle démontre dans son dossier comment il est possible d’économiser, et d’économiser beaucoup, en achetant de l’usagé.
Pour cinq essentiels pour bébé, soit une poussette, des couches lavables, un tapis d’éveil, un lit et une chaise haute, elle a réussi à épargner 869 $ comparativement au prix du neuf.
Et pour un premier appartement – ensemble de salle à manger, divan et bibliothèque –, on parle d’économies de 1009 $.
Pas juste internet
Marketplace, qui émane de Facebook et appartient à Meta, est de loin l’option la plus populaire auprès des Québécois.
Mais il y a aussi les magasins comme ceux de Renaissance ou de la Société de Saint-Vincent de Paul (SSVP).
Ces OBNL reçoivent des dons et les mettent en vente. Avec les profits, ils paient des salaires décents et créent des programmes sociaux.
« On aide 2000 personnes par année avec notre mission sociale », reconnaît du bout des lèvres le directeur général de Renaissance, Éric St-Arnaud, pas vraiment connu pour se péter les bretelles.
Il voit bien que la clientèle change.
« On a longtemps été associés à la pauvreté et c’est de moins en moins le cas », dit-il.
À la SSVP, on fait le même constat.
« On travaille fort pour redorer notre image, pour la rendre plus jeune et plus orientée vers l’expérience client », énumère avec passion Valérie Gagnon, nouvelle directrice depuis 1 an.
Croisée hier chez Renaissance, Etna Jarquin ne va pas s’en plaindre.
« J’aime ça venir ici. Je suis étudiante, et ça me permet de m’acheter des beaux morceaux de vêtements pour pas grand-chose », dit la Mexicaine de 28 ans, sourire aux lèvres.
Arrivée au pays il y a 5 mois, elle a vite découvert la place.
« Je viens assez souvent pour que les produits aient changé quand j’arrive », rigole-t-elle.
Renaissance, bien plus qu’un magasin parmi d’autres
Si la clientèle de Renaissance a beaucoup changé, sa mission, elle, demeure tout à fait intacte.
L’organisme à but non lucratif (OBNL) possède 17 grands magasins au Québec, en plus de 58 locaux où les gens peuvent venir donner leurs objets et vêtements.
« On prend les dons des gens, on les vend, et on est capable de payer nos programmes sociaux. Tout le monde y trouve son compte », dit avec fierté le directeur, Éric St-Arnaud.
D’abord, l’organisme emploie 1150 personnes qui touchent des salaires bien plus élevés que le minimum, qui ont des avantages sociaux et des fonds de pension.
Ensuite, l’OBNL offre des parcours d’insertion, soit des formations payées de six mois.
S’ajoutent à ça les Centres d’Aide à l’Emploi Renaissance (CAER) que l’on retrouve dans de nombreuses friperies de l’organisme.
Tout ça est presque 100 % financé par les ventes en magasin.
« Je n’ai pas de propriétaires, je suis un OBNL dirigé par un conseil d’administration de 12 bénévoles », rappelle le directeur.
Cela lui permet d’avoir les coudées franches pour aider les gens, comme Renaissance entend le faire.
Au total, ce sont plus de 2000 personnes par année que l’OBNL aide à se réinsérer.
« Du 100 % local »
Éric St-Arnaud, qui dirige Renaissance depuis quatre ans et qui y travaille depuis 14 ans, est particulièrement fier d’être à la tête d’une boîte qui fait « du 100 % local ».
« C’est ce qui fait notre force. On reçoit localement. On vend localement. On crée de la job localement, et en plus on aide le monde localement », dit-il.
Une étude récente le rend aussi très confiant en l’avenir.
« D’ici 2030, les boutiques comme les nôtres vont dépasser en volume de vente celles de la fast fashion. Il y a un vrai besoin pour ce que nous vendons », laisse-t-il tomber.